«La colère ne faiblit pas» : les renseignements redouteraient un embrasement post-confinement

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«La colère ne faiblit pas» : les renseignements redouteraient un embrasement post-confinement© Loic VENANCE Source: AFP
Une pancarte «semons l’insurrection» aperçue lors d’une manifestation de Gilets jaunes à Nantes, le 11 janvier 2020 (image d’illustration).

Un climat de contestation intense rythme l’actualité française depuis l’émergence des Gilets jaunes. Malgré une apparente accalmie, les services du renseignement territorial français s’inquiètent d’un embrasement post-confinement selon Le Parisien.

Selon des notes confidentielles révélées le 11 avril par Le Parisien, le Service central du renseignement territorial (SCRT) effectue depuis quelque temps un «suivi de l’impact du Covid-19 en France». D’après le quotidien francilien, ses agents alertent aujourd’hui sur «un risque d’embrasement de la contestation sociale à la sortie du confinement».

Blouses blanches, Gilets jaunes : «un risque de transversalité des luttes»

«Le jour d’après est un thème fortement mobilisateur des mouvances contestataires. Le confinement ne permet plus à la grogne populaire de s’exprimer, mais la colère ne faiblit pas et la gestion de crise, très critiquée, nourrit la contestation», peut-on ainsi lire dans des notes datées des 7, 8 et 9 avril, citées par Le Parisien. Selon le SCRT, le concept de «jour d’après» ne manquerait pas de séduire les syndicats traditionnels, ainsi que les victimes économiques de la crise qui «pourraient être tentées de descendre dans la rue».

A partir de ses observations effectuées sur les réseaux sociaux, le SRCT s’inquiéterait particulièrement d’«une transversalité des luttes [associant] Gilets jaunes et blouses blanches».

Les auteurs de ces notes auraient par exemple constaté la diffusion d’une «attestation de déplacement révolutionnaire» éditée par un média alternatif bordelais se revendiquant des Gilets jaunes. Le document en question comporterait des cases à cocher du type «déplacements entre le domicile et le pouvoir indispensables à l’exercice d’émeutes», ou encore «participation à des commandos sur demande des assemblées populaires».

Un cas parmi d’autres qui fait redouter aux agents du SRCT «la création de comités de lutte entre personnes d’un même immeuble», mais aussi «une organisation commune à distance». Toujours selon Le Parisien, le SRCT estime que les acteurs d’un potentiel embrasement post-confinement seraient issus de mouvances qualifiées d’«ultra», de droite comme de gauche.

Ces révélations interviennent deux jours après l’audition du ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, par les députés, lors de laquelle il avait notamment fait part de ses inquiétudes quant à de nouvelles formes de délinquance et pointé l’existence de «réseaux d’ultra-droite et d’ultra-gauche […] actifs sur le net et qui préparent des actes à la sortie du confinement». «Notre vigilance contre les actes terroristes reste en outre toujours aussi forte», avait ajouté le membre du gouvernement.


leparisien.fr

Le 11 avril 2020 à 20h20, modifié le 12 avril 2020 à 14h10

Ils ont baptisé leur collectif « Refusons le retour à la normale ». Depuis le 4 avril, ces militants de la mouvance contestataire rennaise préparent des actions chocs à coups de slogans et invitations Facebook à des rassemblements… dont l’heure est connue (11 heures) mais pas le jour. Épidémie de coronavirus oblige. « Notre colère ne sera pas confinée. Retrouvons-nous dans la rue dès la fin du confinement! scandent-ils sur les réseaux sociaux. Mettons le pouvoir en quarantaine! »

Voilà le type de messages qu’analysent quotidiennement les policiers des renseignements français depuis la crise sanitaire. Dans des notes confidentielles sur le « suivi de l’impact du Covid-19 en France », les agents du service central du renseignement territorial (SCRT) alertent sur le risque d’embrasement de la contestation sociale à la sortie du confinement. « Le jour d’après est un thème fortement mobilisateur des mouvances contestataires, lit-on dans ces analyses datées du 7, 8 et 9 avril. Le confinement ne permet plus à la gronde populaire de s’exprimer, mais la colère ne faiblit pas et la gestion de crise, très critiquée, nourrit la contestation. »

C’est pourquoi le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, avait évoqué jeudi « des réseaux d’ultra-droite et d’ultra-gauche très actifs, qui appellent à préparer un certain nombre d’actes », devant la mission parlementaire. Mais sans livrer plus de précisions.

L’un documents appelant à des actions violentes qu’ont trouvé sur les réseaux les services de renseignement./DR
L’un documents appelant à des actions violentes qu’ont trouvé sur les réseaux les services de renseignement./DR  

Les notes du SCRT révèlent que des groupuscules de la mouvance autonome — tels « Nantes Révoltée » ou « Rouen dans la rue » — exploitent l’exaspération du monde médical face à la pénurie de masques et de matériel de protection. Et appellent ainsi « à une transversalité des luttes », qui associeraient « gilets jaunes et blouses blanches ».

Des manifestations sont déjà prévues pour le premier samedi post-confinement ou le 21 juin, en hommage à Steve Maia Caniço, ce jeune mort en marge d’une opération de police controversée à Nantes l’an passé. Lors des grèves de novembre contre la réforme des retraites, des rapprochements avaient déjà été observés entre Gilets jaunes radicalisés et cheminots irréductibles.

«Attestation de déplacement révolutionnaire»

Dans l’attente de la sortie du confinement, les agents du renseignement anticipent « la création de comités de lutte entre personnes d’un même immeuble » ainsi « qu’une organisation commune à distance ».

Ils ont constaté la diffusion d’une « attestation de déplacement révolutionnaire » éditée par un média alternatif bordelais se revendiquant des Gilets jaunes. Parmi les cases à cocher de ce document « à utiliser sans modération après le confinement » : « déplacements entre le domicile et le pouvoir indispensables à l’exercice d’émeutes », « participation à des commandos sur demande des assemblées populaires »…

Selon les policiers du renseignement, ces mêmes collectifs d’ultra-gauche s’exaspèrent des modalités du confinement et y voient l’occasion d’afficher « leur hostilité envers les forces de l’ordre ». « La police représente une menace plus grande que le virus lui-même », assène un site militant radical, affirmant que « le confinement est utilisé pour harceler, humilier et parfois tuer ceux identifiés à risques pour le pouvoir : les habitants des zones pauvres. » Quand un autre site voit dans le projet de « tracking » des malades du Covid-19 « l’efficience de la techno-police » visant à « surveiller les corps et âme de la plèbe ».

L’ultra-droite mobilisée

Cette contestation trouve aussi un écho parmi les sympathisants de l’ultra-droite, dont les identitaires. « L’ultra-droite critique la politique anxiogène qui est menée depuis le début de la crise par des technocrates de l’Etat, visant selon elle à culpabiliser et à manipuler les Français », résument les agents du SCRT. Lesquels ont relevé des écrits appelant ouvertement à la révolte violente.

« La France est une cocotte-minute […] Ce gouvernement macronien a-t-il conscience des sommes de haine et de colère qui s’accumulent ? […] Que les comportements collectifs pourraient se déchaîner contre lui avec toute la brutalité d’une mutinerie sanglante ? » prophétise par exemple un identitaire sur le site du groupuscule la Ligue du Midi. « Toutes les conditions sont réunies pour mettre à bas cette classe politique malfaisante », appuie un militant d’Égalité et réconciliation, estimant que « nous sommes en phrase prérévolutionnaire ».

«Un risque avéré de rapprochement entre ultras radicaux et syndicats»

Un membre des services de renseignement résume : « D’un côté, l’ultra-gauche interprète le confinement comme la mainmise de l’Etat et un supposé totalitarisme. De l’autre, l’ultra-droite nourrit fantasmes et théories du complot sur l’origine de la crise. Nous sommes très vigilants sur les formes que prendra cette contestation à l’issue. » D’un côté comme de l’autre de la mouvance, les sympathisants espèrent que la crise débouchera sur un nouveau modèle de société.

Selon le SCRT, le concept de « jour d’après » séduit aussi les syndicats traditionnels, qui estiment « que la crise démontre les limites du néolibéralisme » où « seule la logique financière prime ». Les victimes économiques de la crise pourraient être tentées de descendre dans la rue.

« Il y a un risque avéré de rapprochement entre ultras radicaux et syndicats dans les secteurs transport et énergie, constate David Le Bars, secrétaire général du syndicat des commissaires de la police nationale (SCPN). Des pans entiers de l’économie sont à l’arrêt forcé et d’autres en profitent, comme les grands groupes, ce qui crée encore des raisons au complotisme. »

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