La Poste condamnée à une amende de 120.000 euros pour la mort d’un sous-traitant

JUSTICE La victime, un homme de 34 ans, avait chuté dans la Seine en tentant de récupérer un colis tombé dans le fleuve lors d’une livraison sur une péniche

20 Minutes avec AFP

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La victime travaillait pour un sous-traitant de La Poste et n’était pas déclarée. — GILE MICHEL/SIPA

Le tribunal correctionnel de Nanterre (Hauts-de-Seine) a condamné lundi La Poste à une amende de 120.000 euros pour prêt de main-d’œuvre illicite après la noyade accidentelle en 2012 d’un coursier employé par un sous-traitant de sa filiale coliposte. Mi-mai, dans son réquisitoire, le procureur avait demandé une « amende maximale » de 150.000 euros.

Les faits s’étaient déroulés fin 2012. Seydou Bagaga, coursier de 34 ans de nationalité malienne, avait succombé le 8 janvier 2013, après avoir chuté dans la Seine trois semaines plus tôt à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine​) en tentant de récupérer un colis qu’il avait fait tomber dans le fleuve lors d’une livraison sur une péniche.

La victime pas déclarée par son employeur

L’enquête de l’Inspection du travail avait révélé que ce jeune père de famille, qui venait d’obtenir son titre de séjour, n’était pas déclaré par son employeur, DNC Transport, et que le donneur d’ordre, Coliposte, ne pouvait ignorer la situation. L’enquête avait aussi montré que sa déclaration n’avait été faite qu’une heure après sa mort.

« Cet accident tragique n’est aucunement représentatif ni des conditions de travail des salariés des sous-traitants, ni des conditions de recours aux entreprises sous-traitantes », a réagi La Poste, qui va « possiblement » faire appel.

« Ce drame ne doit pas être instrumentalisé pour instruire le procès du recours par La Poste à la sous-traitance », a poursuivi le groupe, tout en précisant que le « recours à ces professionnels ne représente pour La Poste que 20 % des colis distribués en France ».

« Remettre en question un système qui perdure à La Poste »

Pour le syndicat Sud-PTT, partie civile aux côtés des syndicats CGT et Unsa-Postes, « il s’agit bien de remettre en question un système qui perdure à La Poste », tout en soulignant que le PDG du groupe, Philippe Wahl, « devra tenir compte de cette condamnation ».

Dans son réquisitoire, le représentant du ministère public avait dénoncé « une opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d’œuvre hors du cadre légal du travail temporaire », mais aussi pour « marchandage » (prêt de main-d’œuvre ayant entraîné un préjudice pour un ou plusieurs salariés).

L’avocat de La Poste, Hervé Lehman, avait au contraire plaidé la relaxe, arguant que « le premier employeur de France » n’était pas le « monstre abominable » que l’accusation voulait décrire, ajoutant que c’était le gérant de DNC qui avait « embauché de façon clandestine M. Bagaga » et fixait sa rémunération.

Les tournées les plus difficiles pour les sous-traitants ?

Poursuivi pour travail dissimulé, l’ex-directeur de l’agence Coliposte d’Issy-les-Moulineaux a été condamné à une peine de six mois d’emprisonnement avec sursis.

La proportion de recours aux sous-traitants est passée de moins de 25 % à 73 % en Ile-de-France entre 2006 et 2012, selon Sud-PTT.

Pour un représentant du syndicat, qui avait été entendu à la barre mi-mai, La Poste réserve à ses sous-traitants les tournées les plus difficiles, leurs livreurs travaillent six jours sur sept, sans congés payés ni jours de récupération et dans des amplitudes horaires bien supérieures à celles des « colipostiers » (…) pour une rémunération bien moindre.

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