A une semaine de la journée de grève du 5 décembre, la mobilisation s’annonce massive et ne se cantonnera pas aux seuls secteurs bénéficiant de régimes spéciaux. Un nombre exceptionnel de préavis de grève ont été déposés, notamment dans les entreprises privées. D’ores et déjà, la reconduction du mouvement, au moins pour quelques jours, semble acquise dans plusieurs branches. Rapports de force fait le point pour vous, secteur par secteur.
Dès le 20 septembre, les syndicats de la RATP ont lancé un appel à une grève reconductible à partir du 5 décembre. Par la suite, plusieurs fédérations syndicales leur ont emboîté le pas avant qu’un appel interprofessionnel national pour cette date soit émis mi-octobre par la CGT, FO, SUD, la FSU et plusieurs organisations de jeunesse.
Cet appel unitaire a donné un nouvel essor dans les branches professionnelles pour mobiliser à partir du 5 décembre. Depuis, la CFE-CGC a appelé à participer aux manifestations, et la CFDT-Cheminots a déposé un préavis de grève reconductible, même si cette dernière n’exclut pas de le lever si le gouvernement fait des propositions. Côté gouvernemental, Édouard Philippe a annoncé que le projet de loi serait connu précisément en janvier et que les classes d’âges concernées par la réforme seraient reculées. Au risque de ne rien déminer, de fixer une ligne d’horizon proche rendant la mobilisation du mois de décembre évidente, et d’enregistrer une lourde défaite aux municipales de mars 2020.
RATP
Dès le 20 septembre, les syndicats de la Régie autonome des transports parisiens UNSA, SUD, CFE-CGC, FO, Solidaires RATP appellent à une grève illimitée à partir du 5 décembre. Ils ont été rejoints fin octobre par la CGT, deuxième organisation syndicale dans l’entreprise. Pour le 5 décembre, de source syndicale, les chiffres de grève devraient être comparables au 13 septembre où près de 90 % des agents avaient cessé le travail. Des assemblées générales par ateliers et dépôts voteront le 5 ou le 6 décembre au matin la reconduction ou non de la grève. Avec le week-end des 7 et 8 décembre, la force réelle du mouvement se mesurera dans le courant de la journée du lundi 9 décembre. Cependant, l’ambiance serait à un niveau de combativité rarement observé, bien supérieur à la normale.
Chimie
La fédération des industries chimiques CGT appelle à la grève le 5 et à reconduire le mouvement en assemblée générale. FO et SUD ont la même position. Cela concerne évidemment les raffineries, mais aussi de très nombreuses entreprises. De source syndicale, aucun produit pétrolier ne devrait sortir des raffineries sur tout le territoire le 5 décembre et des assemblées générales sont prévues dans les raffineries en fin de journée pour décider des suites de la grève. Les organisations syndicales se mettent en ordre de bataille pour obtenir un mouvement aussi puissant que lors de la réforme des retraites en 2010.
SNCF
SUD-Rail a ouvert la voie dès le 24 septembre en annonçant se joindre à l’initiative des syndicats de la RATP pour un « tous ensemble » à partir du 5 décembre. L’UNSA, puis la CGT et enfin la CFDT lui ont emboîté le pas. FO non représentatif à la SNCF appelle également à la grève illimitée. La journée du 5 décembre s’annonce très suivie dans le rail. D’ores et déjà, le vice-président des Hauts-de-France a annoncé qu’aucun train ou presque ne circulera dans sa région. Une information qu’il dit tenir de la direction de l’entreprise. La grève devrait être reconduite dans de nombreux endroits par les assemblées générales de cheminots. « Il y a une vraie colère sociale et nous tablons sur au moins 150 assemblées générales sur tout le territoire le 5 décembre pour décider des suites du mouvement », assure un syndicaliste joint au téléphone. La grève devrait durer là aussi au moins jusqu’au lundi 9 décembre, où les cheminots regarderont combien de secteurs sont en grève illimitée avec eux avant de décider de poursuivre ou non leur mobilisation.
Routiers
Dans un communiqué commun en date du 14 novembre, la CGT et FO invitent « tous les salariés des transports à se mobiliser, et ce à partir du 5 décembre pour des actions fortes sur le territoire national ». Dans un nouvel appel unitaire incluant Solidaires Transports, les trois fédérations demandent aux salariés de « participer aux assemblées générales pour débattre du niveau de mobilisation et des conditions de la reconduction du mouvement ». Les préavis de grève concernent les chauffeurs routiers, mais aussi les transports urbains et routiers de voyageurs. L’UNSA transports appelle également à la grève. Par contre, la CFDT, première organisation syndicale dans la branche ne participe pas à la mobilisation.
Éducation nationale :
Avec plus d’un million d’agents de l’État, c’est un secteur qui a son importance. Dans l’Éducation, ce sont les organisations syndicales minoritaires qui appellent à une grève reconductible à partir du 5 décembre : SUD-éducation, CGT-FERC et FO. De son côté, la FSU reste fixée sur la seule journée du 5, même si dans le secondaire son principal syndicat (le SNES) infléchit sa position et n’exclut pas totalement de reconduire le mouvement. Le climat a changé dans l’éducation nationale vis-à-vis de la réforme des retraites. Si la réforme paraissait lointaine il y a encore une dizaine de jours, de nombreux enseignants expriment aujourd’hui leur volonté de se mettre en grève au moins le 5 décembre. Celle-ci devrait donc être importante et de nombreuses écoles seront fermées.
Jeunesse :
Dans les universités, les syndicats UNEF et Solidaires étudiants déjà mobilisés contre la précarité étudiante appellent à la mobilisation à partir du 5 décembre. Dans les lycées, les organisations lycéennes FIDL, MNL et UNL mobilisent aussi pour cette date. Quelques blocages d’établissements ont déjà eu lieu en région parisienne ou à Toulouse ces derniers jours, portant plutôt sur les conséquences de la réforme du lycée. À chaque fois, la police est intervenue, souvent en faisant usage de gaz lacrymogènes et de lanceurs de balles de défense. La faible influence des organisations de jeunesse rend à ce stade inconnue la mobilisation à venir dans les lycées.
Énergie :
La fédération Mines et énergie de la CGT appelle à la grève le 5 décembre et à des assemblées générales pour décider des suites du mouvement et des actions à mener le jour même. Des baisses de charges sont à prévoir tant dans les centrales hydrauliques et nucléaires, ainsi qu’à EDF où des coupures ciblées visant les entreprises qui licencient ou l’État sont envisagées. FO comme SUD appellent également à la grève illimitée.
Transport aérien
Onze syndicats d’Air France (Alter, CFE-CGC, CFTC, CGT, FO, SNGAF, SNPNC, SUD aérien, Unac, Unsa aérien et Unsa PNC) appellent les salariés à la grève le 5 décembre. Par ailleurs, FO et la CGT invitent les personnels au sol à une grève reconductible, tandis qu’un préavis CGT couvre les contrôleurs aériens entre le 5 et le 7 décembre.
Pôle emploi
L’agence pour l’emploi n’est pas habituellement en pointe lors des mobilisations interprofessionnelles. Il est probable que le 5 décembre ne déroge pas à la règle, même si un appel national à la grève le 5 décembre et les jours suivants a été lancé par la CGT, FO, FSU et Solidaires. De plus, les syndicats de Pôle emploi sortent juste d’une séquence d’élections professionnelles rarement propice à la mobilisation des équipes syndicales sur un autre sujet.
Éboueurs
La collecte et le traitement des déchets devraient être touchés par la grève dans plusieurs grandes villes comme Paris, Marseille ou Montpellier. Selon nos informations, au moins les employés de la ville de Paris chargés de la collecte des poubelles pourraient reconduire le mouvement plusieurs jours.
Hôpitaux
Une jonction s’opérerait-elle entre les revendications spécifiques d’un secteur en lutte depuis neuf mois et la question des retraites ? C’est ce qu’observe un syndicaliste CGT de la santé dans la Seine maritime qui annonce que plusieurs services de l’hôpital Dieppe seront en grève le 5 décembre. Nationalement, un appel de la CGT, FO et SUD appellent les soignants à cesser le travail ce jour là. Un appel relayé par les collectifs en lutte de l’hôpital.
Ports
La CGT ports et docks appelle à une grève « carrée » de 24 h. Ce type d’appel est généralement très suivi, pouvant atteindre des chiffres avoisinant les 80 %, dans un secteur où la CGT est écrasante. Par contre, rien n’est prévu le 6 décembre.
Cette liste n’est pas exhaustive. Des appels à la grève « à partir du 5 décembre » ou « dès le 5 décembre » ont été lancés, parfois de façon unitaire, dans l’ensemble de la fonction publique ou des entreprises publiques : collectivités territoriales, impôts, La Poste, l’INRA, la Banque de France. De même, des préavis et des appels à la grève pour la journée du 5 décembre touchent le secteur privé comme la branche métallurgie ou commerce. Dans un communiqué en date du 28 novembre, la CGT annonce qu’un millier de préavis ont été déposés dans le privé, pourtant non soumis à une obligation de déclarer à l’avance des arrêts de travail.
Enfin, des appels unitaires à la grève et à des assemblées générales pour la reconduire ont été lancés dans plusieurs départements. Pour illustrer l’affluence du nombre de préavis de grève, les Bouches-du-Rhône en compte plus de 700 déposés par la seule CGT. Sans claironner, les syndicats s’attendent à une journée monstre et espèrent qu’elle donne confiance aux salariés pour poursuivre le lendemain.
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