Retraites à points : les salariés du privé ont tout à y perdre

Loin des idées reçues, la réforme des retraites ne vise pas exclusivement à réduire les pensions des régimes spéciaux, malgré une communication gouvernementale tournée vers la dénonciation de pseudo privilégiés. Sans s’aventurer trop loin dans des simulations, dans la mesure où beaucoup d’éléments restent en suspends, nous pouvons quand même estimer que les retraites des salariés comme des fonctionnaires vont nettement baisser. À moins de travailler plus longtemps pour conserver des niveaux de pensions comparables.

Réglons tout de suite une question de vocabulaire. Pour mieux comprendre les débats sur les retraites, vous avez besoin d’enregistrer un terme : le taux de remplacement. Pour faire simple, il s’agit du pourcentage de votre dernier revenu en activité que vous toucherez en pension, afin de remplacer votre salaire lorsque vous serez à la retraite. Ce taux tourne aujourd’hui en moyenne autour des 75 % pour les salariés du privé. Cependant, il peut varier fortement selon que vous ayez une carrière complète ou non, une décote ou une surcote, quatre enfants ou aucun.

Des pensions rabotées

Restons avec les salariés du privé, les plus nombreux à être concernés par la réforme. Nous traiterons des fonctionnaires et des régimes spéciaux dans un prochain article. Dans le socle du système à points voulu par l’exécutif, nous savons que l’ensemble de la carrière sera prise en compte dans le calcul des pensions. Cet élément n’a jamais varié depuis la publication du rapport Delevoye. Par conséquent : fini le calcul sur la base des 25 meilleures années. Ainsi, les moins bonnes années viendront baisser mécaniquement votre pension future. Effectivement, qui dit salaires plus bas, dit moindre montant de cotisations. Or c’est à partir de ces cotisations que sera attribué votre nombre de points. À ce jour : 10 € cotisés représentent un point, et un point attribué vaudrait 0,55 € de pension. Avec moins de points à multiplier par 0,55 €, la pension sera moins importante.

A quelle baisse peut-on s’attendre ? Nous ne pouvons le dire avec précision pour le moment, car nous ne disposons pas des données sur le ratio moyen et les montants correspondants entre les bonnes et mauvaises années d’une vie de salarié. Pour autant, lorsqu’en 1993 le nombre des meilleures années dans le calcul des pensions est passé de 10 à 25, la baisse moyenne des pensions pour les salariés a été de 6 %. Avec la réforme des retraites à venir, la chute pourrait être plus importante encore. Le gouvernement veut en effet limiter à 14 % du PIB les dépenses liées aux pensions. Elles sont aujourd’hui de 13,8 %. Or, d’ici à 2050, le nombre de personnes à la retraite augmentera de 6 millions. Plus de retraités devront donc se partager 14 % du PIB. Les parts pour chacun diminueraient. Une hypothèse que ne retient pas le Conseil d’orientation des retraites qui table sur la croissance pour augmenter suffisamment le PIB et maintenir le niveau des pensions.

Voire même très rabotées

Autre élément qui aurait un impact à la baisse sur les retraites : l’instauration d’un âge pivot à 64 ans. Là, le flou est largement entretenu. Si le gouvernement et le chef de l’État ne font pas mystère, déclaration après déclaration, de la « nécessité » de travailler plus longtemps, le mécanisme pour y parvenir est encore incertain. Normalement, le système à points ne connaît pas de durée de cotisation. Seul l’âge légal de 62 ans compte. Mais le rapport Delevoye fixe un âge avant lequel il n’est pas recommandé de partir. Ainsi, en soldant ses droits à 63 ans, une décote de 5 % serait appliquée. Et même 10 % si vous les faites valoir à 62 ans. L’effet cumulé de cette mesure avec la fin du calcul sur les 25 meilleures années pourrait être désastreux.

Pour autant, la comparaison des pensions avec et sans le nouveau système est difficile, dans la mesure où les réformes précédentes ont augmenté le nombre de trimestres et d’annuités nécessaires à l’obtention d’une retraite à taux plein. Avec une décote bien sûr. La loi de 2014 l’a notamment retardée à 43 annuités pour la génération partant en 2035. Mais assurément, l’empilement des dispositions limitatives pour bénéficier intégralement de ses droits impliquera pour de nombreux salariés l’obligation de travailler plus longtemps. À moins de faire le « choix » de pensions misérables. D’autant que la valeur du point à 0,55 € n’est pas totalement garantie, contrairement aux pensions d’aujourd’hui.

Autant de raisons qui font dire au collectif Nos retraites ou à la CGT qu’il faut s’attendre à une baisse des pensions de l’ordre de 15 à 25 %. Même si encore une fois, les calculs précis sont rendus impossibles par la présence de nombreuses inconnues. Mais, quels que soient les paramètres finaux retenus par le gouvernement, l’objectif de ce dernier reste la baisse du taux de remplacement.

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