Ce qu’il faut savoir sur le COVID-19

Coronavirus : La synthèse

Ce qu’il faut savoir sur le COVID-19

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LUNDI 9 MARS 2020par DOMINIQUE DUPAGNE

Informations sur le coronavirus COVID-19 destinées à informer le public sous forme de questions/réponses. Cet article sera mis à jour quasi-quotidiennement. Si vous pensez avoir détecté une erreur, ou si vous vous posez une question qui n’est pas traitée, intervenez dans le forum d’échanges sous l’article.

Version du 11/3/2020 : ajout de l’absence d’excès de risque chez la femme enceinte, du détail de l’excès de risque en cas de comorbidités, et du témoignage du Dr Daniele Macchini sur la situation à Bergame.

Lors de la grippe A/H1N1 de 2009-2010, j’avais rédigé un article avec des confrères généralistes pour apporter à nos patients et au public une information claire et dépassionnée sur cette épidémie. Cet article avait été très apprécié et je vais tenter la même démarche pour le coronavirus COVID-19.

Le coronavirus COVID-19 est-il vraiment dangereux ?

Oui, ceux qui pensent que l’infection à COVID-19 est moins préoccupante que la grippe saisonnière se trompent : voici le taux de létalité comparé de ces deux maladies :

Cela signifie par exemple que la grippe tue 2 adultes jeunes et 83 seniors sur 10.000 malades. Le COVID19 tue 20 adultes jeunes et 800 sujets de 70 à 79 ans sur 10.000 malades.

Les chiffres de ce graphique largement diffusé donnent un ordre de grandeur de la situation actuelle, mais ils sont l’objet de critiques justifiées :
- Des spécialistes fiables considèrent que le nombre de cas bénins ou sans symptômes est très sous-évalué, et que cela fausse le calcul de la mortalité due au COVID-19 dans le sens d’une exagération de sa gravité : à nombre de morts égal, plus il y a de malades, plus le taux de mortalité chez les malades baisse.
- A l’inverse, d’autres experts font remarquer que pour le COVID-19, on compte les décès chez les malades, alors que pour la grippe, les chiffres du graphique sont estimés par des méthodes statistiques. Lorsque les décès de la grippe sont décomptés un par un comme pour le COVID-19, ils sont dix fois moins nombreux.

En pratique, cela signifie qu’il reste des incertitudes, mais que le COVID-19 sera sans doute environ dix fois plus mortel que le virus de la grippe, qui est lui même heureusement peu mortel ! (sauf chez les vieillards) : un décès prouvé pour 10.000 malades de la grippe en moyenne. Chez les sujets jeunes et sans facteurs de risque, la mortalité du COVID-19 devrait tourner autour de 1 mort pour 1000 sujets infectés, soit dix fois plus que la grippe.

Témoignage du Dr Daniele Macchini

Ceux qui pensent encore que l’épidémie de COVID-19 n’est pas pire qu’une grippe saisonnière devraient lire le témoignage poignant du Dr Daniele Macchini, médecin italien travaillant à Bergame :

Une analyse récente (en anglais) conforte la gravité de notre situation à partir de données étrangères.

Pour se remonter le moral, voici un graphique qui montre que le taux de mortalité par malade en Chine diminue régulièrement, essentiellement parce que l’on découvre plus de malades infectés qu’on ne le pensait initialement, mais aussi parce que les médecins chinois progressent en efficacité dans la prise en charge des cas graves.


Source

Enfin, nous avons les chiffres de la Corée du sud, pays à haut niveau de vie, qui montre une mortalité plus faible qu’en Chine.
Sur 188.000 personnes testées
- 7134 sont infectées
- 50 sont décédées
Ce qui donne une mortalité globale de 50/7134 = 0,7%, soit 7 décès pour 1000 sujets infectés, symptomatiques ou non symptomatiques.. Ce chiffre est compatible avec l’hypothèse d’une mortalité de 1 sur 1000 chez les sujets de moins de 65 ans sans facteurs de risque infectés par le coronavirus COVID-19.

La maladie est-elle plus dangereuse chez les enfants ?

Non ! C’est la bonne nouvelle qui ressort des données disponibles (graphique ci-dessus). Le taux de mortalité chez l’enfant en bonne santé est infime. En revanche, l’enfant peut jouer un rôle dans la diffusion du virus, ce qui conduira peut-être les autorités à fermer temporairement toutes les écoles. Attention ! Cela ne veut pas dire que les enfants ne risquent pas de tomber malades, mais qu’ils s’en remettent mieux que les adultes, comme c’est le cas pour beaucoup de maladies virales.
Si votre enfant présente une toux et une fièvre, il est préférable de le confiner chez vous jusqu’à guérison, même si rien ne semble indiquer qu’il est infecté par le coronavirus, car il pourrait répandre la maladie.

Qui risque d’en mourir ?

Les principales victimes du COVID-19 sont les personnes âgées de plus de 60 ans , le risque doublant après 70 ans et quadruplant après 80 ans (premier graphique plus haut). C’est dans cette tranche d’âge que la lutte contre la contamination est vitale.

L’autre population à risque est constituée par les sujets souffrant de maladies bronchiques ou pulmonaires chroniques, de diabète, d’hypertension ou de problèmes cardiaques. L’échantillon de malades étudié est trop restreint pour connaître le risque associé à d’autres pathologies, comme un déficit immunitaire.

La Chine a publié le 9 mars une étude réalisée sur 191 patients hospitalisés :

Source

Attention à ne pas prendre ces chiffres à la lettre, car il y a beaucoup d’incertitude autour d’eux. C’est simplement une indication sur les maladies préexistante qui nécessitent de se protéger au maximum du virus.

Je suis enceinte, dois-je m’inquiéter ?

Non, la grossesse n’est pas une situation à risque en cas d’infection, ni pour la mère, ni pour l’enfant source.

Quels sont les symptômes de la maladie due au COVID-19 ?

De nombreux sujets ne ressentent aucun symptôme ou très peu, c’est le cas notamment des enfants. Lorsqu’ils existent, les symptômes de l’infection à COVID-19 sont proches de ceux de la grippe. Heureusement, l’épidémie de grippe s’éteint progressivement ce qui diminuera le risque de confusion.

Lorsque les symptômes sont présents, ils associent le plus souvent une toux (avec ou sans glaires), une fièvre, et une difficulté à respirer. Ces trois symptômes majeurs sont les plus fréquents, mais certains malades n’ont pas de fièvre, ou toussent plusieurs jours avant qu’elle n’apparaisse.

À ces trois symptômes principaux peuvent s’ajouter des courbatures, une fatigue, un mal de gorge, des maux de tête, un rhume, un manque d’appétit, voire des douleurs du ventre et une diarrhée.

La période d’incubation du COVID-19 est très variable. Il s’agit du délai qui sépare la contamination de l’apparition des premiers symptômes (en cas de maladie symptomatique). Ce délai initialement estimé à environ 5 jours pourrait en fait varier de 0 à 28 jours, or, les sujets contaminés sont parfois contagieux durant cette période. Il existe encore une controverse sur ce délai étonnamment variable.

Que faire si l’on présente ces symptômes ?

Il ne faut surtout pas se rendre aux urgences, ni chez votre médecin généraliste, pour deux raisons :
- Si vous n’avez pas le coronavirus, la salle d’attente des urgences et de votre médecin sont les lieux où vous avez le plus de risque de l’attraper !
- Si vous êtes infecté par le coronavirus, vous risquez de contaminer d’autres personnes fragiles.
Il est préférable de commencer par téléphoner à votre généraliste si vos symptômes sont modérés, ou de rechercher une téléconsultation avec lui ou un autre médecin généraliste. N’appelez le SAMU (composez le 15 sur votre téléphone) que si vous avez du mal à respirer. Pour les sourds et malentendants, il existe un numéro spécifique, le 114.

Il est important de comprendre que le symptôme inquiétant, celui qui pourrait conduire à une hospitalisation, c’est un essoufflement. La toux, la fatigue, la respiration sifflante, la fièvre, tout cela est désagréable, mais ça ne tue pas. Ce qui tue, c’est une pneumonie particulière, qui empêche le sang de s’oxygéner correctement. Dans ce cas, les malades sont essoufflés au moindre effort, voire au repos, comme s’ils venaient de monter des escaliers, et c’est cela qui est vraiment inquiétant et qui justifie d’appeler le SAMU.

Existe-t-il un traitement ?

Pour l’instant, aucun traitement n’a fait la preuve de son efficacité contre le virus. Les antibiotiques sont inefficaces. D’autres médicaments sont à l’étude. Dans les cas graves, l’hospitalisation en réanimation a pour but d’oxygéner le sang et de maintenir les organes en fonctionnement en attendant la guérison naturelle de l’infection.

Il n’existera pas de vaccin avant la fin de l’année (dans le meilleur des cas…)

Pourquoi se protéger, puisqu’on l’attrapera forcément un jour ?

Si le virus continue à circuler dans le monde tous les ans, il sera en effet quasiment impossible d’y échapper, sauf à vivre en ermite dans une forêt ! En revanche, il faut éviter de saturer les hôpitaux dont la capacité de prise en charge des malades est limitée. Plus l’épidémie sera étalée dans le temps, plus notre système de santé pourra y faire face et moins vous aurez de risque de mourir en cas d’infection.

À ce jour, rien ne prouve que l’épidémie sera durable. L’épidémie chinoise semble être en train de se terminer, avec un nombre infime de morts par rapport à sa population (2 morts par million de chinois).


Source

La question est de savoir si ce résultat surprenant est dû à un phénomène naturel ou au confinement autoritaire des populations exposées, confinement irréalisable en France. Pour autant, la Corée du Sud voit aussi le nombre de cas quotidiens diminuer tous les jours.

Comment est-on contaminé ?

Les deux modes de contamination connus sont l’inhalation de gouttelettes d’eau émises par la toux des malades, et la transmission par contact. Le contact peut être direct, entre un malade et un sujet sain, ou indirect, pas l’intermédiaire d’un objet contaminé : poignée de porte, monnaie, carte de crédit, barre de métro, clavier etc. Le virus peut survivre plusieurs heures sur un objet, voire plusieurs jours, et il survit d’autant plus longtemps que l’air ou le support sont humides. Le virus ne traverse pas la peau, mais l’infection survient lorsque la main contaminée est mise au contact de la bouche, du nez ou des yeux. La protection repose donc sur le filtrage de l’air inspiré, et sur la désinfection soigneuse et régulière des mains.

Les produits ou colis provenant de zones contaminées ne sont pas considérés comme dangereux du fait des délais de livraison source. Pour ce qui est du courrier, tant que l’épidémie n’est pas généralisée, il ne doit pas être considéré comme dangereux, mais cela pourrait changer.

Comment se protéger de la contamination par voie respiratoire ?

Des données récentes laissent penser qu’en dehors des espaces très confinés, la contamination par inhalation est nettement plus rare que celle par contact. Sauf à se faire tousser en pleine figure, on ne peut être contaminé en respirant dans la rue : les gouttelettes d’eau porteuses du virus sont trop peu nombreuses car diluées dans l’air, et surtout elles retombent rapidement au sol. Il paraît donc sans danger de « prendre l’air » en se promenant dans la rue, à condition qu’elle ne soit pas bondée.
Aucun des différents masques disponibles n’a prouvé son intérêt pour éviter la contamination aérienne dans la vie courante, mais on n’a pas prouvé non plus qu’ils ne servaient à rien ! Ces masques sont surtout destinés à protéger les gens qui soignent les malades ou qui les prennent en charge. Le port d’une écharpe ou d’un cache-col sur le nez et sur la bouche semble une protection suffisante lors des sorties extérieures dans la vie courante (ceci est un avis personnel non documenté).

D’une façon générale, limiter les contacts, et ne pas se tenir contre les gens, notamment si ils toussent, constituent de bonnes mesures de protection contre la contamination par les voies respiratoires.

C’est le risque de contamination par contact qui nécessite le plus d’attention et de précautions.

Comment éviter la contamination par contact ?

Le principe est d’éviter de déposer des virus sur les zones du corps qui permettent sa pénétration dans l’organisme : la bouche, le nez et les yeux. Les mains étant les principales responsables de la contamination par contact, ce sont elles qu’il faut protéger et désinfecter régulièrement.

Le virus COVID-19 survit plusieurs heures à l’air libre, voire plusieurs jours en présence d’humidité. Le port de gants en cuir n’a donc pas de sens. Le port de gants jetables n’est pas simple et ne s’impose pas en dehors des équipes soignantes. La méthode de protection la plus pertinente repose donc sur la désinfection régulière des mains, et notamment après contact avec une personne ou un objet potentiellement contaminé. Deux méthodes sont efficaces :
- Le lavage à l’eau et au savon
- La friction avec de l’alcool (éthanol) à 70°

L’alcool à 70° étant desséchant pour la peau, on lui ajoute une petite quantité de glycérine (corps gras) qui persiste après l’évaporation de l’alcool et protège la peau du dessèchement ou de l’irritation. Ce mélange porte le nom de SHA (Solution Hydro Alcoolique).

Certains fabricants ajoutent un gélifiant pour former un GHA (Gel Hydro Alcoolique) qui peut paraître plus simple d’emploi, mais qui ne présente aucune supériorité antivirale par rapport à la SHA.

Le taux d’alcool des boissons alcoolisées (vodka, gin…) est insuffisant pour combattre les virus avec une efficacité correcte.

En cas de pénurie, il est facile de fabriquer de la SHA en ajoutant 5% de glycérine (achetée en pharmacie ou sur internet) à de l’alcool à 70°c (éthanol). Attention à ne pas utiliser d’alcool ménager ou à brûler qui contient une petite proportion de méthanol, alcool toxique même par simple contact, surtout en cas d’usage prolongé ou répété.

En cas de pénurie d’alcool à 70°, ou pour faire des économies, il est possible d’acheter du bio-éthanol à 96° destiné aux feux de cheminées sans conduit, et de le diluer avec 27% d’eau pauvre en calcaire (Volvic ou équivalent, eau déminéralisée pour fer à repasser). Ce n’est pas à 1% près ! Ajoutez 200 ml d’eau à 1 litre d’alcool à 96° et 50 ml de glycérine Faites en revanche attention à ne pas enflammer l’alcool. Tenez vous loin de toute source de chaleur élevée. De même, si vous êtes fumeur et que vous utilisez de la SHA avant d’allumer votre cigarette, attendez que l’alcool soit évaporé ! Des imprudents se brûlent les mains ou les cheveux pour ne pas avoir tenu compte de ce conseil !

Enfin, pour la désinfection du mobilier et autres poignées de portes, l’alcool ménager utilisé avec des gants et en aérant après usage fait parfaitement l’affaire, de même que les détergents courants. Le virus ne résiste pas au passage en lave-linge ou lave-vaisselle.

Une « recette » de SHA de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) qui contient de l’eau oxygénée circule sur internet. Cette recette est destinée à des usages « multirisques » et l’eau oxygénée est inutile pour combattre les virus.

Est-il judicieux de s’isoler chez soi ou à la campagne ?

Cette réaction intuitive s’appelle l’autoconfinement. Il est clair qu’elle diminue le risque de contamination dans la période d’incertitude actuelle, à condition bien sûr de recevoir peu de visites et de ne pas trop fréquenter les magasins. Chacun doit mettre en balance les conséquences négatives de son autoconfinement avec son risque personnel de présenter une complication en cas d’infection (voir quelles sont les personnes à risque plus haut).

De même, éviter les restaurants, les spectacles ou les expositions diminue le risque de contamination. Cette réalité risque de provoquer des drames économiques chez certains corps de métier, mais il serait malhonnête de nier l’efficacité de l’autoconfinement. De nombreuses entreprises sont en train de basculer vers le télétravail (quand cela est possible bien sûr).

Combien de temps met-on à guérir ; est-on immunisé ensuite ?

Dans les cas sérieux, la guérison peut prendre plusieurs semaines. Tout dépend de la gravité initiale.
L’immunité conférée par l’infection n’est pas claire, il semble exister des mutations du virus. Il est trop tôt pour répondre à cette question.

Je remercie les relecteurs qui m’ont permis de corriger et d’améliorer le texte initial.

Si vous avez d’autres question, n’hésitez pas à les poster ci-dessous. Pour suivre les mises à jour, vous pouvez me suivre sur Twitter : @DDupagne.

Note pour les journalistes : Je refuse d’être médiatisé sur le COVID-19. Je n’ai aucune expertise justifiant d’être interviewé, je suis un vulgarisateur, scientifique certes, mais seulement un vulgarisateur. Tout ce que je sais et que j’ai à dire se trouve dans cet article.


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