Covid-19 : pourquoi les Etats-Unis n’arrivent pas à enrayer l’épidémie

Donald Trump a enfin affiché un masque en public alors même que les Etats-Unis s’enfoncent dans une grave une crise sanitaire aux causes multiples.

Donald Trump avec un masque. Une première en public.  AFP/Alex Edelman

Le 12 juillet 2020

Les Etats-Unis sont de loin le pays le plus lourdement touché par la pandémie avec 134 729 morts selon le comptage effectué ce samedi par l’université Johns Hopkins. Selon les chiffres qui font référence depuis le début de la crise du nouveau coronavirus, le pays a encore enregistré ce week-end un nouveau record de contaminations avec 66 528 cas en 24 heures. Ce terrible constat est-il la cause de la première apparition publique tardive de Donald Trump avec un masque? Rien n’est moins sûr tant la politique du milliardaire sur le Covid-19 est à géométrie variable.

Cette première apparition masquée du président, lors d’une visite à l’hôpital militaire Walter Reed dans la banlieue de Washington, a une forte valeur symbolique dans ce pays où le port du masque face là la maladie est l’objet d’un débat partisan. Alors pourquoi les Etats-Unis n’arrivent il pas à infléchir la courbe ?

Covid-19 : pourquoi les Etats-Unis n’arrivent pas à enrayer l’épidémie

Les explications sont multiples et c’est la référence ultime outre-Atlantique qui a finalement le mieux résumé les enjeux : le Dr Fauci, l’immunologue le plus célèbre du pays et qui conseille le président. Pour le scientifique, le premier problème : la disparité des politiques sanitaires entre états, villes, comtés du pays continent rend la lutte contre le virus compliquée, comme il l’a expliqué dans une longue interview au site FiveThirtyEight.

« Certaines parties du pays, comme certaines villes ou New York, ont pris le contrôle des choses, a dit Anthony Fauci au site spécialisé ce jeudi. Mais en tant que pays, quand nous nous comparons à d’autres, je ne crois pas qu’on puisse dire que nous nous en sortions bien », a-t-il constaté.

« C’est compliqué »

La raison évidente de la hausse du nombre des cas aux Etats-Unis tient pour le spécialiste dans un mélange entre des décisions politiques et une partie de la population rétive à suivre les recommandations sanitaires. « Ce n’est pas une chose unidimensionnelle. C’est compliqué. Il y a des gouverneurs et des maires qui ont joué le jeu parfaitement », a-t-il encore commenté. « Ce qui s’est passé, c’est que beaucoup de citoyens ont dit : Vous savez, soit on m’enferme, soit je déchire tout ça. Et on pouvait voir, rien qu’en regardant la télévision ou les journaux, des photos de personnes dans les bars et des rassemblements, qui sont des clusters parfaits, surtout si vous n’avez pas de masque… », s’est lamenté le médecin.

Autre reproche fait à l’Amérique, le déconfinement de certains Etats trop rapide par rapport à la réalité de leur situation. « Il y a des moments où, malgré les lignes directrices et les recommandations d’ouverture prudente, certains États les ont ignorées et se sont ouverts trop rapidement », a tiré encore sur l’ambulance le patron des Centres de prévention et de lutte contre les maladies (CDC). Ciblés particulièrement, la Floride et l’Arizona, où la situation est critique. Autres exemples, en Géorgie, Atlanta a décrété vendredi un retour à une phase de confinement strict après avoir partiellement rouvert la ville à un fonctionnement normal. Au Texas, des hôpitaux se disent saturés.

Un schisme partisan dangereux

L’autre raison de cette crise sanitaire sans précédents aux Etats-Unis : le schisme partisan qui traverse la société américaine. Là aussi, le professeur, regrette cette fracture qui contribue à la propagation du nouveau coronavirus.

« Il faut avoir les yeux bandés et se couvrir les oreilles pour penser que nous ne vivons pas dans une société très divisée aujourd’hui, d’un point de vue politique. Je veux dire, c’est juste malheureux, mais c’est ce que c’est », a notamment expliqué le Dr Fauci. « Et vous savez, par expérience historique, que lorsque vous n’avez pas l’unanimité dans une approche de quelque chose, vous n’êtes pas aussi efficace dans la façon dont vous le traitez. Je pense donc qu’il faut partir du principe que s’il n’y avait pas tant de divisions, nous aurions une approche plus coordonnée », a amèrement constaté celui qui ne partage pas la vision de Donald Trump sur la gestion de l’épidémie. La chance du président américain est qu’actuellement, la courbe des décès n’épouse pas celle des infections qui explose littéralement.

Covid-19 : pourquoi les Etats-Unis n’arrivent pas à enrayer l’épidémie

C’est là que la polémique du masque devient emblématique des difficultés qu’ont les scientifiques américains à faire passer leur message de prévention. Donald Trump a ainsi contribué à faire de cette question un enjeu de controverse politique, car le refus de porter le masque est vu dans une partie de la société américaine comme une affirmation de la liberté individuelle du citoyen face aux autorités fédérales et internationales.

Samedi soir, Trump a mis un masque bleu sombre pour visiter des militaires américains blessés au combat. « Lorsque vous parlez avec des soldats qui sortent tout juste de la table d’opération, je crois que c’est quelque chose de très bien de porter un masque », a-t-il déclaré à la presse avant cette visite. « Je n’ai jamais été contre les masques, mais je suis convaincu que cela dépend du moment et de l’endroit », a-t-il affirmé. Une déclaration qui ne contribuera pas à clarifier le bon usage des mesures sanitaires pour la population américaine.

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