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Par David Pargamin
Le ciel va vibrer, ces prochains jours, avec de drôles d’escadrilles. Les hélicoptères américains débarquent en France. Pour la première fois depuis le retour de la France dans l’Otan, une partie des forces américaines stationnées en Europe se livrent à un exercice de grande ampleur sur le territoire français, depuis ce jeudi 9 juillet, et jusqu’au 24 juillet. Une manœuvre comme rarement les Américains en avaient organisées depuis le retour de la France au sein du commandement militaire de l’Otan.
L’opération baptisée « Mousquetaire » a fait l’objet d’une étroite préparation entre le Commandement américain en Europe et plusieurs ministères, dont celui de la Défense et celui des Affaires étrangères. Pour cette exercice, des centaines de soldats américains vont être déployés sur les routes de France et sillonner le pays, depuis la Rochelle (Charente-Maritime) jusqu’à Forbach (Moselle), avant de se rendre en Allemagne. Destination la Pologne, où les militaires sont attendus dès le mois prochain.
En appui des troupes envoyées au sol, une soixantaine d’appareils survoleront le sol français avec l’accord des autorités françaises. Les Chinook, les Apache and les UH-60 Black Hawk de l’US Army vont crever les nuages d’Aquitaine pendant quelques jours. Pas d’inquiétude, rassure l’Etat-major américain dans un communiqué en date du 10 juillet, les hélicoptères ne parcoureront le ciel qu’entre « six heures du matin et six heures du soir ». Cela dit, « les résidents de la Rochelle et des communautés voisines pourraient voir apparaître une large formation d’hélicoptères à ces dates ».
« S’OPPOSER À TOUTE ACTION HOSTILE »
Les premiers convois ont débarqué le mardi 7 juillet à bord du porte-conteneur américain « Endurance » dans le port de la Rochelle. Au long de la manœuvre, ils seront escortés par la gendarmerie française qui a déployé les grands moyens, comme l’affirme une note de la gendarmerie consultée par Marianne, pour « s’opposer à toute action hostile contre les convois », dont trois sont « indiqués comme sensibles ».
A travers cette opération, les Américains et leurs alliés Français veulent démontrer leur capacité à intervenir en cas de conflit en Europe. « Ces exercices n’ont rien de belliqueux », assure Guillaume Lasconjarias, chercheur associé à l’IFRI. « Ils visent simplement à réassurer la présence militaire américaine auprès de leurs alliés européens. Dans le vocabulaire militaire, c’est ce que l’on appelle un « Roll-on roll-off« , une manœuvre visant à débarquer des moyens lourds en un temps limité ».
DÉFI À LA RUSSIE
« En règle générale, ce genre d’exercice sert à vérifier que le matériel a les bons gabarits et passe bien sous les ponts, les Américains veulent s’assurer que les ports sont adaptés au transport de leurs troupes », développe un officier de Saint-Cyr, « mais les objectifs stratégiques de ces exercices, en revanche, sont rarement évoqués en termes clairs ». Pour cet officier, cette opération servirait « à montrer que nous sommes capables d’apporter des renforts sur le front oriental de l’Europe en cas de conflit face à un ennemi qui ne dit pas son nom. Autrement dit, les Russes ».
Le ministère de la Défense se défend d’une telle ambition. Dans un communiqué, il invoque un simple « exercice logistique »destiné à « éprouver les dispositifs de coordination et de mobilité militaires entre pays européens ». Le ministère rappelle que les soldats américains stationnés en Europe effectuent tous les neufs mois des rotations dans les pays alliés. La France ne fait que prendre sa part à cette « relève » en vertu d’un « accord bilatéral » passé avec les Etats-Unis, nous affirme le ministère.
« L’opération « Mousquetaire » s’inclut dans une stratégie plus vaste, lancée par l’administration de Barack Obama en 2017 sous le nom d’Atlantic Resolve », développe Jean-Pierre Maulny, directeur adjoint de l’Institut de Relations internationales et stratégiques (IRIS). L’Etat-major américain présente ce programme comme une manière « d’accentuer la dissuasion à l’égard de la Russie, de renforcer l’Otan, de rassurer les alliés, améliorer la flexibilité stratégique des États-Unis et du commandement opérationnel de l’armée américaine en Europe, tout en prenant soin de nos soldats et de leurs familles ».
Selon des informations révélées par le Wall Street Journal le 5 juin dernier, Donald Trump aurait exprimé son souhait de réduire de 9.500 le nombre de soldats américains en Allemagne. Si les soldats du 101e bataillon débarquent bien en France cette semaine, il semble que les Américains n’aient pas l’intention de développer leurs forces en Europe. De quoi se détendre, peut-être, quand les hélicoptères survoleront votre maison…
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