Rassurer les détenteurs d’un patrimoine financier et tenter de gagner en crédibilité sur le plan économique, pour attirer à elle l’électorat de droite conservatrice encore resté chez Les Républicains. Les objectifs de la tribune de Marine Le Pen publiée lundi dans le quotidien « L’Opinion » sont clairs.
Dans un texte assez technique, écrit par des économistes et des patrons qui souhaitent garder l’anonymat – selon sa garde rapprochée -, la présidente du Rassemblement national défend une position relativement classique, assise sur des motivations présentées comme de bon sens.
Pour preuve, la perdante de l’élection présidentielle de 2017 cite même un dicton populaire : « Qui paie ses dettes s’enrichit ». « Une dette doit être remboursée », insiste Marine Le Pen, estimant qu’il s’agit « d’un aspect moral essentiel ». Un Etat faisant appel à l’épargne publique doit « s’organiser pour rembourser sa dette contre vents et marées ». Pas de chaos économique à redouter si elle est élue en 2022, sous-entend-elle : « La signature France sera préservée et confortée ».
En quête d’une boussole
La présidente du RN qualifie son approche sur la dette de « pragmatique ». Certains y verront toutefois une dose d’opportunisme, pour un mouvement qui épouse à chaque fois l’époque sur le plan économique. Du Reaganisme de Jean-Marie Le Pen au Frexit prôné par Florian Philippot, l’extrême-droite manque d’une boussole économique. « Nous sommes dans une logique d’un parti de gouvernement, de présidentiable, et cela correspond à notre maturité politique aujourd’hui », plaide Philippe Olivier, député européen RN et proche de Marine Le Pen.
« Un homme ou une femme d’Etat ne peut de toute façon pas laisser planer le moindre doute sur le fait que la France honorera ses engagements », fait valoir un autre proche de la présidente. D’autres au RN vont plus loin et prônent une sorte de réconciliation entre l’entreprise et le peuple, quitte à abandonner le populisme. « Si Marine Le Pen veut avoir une chance de gagner en 2022, il faut arrêter de diaboliser les milieux économiques et ceux qui ont un peu d’épargne », dit un de ses conseillers.
Séduire les retraités
La présidente du Rassemblement national a en tout cas retenu la leçon de son échec de 2017 : l’annulation de la dette publique détenue par la BCE ne sera pas son boulet en 2022, comme l’avait été la sortie de l’euro il y a quatre ans. Selon un récent sondage Harris Interactive, Marine Le Pen reste forte chez les jeunes puisqu’un tiers des 18-34 ans voteraient aujourd’hui pour elle au premier tour de la présidentielle.
Mais c’est tout autre chose chez les retraités, qui sont aussi ceux ayant le patrimoine le plus élevé et sont donc les moins enthousiastes vis-à-vis des aventures économiques. Seuls 18 % des plus de 65 ans lui donneraient leur voix. Le problème pour Marine Le Pen, c’est que cette classe d’âge vote en masse, contrairement aux jeunes.
Séduire les seniors et les rassurer sera vital. D’où cette modération sur le plan économique. Quitte à ce que les conceptions de Marine Le Pen sur la dette publique ressemblent à celles d’un Bruno Le Maire ou d’un Emmanuel Macron. Qu’il s’agisse de la nécessité de « mettre la France sur un chemin de croissance » et de lancer « des investissements de long terme », ou encore de l’urgence de « renforcer massivement les fonds propres des entreprises », la tribune multiplie les points communs avec les éléments de langage… de l’exécutif.
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