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Dans son premier essai, Le Coût de la virilité (éd. Anne Carrière, mars 2021), Lucile Peytavin, historienne et membre du Laboratoire de l’égalité, a calculé que nous économiserions chaque année plus de 95 milliards d’euros si « le mythe de la virilité » n’était pas aussi hégémonique dans la société française. Voici 5 autres chiffres clés à retenir de cette étude.
C’est une (triste) réalité bien connue : en France, les hommes sont responsables de l’écrasante majorité des comportements dits « asociaux ». Ils représentent 83 % des 2 millions d’auteurs d’infractions pénales et 90 % des personnes condamnées par la justice, 99 % des auteurs de viols, 95 % des mis en cause pour vols violents…
Plutôt que de céder à la pente « essentialisante », trop souvent mobilisée pour justifier ces données, l’historienne et spécialiste du travail Lucile Peytavin a choisi d’effectuer un pas de côté en s’interrogeant sur le rôle joué par ce qu’elle nomme le « mythe de la virilité » dans cette surreprésentation masculine. Son premier essai, Le coût de la virilité (Anne Carrière, mars 2021), met ainsi directement en cause le poids persistant de ce totem « érigé en idéologie culturelle dominante » que l’historienne considère comme entièrement responsable des comportements « asociaux » masculins.
Plus original, Lucile Peytavin élabore également un indice économique inédit permettant d’évaluer « le différentiel qui existe entre le montant des dépenses liées aux comportements asociaux imputables aux hommes et celui des dépenses imputables aux femmes ». Pour parvenir à un résultat fiable, l’historienne a mesuré les dépenses publiques allouées à la prévention, à la condamnation et à la compensation des diverses formes de violence masculine, en s’appuyant sur les données les plus récentes. Un calcul étoffé par le recours à l’indice de « valeur de la vie statistique » (dit « indice VVS »), défini dans le rapport Quinet de 2013 et basé sur les travaux de l’OCDE, qui permet d’estimer avec beaucoup plus de précision le coût pour la société d’un évènement dramatique à la gravité a priori non quantifiable.
N’aurions-nous pas intérêt à débattre, collectivement, de la pertinence de certaines valeurs véhiculées par la masculinité virile ?
Lucile Peytavin a également ajusté ses calculs selon que les domaines étudiés comptaient autant d’hommes que de femmes, ou non. Prenons un exemple simple, celui de la conduite d’une voiture : les hommes sont plus nombreux que les femmes à prendre le volant, en conséquence le coût de la virilité devient alors « le différentiel qui existe entre le montant des dépenses liées aux accidents de voitures imputables aux hommes et celui des dépenses imputables aux femmes si celles ci étaient aussi nombreuses à pratiquer l’activité en question ».
Cette méthodologie complexe aboutit à un bilan accablant, décliné ici en 5 chiffres clés qui nous forcent à nous interroger : n’aurions-nous pas intérêt à débattre, collectivement, de la pertinence de certaines valeurs véhiculées par la masculinité virile ?
« Pour obtenir ce résultat, je me réfère (…) aux données publiques de la police en 2019, qui ne comptabilisent que les personnes ayant porté plainte, et je considère que le coût d’une victime de viol correspond à celui d’un blessé grave multiplié par 2, selon la méthodologie VVS. Concernant le coût des délits sexuels, je prends comme montant le coût associé à un blesser léger multiplié par 2. »
« Je me base sur le coût annuel de l’Aide sociale à l’enfance auquel s’ajoute le coût des séquelles psychologiques sur les enfants (…) Je prends comme hypothèse conservatrice que seulement 1 enfant sur 10 aura des séquelles à vie qui pèseront sur son insertion scolaire, sociale, dans le monde du travail, et sur la violence qu’il exercera potentiellement sur les autres, considérant qu’il s’agit d’une vie « à moitié perdue » qui vaut 1 620 500 euros (VVS divisé par 2). »
« Ce coût se décompose en coûts directs (médicaux, police, etc.) et en frais indirects correspondants à la perte de rémunération et de temps pour les victimes et les auteurs, et aux pertes de production liées aux arrêts de travail, à l’absentéisme, et enfin en perte en capital humain liées aux décès. »
« Je me base sur les données à ma disposition concernant les homicides et tentatives d’homicides (…) et je retiens comme hypothèse que la moitié des victimes des tentatives d’homicides correspondent à des blessés graves. L’autre moitié sera considérée comme des blessés légers. »
« Je me base ici sur les données de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies qui a évalué le « coût social » du trafic de drogues illicites. »
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