Les médecins des urgences et du Samu de l’hôpital de Tarbes estiment aujourd’hui ne plus avoir les moyens d’exercer leur travail correctement, faute d’effectifs suffisants. Ils menacent de démissionner si des engagements ne sont pas pris par la direction de l’hôpital.
Ils sont tiraillés entre leur mission de service public et leur épuisement. Mais déterminés aussi à se faire entendre. 32 des 34 médecins des urgences et du Samu de l’hôpital de Tarbes menacent aujourd’hui de démissionner en bloc s’ils n’obtiennent pas des moyens supplémentaires.
Une activité accrue des urgences
« La situation sanitaire est complexe dans les Hautes-Pyrénées » explique Stéphane Lère, chef du pôle des urgences de l’hôpital de Tarbes et directeur médical du Samu des Hautes-Pyrénées. « Comme dans beaucoup de départements ruraux, le manque de médecins généralistes se traduit par une activité accrue des urgences. Il y a aussi une suractivité des urgences avec la crise du Covid et un manque de personnel. Il y a un épuisement des équipes. »
Sans compter la fermeture des urgences de la polyclinique de l’Ormeau, décidée cet été et prolongée en septembre, qui se traduit « par 30 à 40 passages supplémentaires par jour aux urgences de l’hôpital« .
Aujourd’hui, nous n’avons plus les moyens d’assumer toutes nos missions. On les assume, mais mal.
Manque d’effectifs
Les médecins ont fait les comptes. Il manque aujourd’hui 8 postes de médecins urgentistes à l’hôpital. Cette absence est en grande partie due à la conjoncture : il n’y a pas de candidats pour ces postes. Mais elle est aggravée par le manque de personnel paramédical et le manque d’équipements techniques.
« Comme partout, l’activité des urgences et du 15 augmente de 5% par an mais à moyens humains constants », explique Stéphane Lère. « Nous avons besoin des recruter des auxiliaires de régulation médicale au Samu, des infirmiers, des aides-soignants et des manipulateurs radio aux urgences. Et on a besoin de matériel. Il faudrait par exemple un scanner supplémentaire. Il y en a un seul à l’hôpital de Tarbes, qui sert à la fois aux activités quotidiennes et aux urgences. »
Un ultimatum
Toutes ces requêtes, les médecins des urgences et du Samu les ont mises par écrit. Dans un courrier adressé le 2 septembre 2021 au directeur de l’hôpital, au directeur de l’Agence Régionale de Santé (ARS), au préfet des Hautes-Pyrénées, au président du Conseil de l’ordre et au président de la Commission médicale du centre hospitalier, ils listent les effectifs et les moyens matériels supplémentaires indispensables pour assurer correctement leur mission. Et fixent un calendrier. Faute de réponse favorable de la part de leur direction, tous les chefs de service démissionneront le 4 octobre prochain. Ensuite, le 1er novembre, tous les médecins des urgences et du 15 démissionneront à leur tour ou demanderont leur mutation.
Beaucoup de praticiens sont en poste depuis des années. On est très attaché à cet hôpital et c’est très dur d’aller jusque là. C’est un crève-coeur pour nous mais actuellement, on n’a plus d’autre bras de levier, hélas, pour se faire entendre.
« C’est un mouvement apolitique, asyndical » souligne-t-il encore. « On tient à ce que nos demandes soient uniquement au bénéfice des patients du département. Mais faute de réponse, on ira jusqu’au bout, quitte à bloquer le système. Il n’y a pas de réponse malgré nos alertes depuis plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Ce n’est pas un caprice de notre part ».
Les médecins des urgences et du Samu attendent aujourd’hui un calendrier et des engagements clairs. Une première réunion avec la direction de l’hôpital a eu lieu la semaine dernière, sans résultat. Une autre est prévue le 29 septembre.
Sollicitée, la direction de l’hôpital n’a pour l’instant pas répondu aux demandes de France 3 Occitanie.
L’ARS « très consciente des difficultés »
De son côté, l’Agence Régionale de Santé se dit « très consciente du problème« . « Nous ne sommes qu’en copie du courrier adressé à la direction de l’hôpital mais on travaille avec elle depuis plusieurs mois pour voir comment on peut avancer sur l’organisation des urgences et ce qu’on peut proposer. Il y a beaucoup de problèmes avancés qui ne peuvent pas se résoudre du jour au lendemain : pour les sous-effectifs dans le médical, nous sommes limités par les ressources et c’est une situation nationale. Ensuite, il y aussi un principe de réalité, la tenue d’un budget. L’enveloppe globale allouée par l’ARS au centre hospitalier est en augmentation ces dernières années et il est demandé à la direction de l’hôpital un effort de rationalisation sur sa répartition« , explique Manon Mordelet, directrice par interim de l’ARS des Hautes-Pyrénées.
« On travaille depuis le mois d’avril sur les difficultés des urgences dans le département » poursuit Manon Mordelet, « le problème d’effectifs est lié à une conjoncture nationale, il y a une réelle dificulté à trouver des effectifs médicaux, c’est le cas partout en France et la crise du Covid a encore aggravé la situation ».
Nous sommes vraiment conscients des difficultés. De mois en mois, on travaille à trouver des solutions. C’est un travail qui prend du temps. L’ARS a déjà beaucoup travaillé avec la direction de l’hôpital et les médecins urgentistes. Des choses vont encore s’écrire.
Pour tenter de répondre « sur le fond« , l’ARS organise ce jeudi 23 septembre une conférence territoriale de santé à Tarbes. Cette table ronde réunira des élus locaux, les membres de droit du Conseil de santé, la préfecture, des représentants syndicaux et des urgentistes pour débattre de la situation des urgences sur tout le territoire « et trouver des perspectives« .
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