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ad_1] 2021-10-16 21:58:50 Source
Si le nombre de participants ne repart pas à la hausse, la nouvelle manifestation montpelliéraine contre le pass sanitaire et l’obligation vaccinale de ce samedi 16 octobre a pris une coloration originale, de par sa concomitance avec les appels de gilets jaunes à reprendre les ronds-points face à la hausse des produits de première nécessité.
Comme tous les samedis, le rendez-vous est fixé à 14h sur la place de la Comédie. Même prises de parole, même diversité des participants. En remontant vers la préfecture, on mesure l’ampleur du rassemblement : environ 2000 personnes ont répondu présentes cette semaine, légèrement moins que les semaines précédentes.
L’originalité de la semaine se trouve plutôt dans la tournure des évènements une fois le cortège arrivé devant la gare Saint-Roch, via le Peyrou et le boulevard du Jeu de Paume.
Depuis quelques jours, les réseaux sociaux bruissent d’une alléchante rumeur : suite à la nouvelle flambée des prix des produits de première nécessité ( l’essence notamment a dépassé le prix moyen affiché à la pompe autour de l’automne 2018 ), les gilets jaunes prépareraient leur retour sur le devant de la scène politique et sociale. Plusieurs appels à des journées d’action tournent, la première pour ce samedi 16 octobre, avec pour mot d’ordre la reprise des ronds-points. Sans que l’émulsion collective n’atteigne l’intensité de l’agitation numérique des semaines précédents le 17 novembre 2018, la mayonnaise prend. Tant et si bien que le hashtag “#GiletsJaunesSaison2” se retrouve en première tendance politique sur Twitter, et que les médias de nos chers amis bourgeois s’emparent un à un de la question, pris par la “peur d’un retour des gilets jaunes”. Si sur Montpellier même peu d’initiatives suivent directement ces appels, ils auront une influence non-négligeable sur le déroulé de cette nouvelle manifestation contre le pass sanitaire et l’obligation vaccinale.
Plutôt que de remonter comme à l’accoutumée la rue Maguelone vers la place de la Comédie, le rassemblement une fois face à la gare Saint-Roch s’engage sur l’avenue du pont de Lattes. Qu’est ce qui peut bien venir perturber l’éternelle attraction des anti-pass pour les rues de l’Ecusson ? Une idée circule depuis le début de la manif : rejoindre le rond-point des gilets jaunes du Près d’Arènes, encore occupé deux fois par semaine presque trois ans après le début du mouvement fluo. Si l’initiative est lancée par une poignée de bonnes volontés, elle ne rencontre pas de résistance dans la foule. Et c’est tout naturellement que celle-ci emboîte le pas aux quelques irréductibles du mouvement né en novembre 2018. Proches ou pas du polémique groupe de gilets jaunes officiellement constitué près du rond-point Près d’Arènes, tous les pourfendeurs des fins de mois difficiles semblent se réjouir de la tournure prise par les évènements. Les autres aussi d’ailleurs.
Une demi-heure plus tard et malgré quelques défections, se sont donc près d’un millier de manifestants qui déboulent sur le fameux rond-point. Belle lurette que les lieux n’avaient pas retrouvés leurs foules ! Après un sage tour de giratoire, et alors que les musiciens s’activent à rendre l’ambiance festive, plusieurs centaines d’entre eux entreprennent un blocage de la circulation. On se croirais revenus en des temps socialement inflammables, quand sur un air de “Mort aux vaches, mort aux condés” joué aux cuivres, d’autres acclament des gendarmes pour avoir fait un salut de la main en direction de la manif. La contestation brasse de nouveaux publics chaque mois dans la France macronienne.
Plus loin, sur la voie rapide qui file direction Palavas, les collègues de la gendarmerie mobile intimident, par une présence importante, pour que la fête ne dure pas trop. Non casqués et assez tranquille, quelques dizaines de membres de ces unités de maintien de l’ordre avancent vers le rond-point et la manif. Si bien que celle-ci décide d’elle-même de suspendre le blocage, et de retourner vers le centre-ville.
Talonnés par les cinq ou six camions de la gendarmerie mobile, les quelques centaines de présents apparaissent galvanisés par ces petites audaces, et par la mémoire des gilets jaunes. A tel point que le cortège se transforme en liesse populaire sur la route du retour. Le petit nombre qu’il reste fait plus de bruit que certaines des manifs de ces dernières semaines chiffrant à quelques milliers de participants. Voilà plusieurs semaines qu’on avait pas vu telle ambiance dans les rues de Montpellier un samedi après-midi ! Des vieux slogans de gilets jaunes viennent s’ajouter au très repris “on est là”. “Emmanuel Macron, oh tête de con, on vient te chercher chez toi” connaît un franc succès, contrairement au plus guerrier “gilets jaunes, quel est votre métier ?”, qui fait de son côté un joli flop.
Pareil enthousiasme ne laisse pas indifférent : sur l’itinéraire du cortège, les commerçants sortent de leurs boutiques, comme à l’approche d’une foule innombrable. On peut même surprendre quelques sourires rêveurs sur le visage de certains coiffeurs autour du boulevard de Strasbourg.
Longue pause musicale rue de Verdun, l’occasion d’extérioriser toute cette euphorie par des danses endiablées. Avant que ce qu’il reste du cortège ne rejoigne à nouveau la place de la Comédie, pour dispersion rapide.
On retiendra plusieurs choses de cette journée. Premièrement, les appels à reprendre les ronds-points et à manifester contre les hausses de prix des produits de première nécessité pour ce samedi 16 octobre n’ont évidemment pas soulevé les masses comme à l’automne 2018. Pour le moment. Car il est bon d’avoir en tête que les appels ne circulent que depuis quelques jours. Si l’équipe du Poing n’a pas encore de vue d’ensemble sur la journée à une échelle nationale, quelques milliers de personnes au bas mot on répondu à l’appel. Pas mal pour de l’impro totale, et peut-être l’occasion de construire plus grand à l’approche du troisième anniversaire des gilets jaunes. Deuxièmement, les anti-pass de Montpellier ont très spontanément répondu à cette injonction giletjaunesque, jusqu’à en reprendre les slogans avec enthousiasme. N’en déplaise aux convaincus du caractère libéral, voir fascisant du mouvement, les anti-pass recrutent dans cette masse de soutiens des gilets jaunes, et une alliance plus ou moins lâche avec les pourfendeurs des inégalités sociales ne paraissait pas du tout aberrante cette après-midi à Montpellier.
S’apprête-t-on à revivre un mouvement des gilets jaunes bis ? Une assemblée de lutte était appelée ce soir à Grabels par les gilets jaunes de Près d’Arènes. Et les discussions vont bon train entre gilets jaunes de la région entière pour organiser des efforts de coordination. Mais si mouvement populaire il y a dans les semaines et les mois à venir, il y a fort à parier qu’il ne se choisisse pas le gilet comme symbole. Et c’est tant mieux : le pouvoir patine face à la nouveauté, à ce qui le surprend. Néanmoins, les frémissements de ces derniers jours, et la réaction des anti pass montpelliérains notamment, montrent que le mouvement des gilets jaunes a profondément marqué le peuple français. Que ses pratiques, ses réseaux de symbole, et l’influence des groupes constitués ou informels qui y ont acquis une précieuse expérience de la lutte sociale auront leur rôle à jouer dans la suite des évènements.
L’époque est faite ainsi : un bouillonnement contestataire larvé quasi-permanent, malgré sa mise sous cloche pendant les premiers confinements, aux contours parfois flous, confus et ambigües certes, mais qui a une indéniable capacité à surprendre. Et qui connaît des phases moins larvées que d’autres..
Alors, quid de l’hiver 2021 ? La colère est là, les actions d’agriculteurs et sur les ronds-points en métropole contre la hausse des prix font flipper nos gouvernants, et la situation en Martinique devient relativement explosive. Révolte ou dépression pré-électorale ? C’est en luttant qu’on aura nos réponses.
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