Communiqué du Comité de soutien aux inculpés du 23 septembre

Le Parquet en PLS

Les inculpés en partie relaxés

Le procès de nos camarades antifascistes inculpés s’est donc déroulé le jeudi 4 novembre. Débuté à 14h et après 7h d’audience et deux heures de délibéré, le rendu de jugement a eu lieu : relaxe pour les sept sur le groupement en vue de commettre des violences volontaires contre les personnes ou de destructions ou dégradations de biens  (aucun élément concret ne venant étayer la caractérisation de ce délit, créé pour pouvoir arrêter le moindre manifestant); relaxe pour trois d’entre eux sur les violences ; 300 euros euros d’amendes pour quatre d’entre eux pour des faits de violences (requalifiés sans circonstance aggravante de réunion) ; et un mois de prison avec sursis pour deux des condamnés, pour refus d’ADN pour l’un et refus de donner les codes de déchiffrement du téléphone portable pour l’autre. Nos trois camarades incarcérés depuis six semaines sont donc libres.

Ce n’était pourtant pas gagné d’avance.

Le Parquet, à l’œuvre depuis le début dans cette histoire, a placé la barre très haut lors de ses réquisitions : de deux mois de prison avec sursis au minimum jusqu’à deux ans de prison (dont un avec sursis) et trois ans d’interdiction de manifester à Lyon !

C’était sans compter sur le démontage en règle, par la défense, d’un dossier policier monté de toutes pièces et truffé d’erreurs de procédure et de points d’interrogation.

Trois demandes de nullité ont été faites par les avocats de la défense :

  • L’exploitation injustifiée des fadettes (factures détaillées des communications téléphoniques courantes permettant la géolocalisation) de septembre, plusieurs semaines après les faits, portant atteinte à la liberté et au respect de la vie privée.
  • Les perquisitions : ces dernières ont eu lieu alors que ne figuraient pas dans le dossier transmis à la défense les requêtes censées être faites au JLD (Juge des libertés et de la détention).
  • La réquisition puis l’exploitation de la vidéo de « vidéoprotection » par la police, qui n’a avisé le Ministère public que quatre jours après avoir fait la demande de visionnage de cette vidéo, alors qu’elle est censée l’en informer sans délai.

Sur ces trois demandes de nullités de procédure, deux ont été retenues par la Juge : la réquisition de la « vidéoprotection » et la géolocalisation des prévenus, invalidant ainsi la plupart des procès-verbaux de garde-à-vue et une grande partie des éléments « à charge » contre les inculpés.

Car la police et le parquet ont tout fait pour orienter les événements du 28 août lors de la manifestation contre le passe sanitaire dans un seul sens : des militants antifascistes agressant des pauvres victimes sans défense du parti d’extrême-droite Civitas. Pour preuve par exemple, seule une partie de la vidéo de la ville a été utilisée dans la procédure, omettant le début de l’altercation, où l’on voit pourtant bien les militants de Civitas frapper les premiers. Or, les policiers ont écrit noir sur blanc qu’aucune violence n’a été commise par Civitas. Propos contredits par une vidéo enregistrée par la défense, publiée sur Twitter le jour des faits. La police a donc sciemment menti pour charger le dossier.

Le procureur, lui, a tenté de justifier l’existence de poursuites en l’absence de victime identifiée, en citant l’exemple des violences intrafamiliales pour affirmer que le Ministère public n’attend pas de plainte pour se saisir d’atteintes aux personnes, exemple particulièrement choquant pour les victimes de violences sexistes et sexuelles qui tentent le recours à la voie judiciaire, au vu du nombre de plaintes non-enregistrées, minimisées ou non transmises par la police, ou classées sans suite par le Parquet[1]. Dans cette affaire, la police a tout bonnement décidé de protéger les militants de Civitas, qu’elle a contactés et rencontrés, sans divulguer leur identité et sans donner de détails sur leur conversation. Comble de la nullité toujours côté policier : la partie de la vidéo sur laquelle ils se sont basés pour inculper nos camarades n’a pas fonctionné au Tribunal. Seules les photos choisies par eux-mêmes ont été utilisées par la Juge pour interroger les inculpés.

Enfin, autre élément profondément troublant  : le service policier qui s’est chargé de l’enquête est celui de la BREC (Brigade de répression du cambriolage). Pourquoi un service spécialisé sur les enquêtes liées à des cambriolages a été chargé d’enquêter sur des faits produits lors d’une manifestation politique ? Existe-t-il des liens entre les policiers en charge de l’enquête et les militants de Civitas ? Pour l’heure, impossible de le savoir, mais le doute existe.

Quant à la Juge, son attitude lors des interrogatoires des inculpés a été une nouvelle fois révélatrice d’une justice de classe et profondément raciste. En effet, elle n’a pas du tout eu le même comportement en fonction des inculpés, montrant beaucoup plus d’agressivité et de mépris envers certains d’entre eux, en fonction de leurs statuts sociaux ou de leurs origines supposées.

Pour finir sur le procès, la défense, au-delà d’avoir porté de sérieux coups à la procédure, a mené une véritable bataille politique lors de ses plaidoiries. L’attitude du deux poids deux mesures du Parquet de Lyon a ainsi été fortement mise à mal. Les exemples d’attaques, souvent très violentes, des militants d’extrême-droite ces dernières années sont nombreux[2], souvent documentés, et parfois filmés (avec reconnaissance des faits par des militants d’extrême-droite eux-mêmes).

Pour certaines d’entre elles, on en sait un peu plus sur l’attitude des policiers et du Parquet : le saccage du bar La Pinte Douce en décembre 2019, pourtant revendiqué par les nervis fascistes, a été classé sans suite par le Parquet pour « infractions insuffisamment caractérisées » ; l’attaque de la librairie La Plume noire dans les pentes de la Croix-Rousse en mars 2021 a été classée sans suite par le Parquet pour « recherches infructueuses », alors que l’action a été filmée et diffusée sur internet par les militants néo-fascistes eux-mêmes, et que des militants d’extrême droite ont été clairement identifiés sur les vidéos par les plaignants ; quant aux violences devant la même librairie contre deux bénévoles d’une association ayant organisé une collecte de jouets, entraînant plusieurs jours d’ITT (incapacité temporaire de travail) pour les victimes, la plainte qui a suivi n’a même pas été transmise au Parquet par la police[3].

Le Procureur, au cours de sa réquisition pour le procès du 4 novembre, a fait éclater la salle d’un rire jaune en déclarant que la loi lutte pied à pied contre le racisme, l’antisémitisme et l’homophobie. Et pour cause, les faits sont là : la police et le Parquet sont du côté de l’extrême-droite à Lyon. En s’attaquant à nos camarades antifascistes, en les plaçant en détention provisoire pendant six semaines sur la base d’un dossier monté de toutes pièces, ils prouvent -une fois n’est pas coutume- que nous avons à faire à des ennemis du mouvement social et révolutionnaire.

Notre joie d’avoir vu nos trois camarades antifascistes libérés et les sept inculpés en grande partie relaxés est immense. Triple victoire à nos yeux : solidaire d’abord, par le grand nombre de personnes mobilisées durant ces six semaines et le jour du procès, médiatique ensuite, de par le nombre et la diversité des signataires de la tribune ; locale enfin, même si nous n’oublierons pas ce qui vient de se passer. Nous savons que nous sommes dans un contexte de droitisation globale de la société française, de l’appareil d’État, et de ré-émergence de groupes tous plus fascistes les uns que les autres[4] (en particulier à Lyon), dont les monopoles capitalistes et leurs médias sont en grande partie responsable.

Nous comptons bien ne pas les laisser faire.

Un grand merci aux avocat.es de la défense, aux signataires de la tribune, à toutes les personnes qui se sont mobilisées pendant ces six longues semaines, aux cantines, au rappeur.euses et aux barbes-à-papa venues égayer le rassemblement devant le tribunal toute cette journée du 4 novembre.

Pas de quartier pour les fascistes

L’antifascisme n’est pas un crime 

Face à la répression, la solidarité est notre arme

 Contacts :

Mail : comitesoutien2309@riseup.net
Facebook : Comité de soutien aux inculpés du 23.09
Instagram : comité_soutien_2309 

Le Comité de soutien aux inculpés du 23 septembre 2021 – Lyon

[1]. Un rapport publié en 2019 par l’Inspection générale de la justice elle-même mentionne par exemple que sur 88 féminicides conjugaux, 82% des mains-courantes et procès-verbaux de renseignement judiciaire n’avaient conduit à aucune investigation et 80% des plaintes déposées par les victimes avaient été classées sans suite : http://www.senat.fr/rap/r19-597/r19-5975.html

[2]. Pour des exemples détaillés, voir la tribune politique publiée sur Mediapart le 25 octobre 2021 :

https://blogs.mediapart.fr/les-invites-de-mediapart/blog/301021/lyon-une-politique-penale-du-deux-poids-deux-mesures

[3]. Pour plus d’informations, lire le communiqué de l’UCL – Lyon :

https://rebellyon.info/Impunite-totale-pour-les-fachos-23484

[4]. Pour des éléments plus détaillés, voir notre communiqué précédent :

https://rebellyon.info/Appel-a-un-rassemblement-de-soutien-le-4-23474

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