Les deux font la paire « Pour que tout reste comme avant, il faut que tout change. »

Daniel Adam-Salamon

Activiste libertaire des droits de l’Homme

« Pour que tout reste comme avant, il faut que tout change. »

Tancrède dans Le Guépard de Lampedusa

Le clivage peste/choléra est une fiction. Les deux factions spectaculaires sont à la botte des marchés, et ne se distinguent que par les ambitions rivales de leurs représentants. En raison du rôle grotesquement démesuré de la dette, du crédit et des produits spéculatifs dans le processus d’accumulation mondialisée du capital, l’auguste jupitérien comme la  bourgeoise brune de cette sinistre farce ont tout à donner aux créanciers et tout à prendre à leurs électeurs. Leur travail à tous deux consiste à renforcer l’emprise idéologique et matérielle d’un système économique dédié à l’extension indéfinie de la valeur d’échange, et qui s’est donné pour mission de dépouiller les activités humaines de toute valeur.

Depuis la Commune de 1871, aucun gouvernement n’a aboli la fracture « sociale et politique » qui continue à opposer profondément les deux France.  Dans cette pensée analytique et binaire, le champ politique est vu comme un lieu d’affrontements ou d’alliances entre des forces prises 2 à 2 : la gauche contre la droite, le Front de Gauche contre le PS, le PC contre ou avec le PG. Dans le champ social, c’est la « guerre individuelle » des possédants contre les gueux, des CDI contre des chômeurs, des CDD et des intermittents contre les bénéficiaires du RSA, de la ville contre sa périphérie, etc .

En promouvant la guerre de chacun contre tous, le capitalisme [[1]]  impose au monde entier sa pseudo-logique sacrificielle, son accablante vacuité et une misère tous azimuts. Il ne paie qu’en monnaie de singe les malheureux qu’il emploie à ses basses œuvres. Il ne prospère que sur une détresse profonde que seule enchante, chez les plus favorisés, une consommation effrénée de barbituriques et d’autres adjuvants. Les thuriféraires du monde merveilleux du Spectacle peuvent toujours chanter les joies crétinisantes et démocratiques qui nous sont infusées, si certaines existences prolifèrent abstraitement au CAC 40, au final, toutes débouchent concrètement dans l’égout terminal qui nous environne.

L’univers médiatique est une des facettes du Spectacle. Il ne s’agit pas de ce spectacle où l’on paie pour se vider la tête des embarras de la vie. Bien au contraire, il est de ce Spectacle dont l’objet politique est d’organiser insidieusement la passivité contemplative des individus, de désamorcer leurs tendances spontanées et d’inhiber en chacun tout désir d’une vie authentiquement communautaire.

Les exigences de l’économie barbouillée aux couleurs du capitalisme ne sont pas des valeurs transcendantes. Loin de répondre à une impitoyable fatalité, elles sont simplement historiques : elles ne sont pas plus anciennes que le capitalisme lui-même. Il y a eu d’autres façons d’exister, et il y en aura d’autres, pour peu que l’autodestruction programmée laisse un peu de temps au temps

Prioritairement, il importe de se débarrasser de l’idée frelatée selon laquelle nous vivrions politiquement en démocratie, soit dans un type d’organisation assurant dans les faits la souveraineté populaire. Nulle part les gens de peu et les gens de bien n’ont réellement accès aux centres de décision. La démocratie est un vain mot. C’est là une farce insoutenable dont nulle personne sensée ne devrait se satisfaire.

On ne peut ignorer que la plupart des mouvements sociaux du siècle passé n’ont pas été des luttes d’émancipation menées contre le capitalisme, comme a pu l’être la Commune de Paris, mais des luttes pour une intégration plus complète au capitalisme. Tout ce que qui était envisagé et désiré, c’est un travail effectué dans des conditions décentes et rémunéré à sa juste valeur, afin d’accéder à un niveau de vie bourgeois et à la propriété. Rien d’autre. D’une certaine façon, on peut dire que le bourgeois a été tout ce temps, non pas l’ennemi de classe, mais le clair de lune du prolétaire.

« Il y a des esclaves sans Maître, dont l’esclavage est tel qu’ils ont perdu tout maître, tout rapport avec le maître, tout espoir donc d’affranchissement, comme toute possibilité de révolte ». Maurice Blanchot, L’entretien Infini.

La situation est telle qu’il paraît assez vain de la soumettre à une sorte de débat d’idées. Ce n’est pas parce que ce monde n’est pas très joli-joli, ce n’est pas parce qu’il ne correspond pas à nos aspirations idéales, c’est parce que ce monde mène l’humanité à la mort qu’on ne peut que s’opposer radicalement à lui en totalité et sous toutes ses formes particulières.

Partout les esclaves gouvernementaux qui s’agitent sur le devant de la scène électorale récitent le discours des vrais maîtres qui jouent en coulisses avec nos vies : balayons la scène et ses coulissesdans la rue et sur les ronds-points.

24 avril 2022 – Mallefougasse-Augès

[1]      Le capitalisme désigne l’ensemble des comportements, activités, rapports sociaux, etc. qui s’inscrivent dans une perspective d’accumulation d’un capital au profit d’une minorité. C’est également un «  système  », reposant sur une structure idéologique capable de digérer politiquement tous les mouvements qui menacent sa survie, tout en se transformant continuellement.

Ce champ est nécessaire.

1 Comment

  1. Wow…belle synthèse d’un système à bout de souffle j’espère, mais tout juste à la dérive, si l’on entends qu’il nous formate de A à Z, et nous fait croire que la colapsologie est la limite du supportable, ou de l’intelligible…

    Entre les manipulations du climat et celle de nos cervelles, tout serait joué, organisé et structuré pour nous maintenir dans une vision apeurée et soumise, et surtout nous rendre incapables de prendre conscience que je, que nous pouvons sortir la tête du sable, qu’il soit dogmatique, mathématique ou culturel, avec de jolies couleurs!

    Il reste néanmoins le fait indubitable, que cette « crise politico-sanitaire » ne s’est pas déroulée comme prévue, que l’hécatombe ne s’est pas produite comme escomptée…, et que la « motrice-merdeuse » a perdu trop de wagons pour que l’enculerie aille à son terme…

    Bref, l’élévation des consciences à prit un raccourci qui ne fût pas prévu par les coquins, les bergers et leurs serviteurs, Castors ou Moutons. Il est temps maintenant de s’éveiller un peu plus, dans l’amour, le lien et l’acceptation de « notre divinité » !
    La matière peut être confortable, peut-être faudrait-il s’en affranchir.
    Certains diraient… la Lumière est notre salut.

    Pétard… ce n’est pas si simple.., d’un coup je pêche 🙄

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