Selon la dernière édition du «portrait social» de la France de l’Insee, la baisse de l’impôt sur le revenu, la disparition de la taxe d’habitation et les mesures anticrise ont fait gagner 420 euros aux ménages les mieux lotis, contre 130 euros pour les moins riches. Avec pour résultat «un effet quasi neutre sur le taux de pauvreté».
Une hausse qui cache des inégalités. Les mesures sociales et fiscales prises en 2020 et 2021 par le gouvernement augmentent de 1,1 % le niveau de vie des personnes résidant en métropole par rapport à une situation où elles n’auraient pas été mises en œuvre. C’est ce qui ressort d’une étude de l’Insee publiée mardi dans la dernière édition du «portrait social» de la France. Selon l’institut, ces mesures ont aussi eu «un effet quasi neutre sur le taux de pauvreté», qui augmente de 0,1 %. Le gain moyen est de 280 euros par personne grâce à ces mesures, parmi lesquelles on peut citer la baisse de l’impôt sur le revenu, la disparition progressive de la taxe d’habitation, la revalorisation du minimum vieillesse, l’extension de la garantie jeunes, la majoration de l’allocation de rentrée scolaire ou encore l’indemnité inflation de la fin de l’année dernière. Ces 280 euros sont principalement liés aux réformes de 2020 (240 euros) et en moindre proportion à celles de 2021 (40 euros).
Mais ce gain moyen masque de fortes disparités, selon les ménages et leur niveau de vie. Ainsi, la moitié la plus aisée d’entre eux, a encaissé 420 euros en moyenne, contre 130 euros pour celle la moins aisée. Cette distorsion est particulièrement nette avec les mesures prises en 2021. «Les aides exceptionnelles de 2021 ne suffisent en effet pas à compenser la baisse mécanique de revenu disponible, induite par la non-reconduction des aides exceptionnelles de 2020», souligne encore l’Insee. Elle s’explique aussi par la nature même des mesures pérennes. Le dégrèvement de la taxe d’habitation concernait par exemple l’an dernier l’ensemble des contribuables et plus seulement les moins aisés, et la baisse d’impôt sur le revenu votée dans le projet de budget 2020, notamment pour la première tranche du barème, n’a logiquement de conséquence que sur la moitié de la population imposable.
Au bénéfice des classes moyennes selon Bercy
En regardant plus en détail les montants de gain annuel pour chaque décile (quand on partage la population en dix groupes d’effectifs égaux selon le niveau de vie, le premier décile désignant la population aux revenus les plus bas), les mesures sociofiscales de ces deux années ont entraîné «un gain moyen de niveau de vie quasi stable jusqu’au troisième décile puis croît jusqu’au huitième décile», mesure l’Insee. Ce gain atteint «490 euros pour les personnes situées entre le septième et le huitième décile» avant de «diminuer légèrement». En euros comme en pourcentage du niveau de vie, ce sont ces personnes entre le septième et le huitième décile, celles dont le niveau de vie moyen est de 2 552 euros par mois, qui sont les grandes gagnantes des mesures gouvernementales. Quant au dernier décile, soit les individus dont le niveau de vie est supérieur à 5 119 euros par mois, ils ont gagné 430 euros en niveau de vie par an en moyenne. Ceux du premier décile (moins de 833 euros par mois) n’ont gagné, eux, que 110 euros…
Si Bercy se garde bien de remettre en cause ce travail statistique de l’Insee, le cabinet de Bruno Le Maire, ministre de l’Economie et des Finances, a néanmoins rappelé que l’on est considéré comme «aisé à partir de 2 000 euros par mois de niveau de vie» et que derrière ceux qu’on appelle «aisés», il y a aussi les «classes moyennes» : «Ce n’est pas parce qu’on aide les gens qui travaillent qu’on n’aide pas ceux en difficulté. On ne peut pas dire que nous n’avons pas aidé massivement l’ensemble des Français.»
1er juin 2022abonnés
En tout cas, l’étiquette de président des riches, qui a collé à Emmanuel Macron pendant tout un premier quinquennat commencé par la suppression de l’impôt sur la fortune et la réforme de la fiscalité du capital, n’a pas disparu. Cette étude de l’Insee s’inscrit dans la suite des précédentes réalisées par l’Institut des politiques publiques (IPP). L’an dernier à la même époque, l’IPP calculait que les mesures prises pendant le quinquennat, hors période de pandémie, avaient amélioré de 1,59 % le niveau de la vie de toute la population, avec un effet très net sur les plus aisés. A l’inverse, elles avaient fait baisser celui des 5 % les plus défavorisés.
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