Depuis plusieurs semaines nous assistons à une succession de prises de positions catastrophiques de la part de cadres de la France insoumise.
Toutes plus abjectes les unes que les autres, ces déclarations choquent dans les rangs du partis, au sein de ses sympathisant·es, mais également chez les personnes qui, sans être en opposition franche, n’attendaient pourtant rien de LFI.
Seule la jeunesse insoumise a clairement fait savoir sa dissidence, notamment au travers du Discord Insoumis et de plusieurs collectifs locaux.
Que nous ayons fait le choix de voter ou non à l’occasion des dernières échéances électorales, le spectacle qui s’offre à nous n’en est pas moins désolant.
Au-delà même du débat portant sur la question de la démission ou non d’Adrien Quatennens, le déferlement de violence misogyne qui émane d’une certaine frange du parti témoigne bel et bien du fait que l’organisation n’est pas à la hauteur de ses ambitions.
Certains, notamment au sein de la vieille garde du parti, ne semblent pas conscients de ce que représentent les lignes qui sont écrites au sein de leur propre programme. LFI s’est voulue anticapitaliste mais également féministe. Peut-elle encore y prétendre ?
A l’heure actuelle, la réponse est évidement catégorique : non. De l’extérieur comme de l’intérieur cela fait des années que de nombreuses personnes alertent sur la verticalité de l’organisation partisane.
Les militant·es de la base, qui portent le mouvement dans l’ensemble de la France (et pas qu’à Paris) n’ont toujours eu qu’un pouvoir décisionnaire dérisoire. L’ensemble des décisions se prenaient et se prennent toujours au sein d’un cercle très restreint d’individus qui évoluent dans les sphères parisiennes.
Nombreu·x·ses s’en sont accommodé·es tant que les choix qui étaient faits allaient dans le sens du programme du mouvement. Face aux déclarations calamiteuses de Mélenchon&co nous entendions souvent : « Ce qui compte c’est le programme, pas Mélenchon ». Mais à l’heure où les décisions prises par ce petit bureau politique (majoritairement composé d’hommes) sont aux antipodes de la ligne défendue par ce fameux programme, cette position n’est plus tenable.
La direction de LFI a décidé de cracher au visage d’une très large partie de sa base militante, composée en grande partie de jeunes, qui ont donné de leur temps et de leur énergie car iels croyaient sincèrement aux idéaux portés par le programme du mouvement.
Aujourd’hui iels font face au mépris d’une classe politique vieillissante qui n’hésite pas à les mépriser et à faire preuve d’une misogynie grasse à leur égard, digne de celle que l’on retrouve habituellement sur les plateaux de CNEWS et BFM.
La gestion du cas Quatennens a mis en évidence la fracture qui existe au sein du parti. Une fracture générationnelle mais également une fracture entre les militant·es convaincu·es par le bien-fondé et la nécessité du programme, et les individus qui n’y voient là qu’une stratégie électorale.
Ces derniers jours plusieurs figures de l’organisation ont pris la parole pour dénoncer le manque de démocratie au sein de la formation politique. On ne peut que déplorer le fait qu’ils et elles aient attendu d’être à leur tour écarté·es de la direction pour se prononcer sur le sujet.
LFI est en plein naufrage, et c’est en grande partie à cause de l’attitude de ses cadres qui pensent avoir mieux compris que tout le monde et qui refusent de lâcher malgré les vives protestations de leur base. Ils s’accrochent au pouvoir et font passer la solidarité masculine et le copinage avant les intérêts et les valeurs de leur propre programme. Ils se sont montrés incapables de maintenir une ligne résolument féministe.
Comment est-il possible de faire confiance à des individus qui dès les aveux de Quatennens, se sont employés à minimiser la gravité des faits dont il s’est rendu coupable ?
Comment peut-on militer pour un mouvement au sein duquel siège une personne qui a eu l’audace de faire le tour de la presse en se présentant comme une victime et en se disant défenseur de la cause des femmes après avoir été condamné pour « violences sans incapacités commises par conjoint » et pour « envoi régulier et malveillant de messages » à son épouse ? Des faits de violences sexistes et sexuelles. Comment s’asseoir aux côtés d’individus qui sont allés jusqu’à accuser l’ex-conjointe de Quatennens, victime de violences, de mentir et de chercher à nuire à celui-ci ?
La direction de LFI échoue sur toute la ligne, quitte à se couper d’une importante partie de sa base militante, et ce, en dépis de tout bon sens.
En contradition totale avec les choix et les intérêts qu’elle défend à l’assemblée nationale, la direction du mouvement a pris la décision de défendre un coupable plutôt qu’une victime, et ce malgré des faits prouvés et une condamnation.
En l’état actuel il n’est donc plus apte à défendre les intérêts de ses membres en interne, à l’exception peut-être de ceux de ses cadres masculins (blancs).
Doit-on rappeler pour quelle raison Taha Bouhafs, lui, a été immédiatement exclu pour des faits vraisemblablement de la même nature, malgré l’absence de procès et de condamnations ?
A l’approche de la prochaine échéance électorale majeure, les voix habituelles viendront nous dire qu’il s’agit de la seule alternative viable. Et elles auront sans doute raison. Il n’empêche qu’être la seule alternative ne sera jamais suffisant pour espérer un succès électoral, car le système ne joue définitivement pas en notre faveur. Mais qui sait, peut-être certains se satisfont-ils de leur siège de députés pendant que dehors les vrais gens triment.
Mais au final, qu’y a-t-il de surprenant à ce qu’un parti jacobin et vertical échoue à défendre le programme qu’il s’est lui-même fixé ? Mélenchon est d’ailleurs lui aussi un pur produit du pseudo-socialisme partisan que nous récrions toutes et tous depuis des années. Une ligne véritablement féministe n’est pas compatible avec les carrières politiques de la majorité des hommes qui peuplent ces organisations partisanes.
En vérité, les mouvements électoralistes ne pourront jamais être des espaces véritablement féministes et horizontaux, d’où la nécessité de s’organiser à l’extérieur de ceux-ci, de construire des espaces de luttes à l’extérieur des espaces prévus à cet effet par le pouvoir (ce qui ne protège en rien des luttes de pouvoir internes et des attitudes masculinistes, racistes ou validistes mais nous permet d’y faire face plus facilement).
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