Ce gouvernement doit être chassé

Ce gouvernement doit être chassé, par Robert Duguet.

aplutsoc – Mai 10

Ce gouvernement doit être chassé : hommage à Jean Moulin ce 8 mai de la part d’un Macron à l’offensive contre les conquêtes appliquées du Conseil National de la Résistance (CNR) en 1945 ; attaque d’extrême droite inspirée de l’héritage de l’Action Française chez Darmanin contre la Ligue des Droits de l’Homme (LDH), par Robert Duguet.

C’est devant des Champs Élysées quasiment vides que Macron – dans la tradition du 8 mai – a présidé la cérémonie commémorant la fin de la seconde guerre mondiale, place de l’Étoile. La presse aux ordres souligne que ce n’est pas bon signe pour « le chef de l’État ». Avez-vous remarqué que dans la tradition bonapartiste qui est celle de cette fin de règne du macronisme, les médias officiels écrivent « le chef de l’État » et non « le président de la République » ?

Ce n’est pas place de l’Étoile que s’est exprimé le mouvement social de rejet du régime de Macron parti de la « résistance » contre la réforme des 64 ans, mais à Lyon lors de la cérémonie qui avait lieu au Mémorial de la prison de Montluc, où Jean Moulin et d’autres figures de la Résistance furent détenus. Ce ne sont pas moins de 4000 manifestants, selon la police, 5000 selon la CGT, qui se sont mobilisés. La CGT, FO et les syndicats de l’Éducation, la FSU ont lancé un appel à manifestation, affirmant par leurs mots d’ordre et pancartes que « commémorer l’œuvre sociale de la résistance » c’est réaffirmer « l’exigence d’abrogation de la loi Macron sur les retraites ».

Déjà la CGT-Cheminots, face à la destruction des régimes spéciaux, avait au début du mouvement rappelé le sens du combat de la résistance ouvrière contre les nazis et le régime de Pétain et ce que signifiait le programme des « jours heureux » du Conseil National de la Résistance de 1943. Lors de l’effondrement de la domination nazie sur l’Europe, ce sont ces militants de l’ombre qui construiront la sécurité sociale et imposeront à la bourgeoisie française, à 90% soutenant le régime de Vichy, les conquêtes sociales auxquelles des masses de millions d’hommes et de femmes viennent de rappeler leur attachement. De Gaulle a appliqué et contraint la classe dominante à payer l’addition pour éviter la révolution sociale. Dans cette voie, Maurice Thorez, dans l’ombre de Staline, lui a donné un solide coup de main.

Rappelons que l’offensive contre les retraites n’est pas dictée par des impératifs économiques, elle est politique : substituer aux valeurs de solidarité, au lien intergénérationnel la liberté du marché, donc l’assurance privée contre la répartition. Le MEDEF avait donné la consigne au gouvernement de Sarkozy de remettre en cause les acquis concédés au prolétariat à la Libération et contenus dans le programme du CNR. Macron a répondu présent, ses prédécesseurs n’ont pas su le faire, Jupiter s’obstine à le faire !

Et dans cette voie il a largement démontré qu’il le fera envers et contre tout, (« quoiqu’il en coûte ? »). Le charmant jeune homme de 2017, avec sa tête de premier de la classe sortant d’une école supérieure de commerce, a montré quelle était sa vraie filiation idéologique : l’hommage au maréchal Pétain, « ce grand soldat », n’était pas anodine. Le grand soldat était celui qui faisait désigner un soldat sur dix dans les régiments mutinés ou soupçonnés de mutinerie pour les fusiller pour l’exemple. C’est celui qui fera le choix de cirer les bottes des nazis en 1940, aux ordres d’une bourgeoisie dont le mot d’ordre de classe était : « plutôt Hitler que le front populaire ! ». Laval ira jusqu’à prévenir les exigences de la répression nazie par la déportation des enfants juifs.

Macron à Montluc honorant la mémoire de Jean Moulin, c’est une insulte aux fils et filles de résistants, de déportés résistants ! Va-t-on accepter qu’il gouverne encore quatre ans ?

Macron, Darmanin et Borne, c’est l’offensive contre la Ligue des Droits de l’Homme, qui elle aussi n’est pas anodine. Ce n’est pas seulement l’embardée regrettable vers l’extrême droite d’un gouvernement déstabilisé ne sachant plus à quel saint se vouer. Le régime de la Vème République a été fondé par le général De Gaulle, inspiré par les principes du nationalisme intégral de Charles Maurras et de l’Action Française. Néanmoins l’exercice du pouvoir n’a été possible dans la France de 1958, même si l’organisation des pouvoirs perdait sa forme parlementaire qu’en préservant les libertés démocratiques et sociales. Macron, c’est l’État Unitaire, le rejet des « corps intermédiaires » – les libertés syndicales en particulier, la volonté d’achever l’œuvre laissée par le général De Gaulle. Même un syndicat comme la CFDT, pour lequel on peut ne pas avoir une particulière sympathie en raison de sa fondation sur le corporatisme chrétien, ne trouve plus sa place dans le macronisme.

La Ligue des Droits de l’Homme s’est fondée en 1898 à partir du combat mené par des républicains comme Clémenceau, des socialistes comme Jaurès, des francs-maçons, des intellectuels, des écrivains comme Émile Zola ou Marcel Proust, des avocats pour défendre le capitaine Dreyfus, injustement mis en cause par la haute hiérarchie militaire plus inspirée par Maurras et l’antisémitisme que par le modèle républicain qu’elle détestait. La Ligue est devenue après cette affaire une organisation pérenne fondée sur le principe que tout gouvernement, pourtant élu démocratiquement, peut dériver ou porter atteinte aux principes de la séparation des pouvoirs et de l’État de droit. Dans son histoire elle est attaquée par la vieille France des ligues d’extrême droite, notamment dans la période ouverte avant et après le 6 février 1934. C’est la montée des nationalismes, l’héritage de Maurice Barrès, la défense de l’identité, des racines, de la « terre et des morts », qui revient pour combattre la montée prolétarienne qui converge vers juin 1936. C’est dans les locaux de la Ligue qu’a lieu la rencontre des États-majors politiques qui donnera naissance à l’accord du Front Populaire.

Le fait que des militants de la Ligue aient été présents lors des affrontements de Sainte Soline le 25 mars pour témoigner de ce qu’ils avaient pu constater, les violences injustifiées et en particulier l’obstruction des forces de police pour retarder l’intervention des secours pour deux blessés graves, le ministre de l’intérieur Darmanin met en cause la LDH le 5 avril, suivi par Borne et Macron lui-même. L’histoire politique de Darmanin est peu reluisante : Hilaire de Crémiers, royaliste et catholique, issu de l’Action Française, jugeant que cette dernière est peu attrayante, fonde dans les années 2000 la revue « politique magazine », animé par le groupuscule Restauration nationale. C’est à cette publication que l’actuel ministre de l’intérieur a collaboré. Il n’était donc pas sans connaître la filiation de cette publication avec l’Action Française qui, en son temps, attaqua la Ligue et ses militants dans la décennie 1930-1940. La LDH dissoute sous l’occupation, ses archives ont été pillées par les nazis et expédiées à Berlin. Rappelons le martyre de Victor Basch, son président d’avant-guerre et de sa femme, assassinés à 80 ans passés par la milice fin 1944.

Que dit la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, du moins celle de la convention jacobine de 1793 :

« Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs ».

RD, le 10 mai 2023.

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