La guerre au sommet en Russie entre chefs de guerre mafieux est emblématique des tendances générales dans le monde où les chefs d’Etat tendent tout à la fois à la dictature, entraînant leurs peuples dans le chaos et à la guerre mais tendent aussi en même temps à leur propre désagrégation progressive d’une manière ou d’une autre, passant de statut de Bonaparte à celui de Guignol, sous la pression des peuples qui résistent et se rebellent,.
En France aussi, même si c’est à des degrés moindres, la tendance dictatoriale pour imposer la réforme des retraites est claire. Cela va de l’utilisation, des articles 49.3, 47.ou 40 par dessus le Parlement qu’on empêche de voter, jusqu’au non renouvellement de l’agrément d’Anticor en passant par la dissolution des Soulèvements de la terre, les poursuites contre de nombreux militants écologistes ou syndicaux ou encore la tentative de définancement de la Ligue des Droits de l’homme et la répression policière de plus en plus brutale. En même temps, malgré sa violence croissante, l’autorité du pouvoir est en train de se désagréger au prorata des résistances populaires continues depuis 2016 , en s’additionnent d’une multiplication de scandales au sommet au point où beaucoup se demandent si on a affaire à un gouvernement bourgeois traditionnel ou à à une association de malfaiteurs et de purs bouffons.
C’est qu’en Russie comme en France ou ailleurs, deux tendances fondamentales se heurtent de plus en plus ouvertement, violemment et, en conséquence, plus visiblement.
Dans le projet capitaliste néolibéral pourrissant, au moment d’une concurrence mondiale exacerbée, la seule cadence acceptable du travail est celle de l’accélération permanente et de l’optimisation maximale des rendements afin de tirer un maximum de profits des exploités. Il faut faire travailler toujours plus la main-d’œuvre, la payer toujours moins, la soumettre davantage au mode d’exploitation capitaliste, et ne réserver la retraite qu’aux individus détruits par le travail. L’idée qu’on pourrait prendre sa retraite quand on est encore en forme est aussi aberrante pour un néolibéral aujourd’hui, que de reléguer sur le banc de touche un champion de football.
Mais ce programme se heurte à un mouvement historique contraire, celui du projet politique grandissant d’émancipation socialiste des peuples et des classes exploitées, qui vise au contraire à libérer l’individu de la pression de l’exploitation salariée.
De la naissent les deux tendances contradictoires au somment, l’autoritarisme grandissant et la déliquescence du pouvoir. Cette situation a souvent été résumée par la formule : « en haut on ne peut plus, en bas on ne veut plus ».
L’issue du conflit historique opposant ces deux tendances n’est pas encore écrite : tout dépendra de notre capacité à l’emporter. Mais de plus en plus de gens en prennent conscience et c’est une donnée essentielle de la situation, pour le renforcement de notre camp.
En France, après son lâchage des 1er mai et 6 juin, l’intersyndicale qui en est encore restée pour sa part aux méthodes de lutte de l’époque précédente du soi-disant « dialogue social », voulait – comme Macron – passer à autre chose et reprendre ses petites habitudes avec des négociations dispersées secteur par secteurs, le petit train train habituel ou on ne fait que négocier les reculs. Ça pouvait passer relativement hier mais aujourd’hui où le projet capitaliste est une liquidation totale des protections sociales et de la démocratie qui les accompagne, on ne peut plus négocier des reculs, car il n’y a plus rien à négocier.
Macron le montre une nouvelle fois par sa répression tous azimuts. Il force ainsi à nouveau à pousser à regrouper, coordonner, centraliser les résistances autour d’une lutte qui ne peut que devenir de plus en plus clairement, une lutte pour la survie contre le pouvoir, pour le faire tomber, maintenant, et pas dans le vieux cadre institutionnel du vieux système électoral dans 4 ans.
Les arrestations de militants écologistes contre Lafarge, la dissolution des Soulèvements de la terre, puis les convocations d’Attac, d’Extinction rébellion et Dernière rénovation pour enquête devant l’Assemblée Nationale, le non renouvellement de l’agrément d’Anticor, qui s’associent à des sanctions, garde à vue, arrestations, licenciements… de très nombreux militants syndicalistes, montrent plus que jamais, que Macron veut sanctionner le mouvement des millions de grévistes et manifestants qui ont occupé le terrain durant 5 mois pour les retraites… parce qu’il sait qu’il va reprendre d’ici peu. Ce que Macron criant c’est qu’à l’occasion de la lutte pour les retraites, le mouvement a commencé à faire tomber toutes les barrières entre le mouvement social, celui des écologistes, des anti-fascistes, des anti-militaristes, des jeunes et des plus anciens, entre la lutte économique et la lutte politique, pour tendre à n’en faire qu’un seul mouvement général, donnant comme débouché au mouvement économique, la remise en cause sinon la chute, du gouvernement, du pouvoir politique et de la société qu’il défend. Macron craint que le mouvement ne recommence demain et peut-être très rapidement au vu des attaques qu’il prépare autour du budget à l’automne et qu’il soit renforcé de cette expérience, de ces convergences et de cette conscience.
Étant de plus en plus isolé, fragilisé, il ne reste à Macron que la police pour tenter de taper le plus fort possible aujourd’hui et intimider, décourager, faire peur pour demain. Mais dans la situation générale actuelle, ça pourrait au contraire politiser, accélérer et unifier un peu plus les luttes, associant les jeunes en lutte pour leur avenir comme celui de la planète et le combat économique des plus larges classe populaires pour aujourd’hui. Le mouvement des retraites n’est en effet qu’une étape supplémentaire d’une résistance populaire qui existe depuis 2016, qui est croissante, et qui, même si elle vaincue à chaque étape, a ceci d’extraordinaire qu’elle se décourage de moins en moins plus on avance dans le temps et qu’elle accumule au contraire avec le temps de plus en plus d’expérience pour de plus en plus de gens afin d’être de plus en plus efficace demain.
Jacques Chastaing 25 juin 2023
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