Une crise bancaire ? Quelle crise bancaire ?

La folie haussière continue en ce milieu d’été. Les volumes sont misérables, mais à la première occasion le « FOMO » refait surface. Les investisseurs semblent avoir une peur panique de rater le prochain mouvement haussier et du coup, le Dow Jones vient d’enquiller sa septième séance de hausse consécutive et le pire, c’est qu’on voit assez mal ce qui pourrait empêcher les indices de monter encore, puisque plus aucune mauvaise nouvelle ne fonctionne. Hier les chiffres macro n’était pas terribles et dans un monde normal on aurait pu avoir peur, mais c’était sans compter les résultats canons des bancaires et la suite de la série « l’intelligence artificielle est notre amie ».

Il y a eu une crise des banques, mais c’était avant

Il y a quelques mois, à la fin du premier trimestre, on a eu très peur pour le système bancaire. Les clients se sont mis à ne plus avoir confiance en « le système bancaire » et certains d’entre eux, ont soldé leurs comptes provoquant une panique générale. Des banques ont fait faillite, d’autres ont été rachetées à la casse par des concurrents (salutations amicales au Crédit Suisse et à la First Trust), pendant un bref instant on s’est vu revivre la crise de 2008 avec la faillite de Lehman Brothers, mais que nenni. Les banques centrales, les gouvernements, les autorités financières, les politiciens et tout ce qui avait un peu de pouvoir sur le système sont intervenus à grands coups de garanties financières et de coups de pouces tous azimuts et les banques ont été sauvées. L’honneur a été sauf, notre épargne aussi et on a pu reprendre une vie normale.

4 mois après cette « crise bancaire » qui marque aussi la dernière fois où le marché a eu vraiment peur, lesdites banques sont en train de publier leurs chiffres trimestriels et pour être franc, c’est plutôt canon pour un secteur qui était au bord du gouffre et en pleine panique il y a quatre mois. Hier, Bank of America et Morgan Stanley ont publié leurs chiffres du trimestre et c’était tout simplement exceptionnel par rapport aux attentes. Alors je ne sais pas si c’est le fait que l’on n’attendait tellement rien et que du coup, c’est une bonne surprise. Ou alors est-ce que c’est vraiment un super-job offert par le secteur, toujours est-il que le résultat est là. Morgan Stanley vivait sa meilleure séance depuis 9 mois en prenant plus de 6% et Bank of America grimpait de plus de 4%. Et au passage, on notera aussi que Charles Schwab qui nous a fait très peur en mars, a repris 50% depuis cette époque et 12% rien qu’hier. Lorsque l’on regarde les charts de ces actions, on a l’impression que l’on commence à sortir à peine la tête de l’eau, rien de plus. Mais peu importe, hier le secteur bancaire était en feu et ça nous a suffi pour vivre encore une séance de hausse durant laquelle les gourous sont toujours plus inquiets de la hausse et où le marché se fout pas mal des inquiétudes à son sujet.

La macro montre des signes de faiblesse

Durant cette journée de mardi, il y avait aussi les chiffres des ventes de détail. Hier matin, ces publications étaient considérées comme « importantes », puisque cela aurait pu nous permettre de faire le point sur l’état de santé de l’économie et de voir si le consommateur était toujours en mode « affamé de la consommation », confirmant ainsi les déclarations de Madame Yellen et de Goldman Sachs, qui se sont concertés durant le week-end, pour se mettre d’accord sur le fait qu’il n’y aura pas de récession. Bon, les chiffres d’hier, que ce soit les ventes de détail, ou encore la production industrielle et manufacturière, tous les chiffres étaient NETTEMENT en-dessous des attentes.

Et si nous étions dans un monde réel, où l’on se préoccuperait d’un éventuel ralentissement de l’économie à venir, on aurait pu se dire qu’il y avait quand même un truc qui commençait à se faire remarquer : le ralentissement de la consommation et la baisse de production, puisque les gens consomment quand même un peu moins que lorsqu’on les a libérés de leur prison du COVID. Mais il faut l’admettre ; ce qui a paru logique il y a encore quelques mois, n’est plus vraiment d’actualité aujourd’hui. Actuellement, nous (les investisseurs) sommes bien plus préoccupés par le fait de rater la hausse – rater n’importe quelle hausse, que ce soit celle des bancaires, celle de l’intelligence artificielle ou celle d’un obscur crypto-monnaie que l’on ne connaissait pas encore hier – que de se prendre la tête avec un quelconque chiffre économique qui laisserait supposer que l’économie est en train de ralentir. Surtout 24 heures après que notre grand-maman à tous – Madame Yellen – ait annoncé que la récession n’aura pas lieu. Non, GREED n’a jamais été aussi GOOD qu’hier. Le « making pognon » est devenu bien plus obsessionnel que la peur de voir la bourse baisser un jour. Et ça encore, c’était sans compter Microsoft et Nvidia.

L’intelligence artificielle, c’est vraiment trop chouette

Oui, parce qu’hier, Microsoft a annoncé les prix qu’ils allaient facturer pour leur produits « intelligence artificielle » et visiblement, ça va être carton plein pour la société de Seattle. De toutes façons, on a l’impression que personne n’aura le choix et que la société qui décidera de prendre la suite Microsoft SANS l’IA, sera de toutes manière le cancre au fond de la classe qui n’arrive pas à lire au tableau et qu’il n’y aura pas d’autre choix que de payer le prix. Alors Bill Gates et ses amis vont se faire plaisir au chapitre de la facturation. On parle d’augmentation de tarifs de de 240% pour certains produits « avec de l’intelligence artificielle dedans ». Du coup, Microsoft a explosé de 4%. Et quand une boîte aussi énorme explose de 4% dans la journée, c’est tout le secteur qui s’enflamme. Nvidia montait aussi de 2% en sympathie, parce que tout le monde le sait : quand il y a une bonne nouvelle dans le secteur de l’intelligence artificielle, Nvidia en profite toujours. Au passage il y avait aussi Meta qui lançait SON intelligence artificielle qui s’appelle Llama et moi qui suis allé au cinéma pour voir le dernier Mission Impossible qui fait bien flipper au niveau de l’Intelligence Artificielle d’ailleurs.

Toujours est-il qu’hier, si vous faites un peu les totaux en fin de journée, vous pourrez noter que le gain de capitalisation boursière de Microsoft est de 143 milliards – soit le neuvième plus gros gain de « market cap » de l’histoire du monde merveilleux de la finance. Mais si vous additionnez les gains de capitalisation boursière de Microsoft et Nvidia, juste pour la séance d’hier, cela représente 175 milliards. À titre de comparaison, Nike vaut 168 milliards de dollars, Intel vaut 143 milliards de dollars, Disney vaut 157 milliards de dollars et les 462 plus petites sociétés du S&P500 valent moins de 175 milliards de dollars chacune. Mais Microsoft et Nvidia ont gagné a eu deux 175 milliards de valorisation sur UNE journée. Tout ça parce qu’ils ont augmenté les prix de l’intelligence artificielle. Je ne sais pas si le fait de créer des giga-compagnies qui valent bien plus que certains pays va finir dans le mur à un certain moment ou pas, mais je ne peux pas m’empêcher de me dire que ça ne PEUT PAS bien finir…

En Asie

En Asie ce matin, les chiffres pourris de l’économie chinoise pèsent toujours sur la Chine et le gouvernement n’a toujours pas annoncé de plan de sauvetage. Hong Kong recule de 1.2%, la Chine est en baisse de 0.25% et le Japon reprend quand même 0.8% dans le sillage de Wall Street qui continue – donc – d’aller très bien. Le pétrole est à 75.36$, l’or est à 1978$ et le Bitcoin se traite TOUJOURS à 30’150$.

Du côté des nouvelles du jour, il n’y a franchement pas grand-chose à dire. Tout le monde se prépare pour les chiffres de Tesla ce soir et tout le monde sait qu’il va falloir la jouer serré sur le chapitres des marges. On notera aussi qu’hier Novartis a sorti des chiffres plus que convaincants et se montraient très optimistes pour l’avenir. Le titre montait de plus de 4% et faisait du bien au SMI. Côté trimestriel, aujourd’hui, il y aura aussi Goldman Sachs qui va publier ses chiffres. Les attentes sont très basses et les intervenants semblent très méfiants, mais quand on voit ce qui s’est passé hier sur Morgan Stanley, on se dit que tout peut arriver et que « fixer » des attentes cohérentes, ça n’est pas trop le fort des analystes en ce moment. Il faudra aussi regarder les chiffres d’ASML qui vont peut-être donner des indices sur le secteur des semiconducteurs en ce début de saison.

Chiffres économiques

Du côté des chiffres économiques, nous aurons les nouvelles immatriculations de voitures en France et en Allemagne et il y aura également le CPI en Europe, manquerait plus que l’Europe nous annonce que l’inflation est vaincue de ce côté-là de l’Atlantique et ça serait Byzance avec du vert partout sur les marchés pour les 8 prochains mois, alors que la majorité des « funds managers » restent très prudents sur l’avenir – pour ne pas dire « bearishs ». Aux USA, il y aura les nouvelles demandes d’hypothèques alors que l’on annonce qu’il n’y a jamais eu aussi peu d’objets à la vente sur le marché de l’immobilier US et puis, comme nous sommes mercredi, il y aura aussi les inventaires pétroliers.

Pour le moment les futures sont inchangés, mais les marchés ne montrent en aucun cas le moindre signe de faiblesse, surtout que dorénavant nous savons que l’on ne peut que monter… Ou presque. Passez une excellente journée et nous on se voit demain à la même heure !

À demain !

Thomas Veillet
Investir.ch

“Never leave that till tomorrow which you can do today.”

– Benjamin Franklin