14Six semaines après notre première chronique sur ce thème, nous faisons un récapitulatif des événements sur le chantier Boralex de Cruis.
Comme chacun sait, l’opposition s’est maintenue tout en développant des techniques posant problème aux gendarmes (qui n’arrivaient pas à démanteler les blocages sans risquer de blesser les opposants). Des engins de taille importante ont été présentés qui ont été gênés pour leur livraison et leurs opérations.
Dans ce contexte, une militante a été soumise à une première garde à vue à la gendarmerie de Saint-Etienne-les-Orgues qui dura trois heures.
Parallèlement, l’Office français de la biodiversité (OFB) est intervenu pour empêcher l’opérateur de dégrader certains espaces hors périmètre projet, mais apparemment en refusant de constater les dégâts occasionnés par l’élargissement des pistes.
De hauts responsables de Boralex sont venus rencontrer les opposants – sans, évidemment, convaincre.
Le 5 septembre, actant la plainte de plusieurs associations et collectifs dont Elzéard, Boralex soumet un « porter-à-connaissance » via la DREAL, proposant sa propre contre-expertise environnementale ainsi que des mesures compensatoires en rapport. C’est ainsi que fonctionne notre droit de l’environnement : on peut détruire des espèces menacées à condition de promettre des travaux d’aménagement compensant les pertes – mesures dont chacun s’accorde à reconnaître qu’elles sont très peu contrôlées. Il suffit donc de pouvoir payer (ou tout au moins de montrer l’argent) pour obtenir le droit de détruire des animaux et des plantes qui vont bientôt disparaître de notre patrimoine naturel.
Cette démarche donne normalement lieu à une consultation publique, par le biais de commentaires en ligne – ici du 6 au 20 septembre. A l’issue de cette consultation, le préfet devait trancher en accordant, ou pas, une extension à la dérogation pour destruction d’espèces protégées du 17 janvier 2020. Dans la mesure où cette décision, même si elle laissait très peu de doutes, conditionnait la poursuite du chantier, Boralex aurait dû au moins attendre le feu vert officiel puisque la présence d’espèces non répertoriées dans l’étude d’impact initiale était reconnue.
Mais ce ne fut pas le cas. C’est finalement la persévérance des opposants, venant à bout de la patience des ouvriers et de la gendarmerie, qui incita l’opérateur à suspendre les travaux le 14 septembre.
Comme on s’y attendait, toutefois, le 29 septembre le préfet confirma que cette consultation publique était une mascarade en accordant son feu vert sans même acter les nombreuses réactions défavorables. On note au passage l’incohérence de cette procédure : c’est la préfecture, forcément incompétente en matière de biodiversité, qui tranche entre les études contradictoires des parties, plutôt que de faire intervenir les ressources de l’Etat (par exemple la DREAL) sur le terrain afin d’établir la vérité.
C’est donc sans surprise qu’on a pu lire le 2 octobre l’annonce de la reprise du chantier par Boralex. Des dispositions stratégiques avaient été prises pour contrer fermement l’opposition et l’on put voir dès le 2 octobre une quarantaine de gendarmes accompagner la livraison des engins lourds, dans un affrontement physique vigoureux avec les militants. Le 5 octobre, deux opposantes furent interpellées menottes aux poignets puis placées 28 heures en garde à vue, à Forcalquier puis à Digne. Elles devront comparaître en novembre, et se défendre des réclamations financières de Boralex à leur égard.
Aujourd’hui, le mot d’ordre des opposants est de maintenir leur présence mais sans aller au contact ni à l’obstruction. Le chantier avance apparemment rapidement, avec un niveau sonore 10 fois supérieur à celui auquel l’opérateur s’engageait dans son permis de construire. En s’y promenant aux abords, on découvre un spectacle navrant :
« Zone de protection », « espèces protégées »… sur cette image de désolation : cherchez l’erreur. Qu’est-ce qu’on protège ? La caillasse ? Les cadavres de cèdre ? Les pelles mécaniques ? La race des opérateurs, elle, ne semble pas menacée.
En attendant, riche de sa dotation industrielle la mairie de Cruis se paye un pamphlet de 36 pages en couleurs (fautes d’orthographe comprises) qu’elle envoie par courrier postal à tous ses sujets (ainsi qu’à quelques voisins) pour justifier (à nouveau) le projet, à coup d’informations contradictoires et fallacieuses – comme d’habitude…
Pourquoi on n’arrête pas de m’embêter ?Tout le monde le dit : j’ai tout fait pour la forêt. J’ai fait faire des pistes (pour sortir le bois), j’étais là quand on prenait la photo des jas en chantier, j’ai fait mettre des panneaux pour réserver le massif aux ayants droit (mais c’est qui, les ayants droit, déjà ?)… Je n’ai pas arrêté de planter : j’aime les arbres, j’aime la montagne ! Alors pourquoi me reproche-t-on d’en raser quelques misérables hectares pour remplumer les finances de la commune – qui sont pourtant saines et bien portantes, n’allez pas croire le contraire ! La preuve : nous n’allons pas augmenter la taxe foncière (c’est l’Etat qui s’en charge).
Et d’ailleurs : quels arbres ? Quelle forêt ? Chacun pouvait constater, avant le défrichement qu’il n’y en avait pratiquement pas, ni sur la zone est : …ni sur la zone ouest : On le voit bien – les forestiers qui sont venus défricher n’avaient rien à faire : …et à la sortie il y avait très peu de bois : D’ailleurs il suffit de compter : 900 arbres (et arbustes) de 12 cm de diamètre (maximum) pour 400 m3 de bois… Bon, disons qu’il n’y avait que des arbres, sans arbustes, tous de 12 cm de la souche à la cime (des poteaux, quoi), ça nous fait des arbres de… 40 m de haut. Hum… il manque peut-être un zéro : disons 9 000 arbres, avec un diamètre moyen de 12/2 = 6 cm, les arbres auraient quand même fait 15 m, alors qu’ils n’en faisaient pas plus de 6 ou 7. Donc plus de 20 000 arbres ? Mince, ça casse mon bilan de plantation (21 000). Doit y avoir une erreur… En tout cas, à la fin tout était bien propre : Sans aucune gêne pour les villageois. Ah non, ça c’est vu de Montlaux – pas notre problème. Et quand ce sera couvert de panneaux ce sera très joli. « Que de bruit pour un parc photovoltaïque de 17 hectares. » Effectivement ! Mais les riverains n’en ont que pour 6 à 8 mois à endurer ce chantier qui fait 65 décibels à 300 m (les promesses du permis de construire de respecter 30 décibels à 100 m n’étaient pas réalistes – on ne peut pas demander l’impossible). Enfin, on m’a calculé que les recours nous ont fait perdre 1 000 000 € de recettes. Je ne comprends pas bien comment on en arrive là vu que l’unique recours date de juillet 2020 et que Boralex, manifestement indifférent comme il se doit à ces tractations insensées, a débuté le chantier 5 mois avant le jugement soit 2 ans après le recours, en septembre 2022, date à laquelle la commune a commencé à toucher à raison de 180 000 €/an… Donc si c’était vraiment le recours qui les avait arrêtés, ce qui n’aurait aucun sens, le manque à gagner pour nous serait de 360 000 € – ou alors c’est 500 000 €/an qu’on touche ? On ne me dit jamais rien. Mais oublions que le permis date en fait de 2017 et retenons un million d’euros de préjudice dûs au seul recours – le chiffre est certainement bon, faites-moi confiance comme toujours. Et ne lisez surtout pas tout ce que racontent les illuminés écolos contre notre démarche – ils n’ont forcément rien compris puisqu’ils s’y opposent. |
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