Après des appels à « l’autodéfense », une rafle d’extrême droite échoue à Romans-sur-Isère

Alors que des appels à venger Thomas, « tué par des immigrés » à Crépol, circulent à l’extrême droite, des militants « venus de toute la France » ont tenté d’investir samedi soir le quartier de la Monnaie, à Romans-sur-Isère.

Karl Laske

26 novembre 2023

Des appels à venger Thomas, le jeune tué lors de la rixe de Crépol, circulaient depuis une semaine dans les milieux d’extrême droite. Une centaine de leurs membres a tenté d’investir, samedi soir, le quartier de la Monnaie, à Romans-sur-Isère, d’où est originaire une partie des mis en examen dans l’affaire.

Selon la préfecture, l’attaque du quartier, conduite par 80 individus, a été repoussée par deux unités de CRS et s’est soldée par vingt interpellations. Vendredi dans la nuit, un groupe d’une soixantaine de militants masqués avait fait une démonstration de force dans les rues de Reims, réclamant « justice pour Thomas ».

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Des CRS déployés à Romans-sur-Isère le 26 novembre 2023. © Photo Nicolas Guyonnet/Hans Lucas/AFP

Casquette marron sur la tête mais le visage flouté, un militant nationaliste a revendiqué, dimanche, dans un communiqué diffusé sur les réseaux sociaux, l’attaque nocturne de Romans-sur-Isère.

L’homme se félicite d’avoir réuni « 120 patriotes », « des jeunes », « étudiants, travailleurs, et pour certains entrepreneurs », venus « des quatre coins de la France, de Normandie, d’Occitanie, en passant par Paris », pour « faire entendre [leur] colère ».

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Le porte-parole des militants qui ont tenté d’investir le quartier. © DR

« Malheureusement, au moment de pénétrer dans la cité, une centaine de CRS nous a violemment chargés pour nous repousser et nous empêcher de manifester, expose l’homme à la casquette. De nombreux blessés sont à déplorer, lynchés au sol [sic] par les CRS puis par les racailles, qui ont attendu que leurs auxiliaires policiers chassent les patriotes afin de les attaquer à dix contre un par derrière. »

Les militants d’extrême droite déplorent 21 interpellés dans leurs rangs, dont un blessé à la main qui aurait été interpellé à l’hôpital. Mais ils se félicitent d’avoir été « prévenus de l’arrivée imminente des CRS » par un équipage de la BAC (brigade anticriminalité).

« Nous avions tout à perdre en nous rendant là-bas, expose encore leur porte-parole. Nous n’avions pas d’autre choix que d’allumer la mèche, hier soir, car nous ne supportons plus de vivre avec des occupants qui violent nos sœurs, tuent nos frères et dépouillent nos grands-pères. » « Tant que l’État n’aura pas mis en place un plan massif de ré-émigration, les Français combattront », annonce-t-il encore.

Sur les réseaux sociaux, quelques figures de l’extrême droite ont salué l’action des militants et condamné l’intervention de la police. C’est le cas d’Yvan Benedetti, porte-parole du mouvement Les Nationalistes, ancien président de l’Œuvre française, qui a relayé le communiqué des « jeunes patriotes »« Les nôtres livrés à la racaille par la police de ce régime pourri, écrit-il. Les responsables Moussa Darmanin [sic] et toute cette caste politicienne […]. Il est temps de ne plus subir ! »

Benedetti avait posté des photos d’affiches appelant à une action de « légitime défense » (voir ci-dessous) dans l’affaire de l’assassinat de Thomas, « tué par des immigrés ».

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L’affichage relayé par le mouvement Les Nationalistes. © DR

« Quand l’État n’assure plus la sécurité de ses citoyens, ils finissent par vouloir se défendre eux-mêmes avec tous les risques, excès et dérapages que cela implique », a justifié le dirigeant de Reconquête, Damien Rieu, ancien responsable de Génération identitaire, plus prudent. Jeudi, il avait posté sur X (ex-Twitter) une photo du cercueil de Thomas porté par ses amis, avec ce commentaire : « Être un jeune Gaulois colonisé en 2023 ».

L’ancien frontiste passé chez Reconquête Jean-Yves Le Gallou dénonce, de son côté, l’action du préfet de la Drôme Thierry Devimeux, « féroce contre les patriotes » et « impuissant contre les délinquants ».

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L’appel à la révolte de Frédéric Chatillon, l’ancien chef du GUD. © DR

Dans les réseaux nationalistes angevins, des militants félicitent « les natios qui ont marché sur Romans-sur-Isère », qui « ont fait quelque chose de grand »« Ce soir n’est pas un échec, c’est un début », écrit l’un d’eux.

Les appels à se mobiliser après la rixe de Romans-sur-Isère ont circulé aussi dans le cercle des anciens du GUD (Groupe union défense), proches de Marine Le Pen. « Révoltons-nous ! Ils tuent nos enfants ! », a écrit Frédéric Chatillon, un très proche de la présidente du RN, sur son compte Facebook, au-dessus d’un dessin représentant Thomas, un ballon de rugby dans les mains, barré par ces mots : « Tué par des barbares ! » En réaction, ses amis appellent à « faire le ménage » et à « défoncer des gueules ».

Dimanche, à Annecy, lors d’une manifestation d’extrême droite « en hommage à Thomas », le journaliste Gérard Fumex, animateur du site Librinfo74, a été pris à partie puis roué de coups par des militants. Blessé par un coup de pied à la tête, il a été conduit à l’hôpital.

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