Forfaits, logements… Aller skier coûte de plus en plus cher. Avec le dérèglement climatique, les stations, largement subventionnées par l’État, investissent dans des infrastructures coûteuses. Un modèle à bout de souffle.
Les sports d’hiver coûtent cher et la tendance ne devrait pas s’infléchir, selon Fiona Mille, présidente de l’ONG de défense de la montagne et de l’environnement Mountain Wilderness : « Avec le dérèglement climatique, la pratique du ski va devenir de plus en plus élitiste. Des stations de basse et moyenne altitude — des stations familiales — vont fermer au profit des stations de haute altitude destinées à un public aisé. » « Le profil des amateurs de sports d’hiver est plutôt aisé, jeune, urbain », résume l’étude.
Au total, 9 % des Français s’y adonnent, selon un rapport du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc). Un chiffre pour l’instant stable : en 2010, ils étaient 8 %. Et à l’avenir ? Alors qu’en pleines vacances scolaires, des stations de ski sont contraintes de fermer faute de neige, faire du ski coûte de plus en plus cher. Les hausses des prix s’expliquent, notamment, par le réchauffement climatique.
D’après le magazine Skieur, pour la saison hiver 2023, les forfaits de ski pour les adultes ont ainsi augmenté entre 5 et 8 % en moyenne par rapport à l’année précédente. Le média spécialisé donne plusieurs exemples : +10 % sur le forfait six jours à la station des Portes du Soleil en Haute-Savoie (passant de 312 à 342 euros), +8,6 % pour le forfait six jours à La Plagne en Savoie (passant de 304 à 330 euros)… Le Monde livre un autre exemple : en dix ans, le forfait six jours sur le domaine de Tignes-Val-d’Isère a augmenté de 57 %, passant de 252 à 396 euros par adulte.
Des sommes auxquelles il faut ajouter la location d’équipement, la nourriture ainsi que le logement. Or, d’après les chiffres de la Fédération nationale de l’immobilier cités par Le Monde, entre juillet 2020 et avril 2023, les prix dans les stations de ski ont augmenté de 30 %.
À Paradis Ski (autour de La Plagne), l’un des plus grands domaines skiables de France, les prix des locations ont augmenté de 10 % rien qu’entre 2019 et 2020.
Toujours plus d’infrastructures pour pallier le manque de neige
« Certaines stations sont en grandes difficultés d’enneigement, ce qui permet à celles qui ont davantage de neige d’être plus attractives et de proposer des prix de plus en plus chers », explique Fiona Mille, présidente de l’ONG Mountain Wilderness. Les stations « doivent en outre dépenser de l’argent dans des canons à neige afin de produire de la neige artificielle, ou dans des remontées mécaniques permettant d’aller toujours plus haut ». Autant d’investissements « très énergivores » — dans un contexte de hausse des prix des énergies fossiles — qui se répercutent sur les prix proposés aux vacanciers.
« Un subventionnement public croissant »
D’après un rapport publié début février par la Cour des comptes, le modèle économique des stations de ski, « à bout de souffle », est ainsi « durablement affecté par le changement climatique depuis le début du XXIe siècle ». « Toutes les stations de ski seront plus ou moins touchées à l’horizon 2050 » et « quelques stations pourraient espérer poursuivre une exploitation au-delà de cette échéance », ajoute le texte, qui rappelle au passage le « subventionnement public significatif et croissant » perçu par les opérateurs des remontées mécaniques (124 millions d’euros par an pour ceux dont le chiffre d’affaires annuel est inférieur à 15 millions d’euros, « soit un niveau de dépendance à la dépense publique d’environ 23 % »).
« Ce rapport montre comment l’argent public finance largement la filière du ski alpin, qui non seulement va droit dans le mur avec le dérèglement climatique, mais provoque aussi des inégalités sociales », déplore Fiona Mille. Pour la présidente de Mountain Wilderness, les pouvoirs publics devraient plutôt « soutenir toutes les activités qui permettent de faire vivre la montagne à l’année, comme la randonnée, les raquettes ou encore la découverte de la faune et la flore ». Et ce, sans conditions de ressources financières : « La montagne doit être accessible à toutes et à tous. »
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