Quelques éléments de réflexion sur les Insurgés après la Conférence de presse donnant acte de la création de « l’Après ». Par Robert Duguet.
14 juillet.
Ci-joints :
- La vidéo de la conférence de presse à l’adresse suivante :
- Le site de l’Après :
- Le texte de Danielle Simonnet dans la Revue Regards du 12 juillet :
Ci-joint le lien vers la vidéo de la conférence de presse de l’association « l’après » tenue à l’initiative des opposants « purgés », méchant coup de pied contre l’Unité du Nouveau Front populaire donné par Mélenchon dans la campagne législative. Soulignons que l’électorat de gauche ne s’est pas trompé : dans 3 circonscriptions sur 4, le candidat officiel de la camarilla qui dirige avec ses méthodes bonapartistes la tête du mouvement « gazeux » a été mis en minorité par les candidats opposants, plus exactement « purgés ».
C’est un point important : Mélenchon n’est pas parvenu à couper la tête de ses opposants. Combattre pour l’exigence de démocratie dans LFI en particulier, et dans la gauche en général part sur des bases représentatives, incluant plusieurs parlementaires, et toute une série de petits élus dans les communes. Ce n’est pas rien ! C’est la première fois dans l’histoire du Front de Gauche puis dans celle de FI que cela prend cette dimension.
Nous sommes à un tournant : avant, les opposants étaient laissés dans l’ornière et n’avaient le plus souvent guère de moyens de réagir. Le mélenchonisme entrera dans l’histoire comme le courant politique qui a cassé le meilleur d’une génération. Par ailleurs, on note dans l’intervention en particulier de Rachel Garrido, Alexis Corbière et Danielle Simonnet l’ouverture en direction des réseaux de militants politiques. Par ailleurs, si François Ruffin n’a pas pour l’instant rejoint l’association, Guillaume Ancelet, président de Picardie Debout était dans les présentateurs de l’association.
Danielle Simonnet est intervenue sur le rapport du mouvement syndical au pouvoir macronien et sur la nécessité de l’auto-organisation des comités divers qui peuvent se constituer à la base du nouveau Front Populaire. Point important qu’elle a développé dans le texte « Comprendre la purge » publié dans la revue Regards que je joins à ce message. Sur la question des syndicats et des rapports entre la représentation et le mouvement des masses dans la bataille des retraites, elle écrit en particulier ceci :
« 2023 : mouvement contre la réforme des retraites. On bat le pavé des mois durant. Illustrant une conception de LFI comme substitutiste vis-à-vis du mouvement social, en janvier, Jean-Luc Mélenchon pense qu’il est en situation de prendre la direction du mouvement sans médiation, en direct avec le peuple. Il lance sa propre manifestation. Erreur d’appréciation, la mobilisation est très en deçà des capacités de mobilisation de l’intersyndicale. Celle-ci demeure unie et rythme le mouvement par des mobilisations massives. »
La remise en cause, qui fut un échec dans la grève des retraites de la stratégie d’une manifestation ratée FI en lieu et place du front syndical commun, est une position de type national-populiste: il y a le leader et le peuple. Pas de corps intermédiaires ! Je ne dirai pas à quels mauvais souvenirs dans l’histoire du mouvement ouvrier cela me fait penser…
Il convient d’ajouter qu’après la dissolution éclair de la chambre, les masses et la jeunesse se sont saisies du cadre de mobilisation offert par les syndicats sur le mot d’ordre de Nouveau Front Populaire. Ce sont eux qui ont vertébré le mouvement populaire, singulièrement la CGT, avec en première ligne les cheminots, et la FSU. A l’avenir il faudra regarder à la loupe les rapprochements FSU-CGT. Je l’ai testé dans ma circonscription du 66 où c’est un cheminot CGT qui pose la question du soutien, mais aussi du contrôle de la politique du NFP. Autre résultat impressionnant, celui de mon ancienne circonscription où trônait depuis 1997 Nicolas Dupont Aignan, qui avait créé son empire régional sur la base de l’effondrement électoral de la gauche mitterandiste. C’est un cheminot CGT qui, en rupture avec la ligne mélenchonienne de 2022, a fait une campagne en direction des milieux populaires, en ciblant Dupont Aignan sur ses accords avec le RN. La ligne mélenchonienne de 2022 l’avait interdit. Ce fut une belle victoire !
Dans les interventions de d’Alexis Corbière et de Rachel Garrido en particulier le combat pour consolider l’unité du nouveau Front Populaire, la nourrir est l’orientation de fond : l’Unité, comme ligne stratégique à long terme. En fait, les Insurgés (ou synthèse de Insoumis et Purgés) se pensent dans l’horizon de l’Après Vème République. Corbière a reposé dans son propos la question de la laïcité. C’est constant chez lui, alors que la direction de FI est communautariste, compromise avec « les Indigènes de la République ». Il n’a pas fait mystère d’ajouter que le combat pour consolider le nouveau Front Populaire a besoin de la construction d’une organisation politique. Rachel Garrido s’est centrée sur la question des institutions et du pouvoir présidentiel, en rappelant les dénis de démocratie par l’utilisation du 49-3 dans l’affaire des retraites, alors que 80% de l’électorat était contre la loi Macron. L’ Après, c’est forcément le retour de la démocratie sociale et politique face au crépuscule mortifère de la Vème République, avec ses néo-fascistes en embuscade. Corbière a utilisé le terme de « pouvoir constituant ». Se penser dans l’Après Vème République, c’est forcément aussi se penser dans l’Après Mélenchon.
Si la conférence de presse n’a pas abordé les problèmes internationaux et de la guerre, il faut souligner la position courageuse développée dans le texte de Simonnet dans la revue Regards :
« Au Parlement européen, les député.es LFI ont voté pour l’aide y compris militaire à l’Ukraine, mais les député.es français ont été plus discret.es et LFI n’a pas participé aux manifestations des anniversaires de la guerre en février 2023 et 2024. Rappelons que Jérôme Legavre, député LFI membre du Parti ouvrier indépendant (POI), est intervenu à l’Assemblée nationale contre tout soutien à l’Ukraine, c’est-à-dire hors des clous de la ligne LFI, mais sans être sanctionné. Enfin, les propositions d’issues s’en tiennent à la diplomatie et la conférence des frontières, outre qu’elle porte le risque d’acter un rapport de force aujourd’hui favorable aux Russes, tend à effacer l’exigence du retrait des troupes russes ou le soutien aux mobilisations populaires ukrainiennes. »
Ajoutons la dénonciation d’un lien privilégié entre la direction de FI et le POI lambertiste, faisant office de police politique :
« Ajoutons l’influence grandissante du POI, préposé aux basses œuvres depuis l’affaire Adrien Quatennens (une pleine page pour sa défense en septembre 2022 dans l’inénarrable journal Informations ouvrières) et véritable garde prétorienne de Jean-Luc Mélenchon. Voilà une organisation qui ne relève pas du meilleur des traditions du mouvement ouvrier (accusations, invectives, fichage de militant.es … ) ».
On ne peut qu’approuver.
Dans ce même texte Danielle Simonnet souligne le caractère ordurier de la campagne mené contre les opposants dans les circonscriptions, alors que peu de moyens ont été mis en œuvre pour sauver la circonscription de Rachel Kéké. Pour ceux qui ne le savent pas, Rachel qui est franco-ivoirienne est une militante qui a mené une longue bataille syndicale et judiciaire pour faire reconnaître, étant elle-même femme de ménage, les droits des ouvrières du groupe des Hôtels ACCOR. Elle a gagné cette bataille et dans son prolongement elle a mis en minorité une ministre de Macron en 2022. Bien qu’elle soit arrivée en tête au 1ertour avec 43%, elle a dû affronter la digue d’un accord entre les macronistes et le RN. Une femme de ménage à l’assemblée cela fait désordre, n’est-ce pas ?
Comme je rejoins dans l’ensemble le positionnement des Insurgés pour consolider le nouveau Front Populaire et ouvrir la perspective d’une force politique démocratique, sociale, écologique et laïque, je rejoins l’Après.
RD, 14 juillet 2024.
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