À l’Assemblée nationale, l’élection de Yaël Braun-Pivet face à André Chassaigne vue des coulisses

French Member of Parliament (MP) for the Renaissance ruling party and newly reelected National Assembly president Yael Braun-Pivet reacts after being reelected following the third round to elect lower house' President at the France's National Assembly in Paris on July 18, 2024. The new MPs meet for the first time on July 18, 2024 to elect the President of the National Assembly, in the deeply fragmented lower house after the leftwing coalition defeated the far-right in general elections with no group winning an absolute majority. (Photo by Bertrand GUAY / AFP)

L’élection censée clarifier la situation politique issue des législatives a vu les trois mêmes blocs s’affronter. Et à la fin de la journée, chacun campe sur ses positions.

POLITIQUE – Une dissolution, des législatives anticipées… et à la fin, Yaël Braun-Pivet au Perchoir, encore. L’élection de la présidence de l’Assemblée s’est achevée ce jeudi 18 juillet vers 20h30 par la réélection de la députée (Ensemble pour la République) des Yvelines. L’épilogue d’une journée qui a commencé dans le flou et se finit sans faire disparaître totalement le brouillard politique actuel.

LIRE AUSSI

14h au Palais Bourbon, personne ne se livre au moindre pronostic. L’ancien patron du groupe LR Olivier Marleix arbore ostensiblement un livre : La Grande Peur de juillet 1789 de l’historien Jean-Clément Martin. « Il y a dedans tous les éléments d’un moment d’instabilité », sourit-il. À l’ouverture de la séance à 15h, six candidats sont en lice : Yaël Braun-Pivet (Ensemble pour la République), Naïma Moutchou (Horizons), Philippe Juvin (La Droite Républicaine, ex-LR), Charles de Courson (Liot), André Chassaigne (NFP) et Sébastien Chenu (RN).

« Combines » et faiseurs de roi

Devant la presse, les ministres-députés macronistes se font discrets. Prisca Thevenot et Olivia Grégoire entrent par les jardins et traversent la foule de journalistes mais ne s’expriment pas. « Pour l’instant, je ne vous dis rien », esquive aussi Aurélien Pradié. À gauche, le NFP veut croire à la capacité de son candidat à capter des voix hors de son camp mais redoute aussi des « combines »« Soit il y a une présidence légitime qui représente la première force de l’Assemblée, le NFP, soit il y a une combine et une présidence imméritée. Pas illégale mais illégitime », anticipe la députée insoumise Aurélie Trouvé au HuffPostDes rumeurs ont circulé sur des échanges entre l’extrême droite et la présidente sortante ; la députée de Seine-Saint-Denis s’inquiète d’un possible accord.

Il n’aura pas lieu. Le premier tour voit Yaël Braun-Pivet (124 voix) devancée par le communiste André Chassaigne (200 voix) et Sébastien Chenu (142 voix). Les candidats Horizons, Liot et La Droite Républicaine sont loin derrière, avec moins d’une cinquantaine de voix chacun.

Naïma Moutchou et Philippe Juvin se désistent aussitôt, sur fond d’accord entre la droite et le camp présidentiel. Sébastien Chenu se maintient, tout comme Charles de Courson. Dans cette configuration, le deuxième tour n’est pas passé que le troisième semble inéluctable. Les 18 députés Liot seront-ils faiseurs de roi ? Devant la presse, le député de Guadeloupe Olivier Serva insiste sur l’équilibre gauche-droite de son groupe. Aucune consigne de vote ne sera passée, comprend-on. « À partir du moment où l’on décide de se désister, le “L” de Liot (Libertés, ndlr) prend toute sa splendeur », fait-il valoir. Dans les couloirs, quelques élus de gauche se livrent à des pronostics avec les journalistes mais les discussions tournent en rond : l’issue du scrutin est difficile à anticiper.

Les résultats du deuxième tour tombent enfin. Yaël Braun-Pivet récolte 210 voix, André Chassaigne 202 et Sébastien Chenu 143.

« L’âge d’André Chassaigne va nous servir » (ou pas)

Les craintes de la gauche sur un pacte entre RN et macronistes (et donc contre le NFP) vont-elles se vérifier ? Le suspense est de courte durée. Dans l’hémicycle, Sébastien Chenu répond « oui » quand le doyen RN de l’Assemblée et président de séance lui demande s’il se maintient. Charles de Courson (12 voix) se désiste. Le troisième tour du scrutin verra donc s’affronter les trois mêmes blocs qu’au soir du 7 juillet : gauche, extrême droite et une coalition présidentielle appuyée par la droite.

« Tout reste possible », veut croire l’insoumis Éric Coquerel. Qui ajoute, mi-sérieux mi-amusé : « L’âge d’André Chassaigne va nous servir ». Selon le règlement de l’Assemblée nationale, en cas d’égalité entre les candidats au troisième tour, la victoire revient au plus âgé. Le cas ne s’est jamais produit, mais la remarque est révélatrice : le dernier tour va se jouer à quelques voix près.

Avant que les résultats officiels ne tombent, des murmures circulent : une dizaine de voix séparent Braun-Pivet de Chassaigne. L’insoumis Hadrien Clouet hausse les épaules, désabusé. Mais l’argumentaire change : « l’illégitimité » d’une élection de Yaël Braun-Pivet avec des voix du RN est remplacé par celui sur « la légalité » d’un scrutin où des ministres du gouvernement démissionnaire ont voté.

Au final, ce sera treize voix, à l’avantage de la candidate Renaissance. La gauche ne cherche pas à masquer sa colère. Un recours est-il possible, alors que les interprétations de la Constitution divergent sur ce point ? Un député insoumis l’évoque, mais un écologiste hausse les épaules, peu convaincu.

Devant la presse, les présidents de groupe de gauche sont unanimes. « Le vote des Français et des Françaises (du 7 juillet, ndlr) a été volé par une alliance contre nature » pour André Chassaigne, quand Mathilde Panot estime que « le vote de rupture » exprimé au second tour n’est pas représenté dans l’hémicycle onze jours plus tard. Le Nouveau Front populaire réaffirme sa légitimité à briguer Matignon et exhorte Emmanuel Macron à sortir du « déni ». Sans garantie d’être entendu. Juste avant leurs prises de parole, le Premier ministre démissionnaire Gabriel Attal est passé devant la presse, tout sourire.

LIRE AUSSI
Ce champ est nécessaire.

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*