Aux États-Unis, le retour du fascisme et du backlash écologique

REporterre

6 novembre 2024

Le candidat républicain Donald Trump a dépassé la majorité absolue de 270 grands électeurs à la Chambre des représentants, devançant largement sa rivale démocrate, Kamala Harris. Un « désastre », dit une écologiste.

Le républicain ultraconservateur Donald Trump est en route pour retrouver les clés de la Maison-Blanche. Le résultat final de ce scrutin sera d’une importance capitale pour le climat et la géopolitique mondiale. Donald Trump a remporté vingt-six États, dont trois des sept États considérés comme « pivots » pour l’élection. À 9 heures (heure française), le mercredi 6 novembre, Emmanuel Macron a été parmi l’un des premiers leaders politiques à le féliciter pour sa victoire. Les jours qui s’annoncent vont être décisifs. Reporterre retrace les derniers instants où tout a basculé.

« Beaver County, ça sent très bon pour Donald Trump ! » Sur CNN, l’animateur John King va finir par attraper un torticolis ou une crampe au doigt, à force d’appuyer nerveusement sur chaque comté en train de se colorer en rouge républicain sur la carte interactive, avant de fixer le téléspectateur.

Stressée, Lena Moffitt, la directrice générale d’Evergreen, une des voix qui portent parmi les associations environnementales aux États-Unis, le fixe en retour, entourée de sa famille et d’une montagne de popcorn. « Je regarde CNNFOXMSNBC et la BBC sur un écran divisé en quatre. Je sens l’anxiété monter », nous dit-elle. « On est au milieu d’une décennie décisive pour le climat. Si Trump revient aux commandes, ça sera un désastre. »

Peur sur l’Arctique

23 h 30, heure de l’est des États-Unis. « On a une nouvelle prévision ! », tonne le présentateur de CNN, Jake Tapper. L’État clé de la Caroline du Nord vient de tomber dans l’escarcelle du républicain. Le suspense n’a pas encore mis les voiles, mais la nuit semble bien embarquée, côté trumpiste.

Depuis le Vermont, Melodie Brown Burkins regarde la soirée électorale, entourée de son mari et de sa mère. Elle échange en permanence par texto avec ses deux fils, qui ont voté pour la première fois.

La professeure en études environnementales de l’Université Dartmouth s’angoisse du retour du milliardaire aux manettes du pays : « Trump a annulé ou reculé sur plus de 100 politiques qui réglementent la pureté de l’air, de l’eau ou de la biodiversité. »

Spécialiste de l’Arctique, elle redoute qu’il démantèle à nouveau les partenariats stratégiques pour la défense des écosystèmes de la région et qu’il augmente les investissements « non éthiques et à courte-vue du développement économique de l’Arctique, qui ne respectent ni les communautés locales, ni la science, ni l’expertise des autochtones ».

Pression sur l’Europe

Jake Tapper s’époumone à nouveau. Le Michigan, un autre État clé, vire progressivement au rouge. Samuel Stolper, professeur en politiques environnementales de l’Université du Michigan, prédit « un changement énorme » dans la trajectoire étasunienne de protection de l’environnement.

« Trump va faire massivement reculer la décarbonation du pays et la justice climatique mondiale. Il va notamment chercher à faire annuler l’IRA — la loi sur la réduction de l’inflation, qui implique des investissements records en décarbonation — et va exposer les écosystèmes protégés à des risques beaucoup plus importants. »

« Trump va faire massivement reculer la justice climatique mondiale »

Son confrère Henrik Selin, professeur en relations internationales et spécialiste de la coopération environnementale à la Boston University, estime cependant que l’IRA a été assez bien construite pour ne pas être détricotée aisément. « Elle a déjà prouvé son efficacité, en matière d’emplois créés. Il ne voudra pas et ne pourra pas la supprimer facilement. »

Barry Rabe, professeur en environnement à l’Université du Michigan, assure que Donald Trump, de retour dans le bureau ovale, va sortir à nouveau de l’Accord de Paris, et que son arrivée va mettre davantage la pression sur l’Europe, comme « leader mondial de la lutte contre les changements climatiques ».

Le changement climatique, « qui en a quelque chose à faire ? »

1 h du matin. À la télévision, Donald Trump surnage dans les estimations des batailles serrées des États clés restants, comme la Pennsylvanie, même si aucune grande chaîne n’avait encore officialisé le tout. Qu’importe, Trump s’apprête à prendre la parole et à revendiquer sa victoire.

Le 1er novembre, il avait évoqué le changement climatique, en parlant de la hausse du niveau des océans. Une prise de conscience ? Non, c’était pour s’en moquer : « Qui en a quelque chose à faire ? »

Décourageant ? Lena Moffitt ne s’avoue pas vaincue : « Si ce matin, je me réveille à nouveau dans l’Amérique de Donald Trump, je me sentirai triste pour la planète et la démocratie. Mais je suis prête à travailler encore plus fort pour que la voix de la majorité des Américains qui croient au changement climatique se fasse entendre. »

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