Affaire Bismuth : Nicolas Sarkozy hérite d’un an de bracelet électronique

Justice

Le pourvoi de l’ex-président, condamné pour corruption dans l’affaire Bismuth, a été rejeté ce mercredi par la Cour de cassation. Sa condamnation à un an de prison ferme, aménagée en surveillance électronique, est définitive.

Michel Deléan

Pour la première fois en France, un ancien chef de l’État va donc être muni d’un bracelet électronique à la cheville, et devra demander des autorisations pour ses déplacements. Le pourvoi de Nicolas Sarkozy, condamné pour des faits de corruption active et de trafic d’influence dans l’affaire Bismuth, vient en effet d’être rejeté par la Cour de cassation, mercredi 18 décembre.

L’ancien président de la République est définitivement reconnu coupable d’avoir, en 2014, utilisé son avocat et ami, Thierry Herzog, et un haut magistrat de la Cour de cassation, Gilbert Azibert, afin d’obtenir illégalement des informations sur des enquêtes judiciaires en cours, et d’avoir, en contrepartie, appuyé la candidature du même Azibert pour un poste sous le soleil de Monaco.

Les journées à venir risquent fort d’être humiliantes pour l’ex-président. Condamné définitivement à trois ans de prison dont un an ferme, peine aménagée sous le régime de la surveillance électronique, Nicolas Sarkozy va devoir se plier à des procédures contraignantes. Un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme n’y changera rien.

Nicolas Sarkozy lors d’une remise de décoration à Cassis le 22 novembre 2024. © Photo Alain Robert / Sipa

Soumis au régime de « détention à domicile sous surveillance électronique », l’ancien chef de l’État sera d’abord convoqué par un juge de l’application des peines parisien, auquel le parquet aura transmis la procédure. C’est ce magistrat qui fixera les modalités d’exécution de la détention à domicile : lieu d’assignation, date effective de surveillance, horaires de sortie autorisés, etc. Toutes les demandes de déplacement en région ou à l’étranger de l’ex-président devront également être soumises à l’autorisation de ce magistrat.

Nicolas Sarkozy sera ensuite convoqué au service pénitentiaire d’insertion et de probation (Spip), où un agent lui posera un bracelet électronique à la cheville. Enfin, un agent pénitentiaire se rendra à son domicile parisien pour y installer un boîtier électronique de réception, et définir le périmètre au-delà duquel l’alarme se déclencherait en cas de non-respect des horaires de sortie définis.

En cas d’incident, un agent du pôle centralisateur de surveillance électronique devrait demander aussitôt des explications à Nicolas Sarkozy, lui rappeler ses obligations, et faire un rapport d’incident adressé au juge d’application des peines et au service d’insertion et de probation.

2025 sera décidément une annus horribilis pour Nicolas Sarkozy. Il doit en effet comparaître devant le tribunal correctionnel de Paris du 6 janvier au 10 avril prochains pour le procès de ses financements libyens, durant lequel il devra répondre d’accusations de corruption, d’association de malfaiteurs, de recel de détournements de fonds publics et de financement illégal de campagne électorale. S’il est placé sous bracelet électronique avant le 6 janvier, il bénéficiera des autorisations de sortie nécessaires pour se rendre aux audiences du tribunal.

Dernière humiliation : condamné également à trois ans de privation des droits civils et civiques dans l’affaire Bismuth, Nicolas Sarkozy ne pourra pas voter à la prochaine élection présidentielle. Il est, à ce jour, le premier président français définitivement condamné pour des faits de corruption. Jacques Chirac avait pour sa part été reconnu coupable de détournements de fonds publics et d’abus de confiance, dans l’affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris. Triste privilège de la droite française, deux anciens premiers ministres, Alain Juppé et François Fillon, ont, eux aussi, été condamnés pour des atteintes à la probité.

Confirmation de la décision en appel

La décision rendue par la Cour de cassation ce 18 décembre n’est pas une surprise, la procédure Bismuth ayant déjà été purgée en amont à plusieurs reprises. Outre le pourvoi de Nicolas Sarkozy, ceux de l’ancien magistrat Gilbert Azibert et de l’avocat Thierry Herzog ont également été rejetés.

La chambre criminelle a rejeté tous les arguments de procédure soulevés par les avocats de Nicolas Sarkozy. Ils avaient notamment mis en cause tardivement l’impartialité de l’un des juges de la cour d’appel, mais sans avoir demandé sa récusation à l’époque du procès. Les avocats de Nicolas Sarkozy avaient aussi plaidé la nullité de l’instruction Bismuth, au motif qu’elle comportait des irrégularités. La Cour de cassation a validé le choix de la cour d’appel, qui a estimé que ces irrégularités auraient pu être soulevées avant le procès, et que l’existence d’irrégularités procédurales postérieures à l’instruction n’est pas avérée.

Nicolas Sarkozy et Thierry Herzog soutenaient par ailleurs que les conversations entre un avocat et son client, au cœur de l’affaire Bismuth, n’auraient pas dû être écoutées. La Cour de cassation a répondu que ces écoutes n’avaient pas été annulées, et qu’elles sont régulières si elles laissent penser que l’avocat participe à une infraction pénale, ce qui est le cas en l’espèce.

Enfin, comme le tribunal correctionnel et la cour d’appel, la chambre criminelle a considéré que les délits de corruption et de trafic d’influence étaient bien constitués.

Nicolas Sarkozy est donc définitivement condamné. Il a aussitôt annoncé sur le réseau social X un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme, ce que ses avocats avaient déjà évoqué après la décision de la cour d’appel en mai 2023.

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