LA «MARCHE SUR ROME» DE L’EXTRÊME-CENTRE

Le monde politique français est une gigantesque farce, et François Bayrou en est une incarnation.
Devinez qui qualifiait Emmanuel Macron de candidat des «forces de l’argent» qui représente les «grands intérêts financiers» ? François Bayrou en 2016. Il voyait derrière le candidat «une tentative des grands intérêts financiers et autres, qui ne se contentent pas d’avoir le pouvoir économique, mais qui veulent avoir le pouvoir politique». Clairvoyant.
La même année, il assurait : «Je ne me reconnais pas dans ce qu’Emmanuel Macron incarne». Avant de rejoindre son camp et de faire campagne pour lui.
L’extrême-centre, c’est une tendance politique vide, capable de dire tout et son contraire, pour finalement appliquer une politique de droite extrême une fois au pouvoir. C’est ce que nous subissons depuis des années.
Simone Veil, la célèbre ministre de droite et ancienne collègue de François Bayrou disait déjà au début des années 2000 : «Bayrou, c’est pire que tout», et le qualifiait d’«illuminé». Elle ajoutait : «Le personnage demeure incompréhensible si l’on ne tient pas compte de cette donnée essentielle : il est convaincu qu’il a été touché par le doigt de Dieu pour devenir président. C’est une idée fixe, une obsession à laquelle il est capable de sacrifier principes, alliés, amis. Comme tous ceux qui sont atteints de ce mal, il se figure les autres à son image : intrigants et opportunistes».
Une fois ce portrait posé, intéressons-nous à la scène chaotique et révélatrice qui a précédé la nomination de Bayrou vendredi 13 décembre. Il s’agit d’un coup d’État dans le coup d’État, dans le registre du ridicule.
On le sait, après avoir perdu plusieurs élections d’affilée, Macron piétine le résultat du dernier scrutin depuis le mois de juillet et a d’abord décidé de nommer Michel Barnier, membre de LR, force politique la plus minoritaire à l’Assemblée. Sans surprise, ce gouvernement est tombé en trois mois. Mais puisqu’il est hors de question pour le Président de nommer quiconque issue de la gauche, même la plus tiède, Macron a choisi un membre de sa propre équipe pour le remplacer. Premier coup de force.
Et au sein même du macronisme, un amusant deuxième coup de force a eu lieu. Si les Guignols de l’Info avaient scénarisé l’épisode, personne n’y aurait cru tellement c’est gros.
En bon manager toxique, Macron a fait croire à son fidèle Bayrou qu’il allait le nommer. Tout était prêt, les médias au garde à vous, le récit officiel était calé. Mais à 8h30 vendredi matin, Macron a finalement annoncé à son allié qui trépignait d’impatience qu’il avait changé d’avis au dernier moment. Macron aime humilier ses plus proches fidèles. Le Monde parle d’un «échange tendu entre les deux hommes». Le président avait finalement opté pour Rolland Lescure, ancien socialiste devenu ultra-libéral.
Nouveau revirement une heure plus tard, les médias annonçaient la nomination de Bayrou. Le Monde révèle que ce dernier, «furieux de l’évolution des discussions, a menacé de quitter la “majorité”, ce qui a poussé Macron à le nommer». Sans le Modem, Macron déjà minoritaire se serait retrouvé privé de 30 députés centristes, et plus isolé que jamais, voire contraint de quitter le pouvoir.
Il a donc dû céder. Bayrou aurait même «menacé de tout faire sauter s’il n’était pas nommé» selon BFM. Une sorte de remake de la Marche sur Rome des fascistes italiens, version extrême-centre et grotesque.
Rappelons par ailleurs que le nouveau Premier Ministre est toujours mis en examen pour des faits de détournement de fonds européens, utilisés pour rémunérer des assistants parlementaires qui travaillaient en réalité pour l’UDF, puis le MoDem. Lors d’un premier procès qui a eu lieu l’an dernier, le tribunal a bien reconnu le détournement de fonds publics, mais a relaxé François Bayrou «au bénéfice du doute». Le doute fait bien les choses. Le parquet a fait appel, et Bayrou reste toujours poursuivi.
En 2017, Emmanuel Macron promettait qu’«un ministre doit quitter le gouvernement lorsqu’il est mis en examen». Si Bayrou est encore Premier Ministre au moment du procès, ce serait la première fois de l’histoire qu’un chef du gouvernement en exercice est jugé.
Le petit coup de pression interne au clan Macron est rocambolesque, mais il montre surtout l’extrême faiblesse de Macron, autocrate mégalomane et capricieux, qui doit finalement céder à un micro-parti qui fait partie de sa coalition minoritaire, pour ne pas perdre totalement pied.
Le Roi est nu, plus que jamais.
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