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En commission mixte paritaire, quatorze parlementaires des deux chambres ont adopté le budget sans modifier les grands équilibres austéritaires votés la semaine précédente au Sénat. À gauche, le Parti socialiste a certes obtenu quelques concessions, mais peu significatives.
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Vendredi 31 janvier, aux alentours de 13 heures, la commission mixte paritaire (CMP) a donné son verdict sur le projet de loi de finances (PLF) 2025. Composée de sept député·es et de sept sénateurs et sénatrices, dont huit de la droite et du centre soutenant le gouvernement Bayrou, quatre de la gauche et deux de l’extrême droite, la CMP s’est avérée conclusive et a adopté le texte sorti le 23 janvier du Sénat.
S’ils ont certes opéré quelques modifications, les parlementaires n’ont toutefois pas changé les grands équilibres austéritaires du texte. La CMP a ainsi acté pour 2025 des coupes de 23,4 milliards d’euros dans le budget de l’État par rapport au budget adopté pour 2024, soit quasiment le même niveau que ce qui avait été voté au Sénat. À cela il faut ajouter 2 milliards de coupes pour le budget dédié aux collectivités locales et plus de 8 milliards pour la Sécurité sociale, dont le projet de loi de financement est certes encore en discussion au Parlement.
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Le volet consacré aux recettes fiscales a lui aussi été adopté pour des montants similaires à ceux votés par la chambre haute. La CMP édicte notamment le fait que la « surtaxe » exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises, censée rapporter 8 milliards d’euros en 2025, ne s’appliquera pas en 2026 comme c’était pourtant prévu dans le projet de budget de Michel Barnier à l’automne 2024.
La taxe sur les hauts revenus – plus de 500 000 euros par an pour un couple –, censée rapporter 2 milliards en 2025, s’appliquera de son côté via un système d’acompte. Enfin, la taxe sur les transactions financières voit son taux relevé de 0,3 à 0,4 %. Beaucoup moins que ce que la gauche demandait.
À ce stade, l’effort budgétaire global est donc toujours supérieur à 50 milliards d’euros pour 2025, dont les deux tiers sont des baisses de dépenses publiques. Une cure d’austérité historique destinée à compenser les errements des gouvernements précédents Borne et Attal, qui ont laissé les déficits publics se creuser sans comprendre pourquoi.
Selon Les Échos, le texte issu de la CMP aboutirait à un déficit de seulement 5,3 % de PIB, contre 6,1 % en 2024, soit un peu moins que les 5,4 % espérés par le ministre de l’économie et des finances Éric Lombard. Bref, « globalement ce qui était sorti du Sénat est préservé », a déclaré le président insoumis de la commission des finances de l’Assemblée, Éric Coquerel, à la sortie de la CMP.
Censurera ou ne censurera pas ?
Cependant, tout l’intérêt des discussions de cette CMP qui se sont tenues les 30 et 31 janvier n’était pas de savoir si les grands équilibres de ce projet de budget allaient être modifiés. Sa finalité austère et donc mortifère pour l’économie ne faisait aucun doute.
L’attention était davantage portée sur d’éventuels éléments de fond qui auraient pu donner envie au Parti socialiste (PS) à gauche ou au Rassemblement national (RN) à l’extrême droite de censurer le gouvernement la semaine prochaine.
Le texte du budget 2025 revient en effet à l’Assemblée nationale lundi 3 février à 16 heures pour être entériné. Et il y a fort à parier que l’article 49-3 sera dégainé rapidement par François Bayrou et qu’une motion de censure sera déposée dans la foulée.
Côté RN, c’est l’adoption de l’article 4 du PLF 2025, qui réforme le dispositif de l’Arenh (pour l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique), qui a suscité le 30 janvier une menace de censure. « La présence de cet article a toujours été une ligne rouge », a prévenu le député RN Jean-Philippe Tanguy, qui siégeait à la CMP.
La gauche comme l’extrême droite s’étaient élevées à l’automne dernier contre cet article qualifié d’« usine à gaz » et qui ne résoudra en rien des problèmes d’inflation des factures énergétiques et de libéralisation du marché de l’électricité en Europe.
Cependant, la menace du RN ne semble pas très vindicative car Jean-Philippe Tanguy a botté en touche en sortie de CMP, indiquant que ce sont « Marine Le Pen et Jordan Bardella qui arbitreront » lundi de la censure ou non du RN.
Pour ce qui concerne le PS, la stratégie était d’obtenir des concessions, notamment celles promises par François Bayrou. Dès jeudi, le député PS Philippe Brun, également membre de la CMP, se félicitait d’avoir obtenu plusieurs modifications, comme par exemple le « rétablissement » des 4 000 postes d’enseignant·es que le budget Barnier prévoyait de supprimer, la « remise en place » de l’Agence bio, ou encore « 300 millions d’euros de moyens supplémentaires » pour le fonds vert destiné aux collectivités locales.
En revanche, au sujet de l’aide médicale de l’État (AME), un dispositif permettant aux étrangers et étrangères en situation irrégulière de bénéficier d’un accès aux soins, le PS a subi un véritable camouflet. Le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, Boris Vallaud, avait toujours dit que la « sanctuarisation » de l’AME était l’une « des conditions absolument sine qua non » pour que le gouvernement évite la censure du PS.
Mais la CMP a in fine raboté de 111 millions d’euros – le texte du Sénat proposait 200 millions –, en tenant compte de l’inflation, les crédits alloués à l’AME pour porter son budget à 1,2 milliard d’euros, laissant ainsi les idées d’extrême droite infuser dans le budget de 2025. « Dans un climat où le premier ministre parle de “submersion”, cela marque le début d’une pente [glissante]… », déplore l’Insoumis Éric Coquerel.
Les socialistes, qui semblent – comme le RN – ne pas avoir une envie débordante de censurer le gouvernement de François Bayrou la semaine prochaine, devront donc assumer cette concession budgétaire faite à l’extrême droite et au ministre de l’intérieur Bruno Retailleau. Pas simple…
Tout comme, du reste, laisser vivre un gouvernement portant un budget qui n’a strictement rien à voir avec le programme du Nouveau Front populaire (NFP) sur lequel ils se sont fait élire il y a six mois. Programme qui brandissait comme priorités, rappelons-le, la hausse du Smic, l’abrogation de la réforme des retraites, une hausse significative de la taxation des plus riches, et des investissements massifs dans les services publics et la planification écologique. Il n’y a rien de tout cela dans le budget 2025.
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