
Syrie: plus de 100 morts en deux jours de violences à caractère confessionnel, un chef druze dénonce des «massacres»
La plus haute autorité spirituelle des druzes de Syrie a dénoncé, jeudi 1er mai, une « campagne génocidaire » contre sa communauté. Il s’en est pris au pouvoir d’Ahmed al-Charaa, après des combats confessionnels ayant fait plus de 100 morts en deux jours, selon une ONG.
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Ces affrontements près et au sud de Damas entre combattants druzes et groupes armés liés au pouvoir sunnite illustrent l’instabilité persistante en Syrie, près de cinq mois après le renversement du président Bachar el-Assad, issu de la minorité alaouite.
Dans un communiqué, cheikh Hikmat al-Hajri a dénoncé une « campagne génocidaire injustifiée » visant des « civils à leur domicile » et a réclamé « une intervention immédiate de forces internationales ». « Nous ne faisons plus confiance à une entité qui prétend être un gouvernement (…) Un gouvernement ne tue pas son peuple en recourant à ses propres milices extrémistes, puis, après les massacres, prétend que ce sont des éléments incontrôlés ». « Un gouvernement protège son peuple », a-t-il conclu.
Les combats à Jaramana et Sahnaya, où vivent des chrétiens et des druzes, ainsi qu’à Soueïda à majorité druze, ont réveillé le spectre des massacres qui ont fait début mars plus de 1 700 morts, en grande majorité des membres de la minorité alaouite. Les violences avaient été déclenchées par des attaques des pro-Assad contre les forces de sécurité. Affirmant vouloir défendre les druzes, Israël, pays voisin de la Syrie avec laquelle il est techniquement en guerre, a menacé de frapper le pouvoir syrien en cas de nouvelles violences contre cette minorité.
Les druzes sont une minorité ésotérique issue de l’islam chiite et ses membres sont répartis notamment entre le Liban, la Syrie et Israël. Les alaouites sont une autre branche minoritaire de l’islam, tandis que le sunnisme et le chiisme en sont les deux principaux courants.
Plus de 100 morts en deux jours, dont une majorité de druzes
Les combats ont été déclenchés lundi soir par une attaque de groupes armés affiliés au pouvoir contre Jaramana, après la diffusion sur les réseaux sociaux d’un message audio attribué à un druze et jugé blasphématoire à l’égard du prophète Mahomet. L’AFP n’a pas pu vérifier l’authenticité du message. Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), 101 personnes sont mortes dans les heurts confessionnels.
Des accords entre représentants des druzes et du pouvoir ont permis de rétablir le calme mardi soir à Jaramana, une banlieue de Damas, et mercredi soir à Sahnaya, à 15 km au sud-ouest de Damas, où des forces de sécurité ont été déployées. Les autorités syriennes avaient averti qu’elles « frapperaient d’une main de fer tous ceux qui cherchent à saper la stabilité de la Syrie », accusant des « groupes hors-la-loi » d’avoir provoqué les violences.
Le pouvoir syrien a dans ce contexte réaffirmé son « engagement ferme à protéger toutes les composantes du peuple syrien, y compris la communauté druze ». Il a aussi exprimé « son rejet catégorique de toute ingérence étrangère » après l’intervention militaire israélienne. Israël a mené plusieurs frappes affirmant cibler des objectifs du pouvoir syrien.
« Morceler la région en entités confessionnelles »
Au Liban voisin, le chef druze libanais, Walid Joumblatt, a accusé Israël d’instrumentaliser les druzes de Syrie. « Israël continue de vouloir appliquer son plan de toujours (…) consistant à morceler la région en entités confessionnelles et étendre le chaos », a-t-il déclaré fin mars.
Dès la chute de Bachar el-Assad le 8 décembre, renversé par une coalition de factions rebelles islamistes dirigée par Ahmed al-Charaa après plus de treize ans de guerre civile, Israël a multiplié les gestes d’ouverture envers les druzes. Mais les dignitaires druzes ont réaffirmé leur attachement à l’unité de la Syrie et rejeté les menaces israéliennes contre le pouvoir syrien.
La France a condamné « les violences confessionnelles meurtrières à l’encontre des druzes en Syrie » et appelé « Israël à ne pas conduire d’actions unilatérales susceptibles d’aggraver les tensions communautaires ».
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