Du charbon d’Afrique du Sud brûlé dans la centrale biomasse de Gardanne

Du charbon d’Afrique du Sud brûlé dans la centrale biomasse de Gardanne

Reporterre.net

16 mai 2025 

Jusqu’à 10 % du combustible de la centrale biomasse de Gardanne est constitué de charbon importé d’Afrique du Sud, a découvert Reporterre. La structure avait pourtant assuré être sortie du charbon en 2020.

Marseille (Bouches-du-Rhône), correspondance

C’est une centrale qui dit produire de l’électricité renouvelable, mais qui a brûlé 18 900 tonnes de charbon d’Afrique du Sud en 2022 [1] et qui continue à utiliser ce type de combustible importé. Reporterre a découvert cette contradiction à la lecture du dossier de l’enquête publique, ouverte jusqu’au 6 juin, sur les approvisionnements en bois du site industriel situé entre Marseille et Aix-en-Provence. Nichée dans l’ancien bassin minier de Provence, la centrale de Gardanne (Bouches-du-Rhône) est la plus importante centrale à biomasse de France.

Elle avait pourtant promis dès la fin 2020 qu’elle n’utiliserait plus de charbon, grâce à l’arrêt définitif d’une autre chaudière historique. Elle se félicitait même à l’époque d’être en avance sur la promesse d’Emmanuel Macron d’un arrêt total du charbon pour la production électrique française au… 1er janvier 2022.

Depuis, cet engagement a été repoussé de cinq ans. La centrale de Gardanne a promis de s’aligner sur ce calendrier, après « un investissement sur l’installation d’environ une dizaine de millions d’euros », précise à Reporterre Camille Jaffrelo, directrice du cabinet de la présidence de GazelEnergie. La société, propriétaire de la centrale depuis 2019, fait partie du groupe EPH du magnat tchèque Daniel Křetínský.

Jusqu’à 15 % d’énergies fossiles



« La centrale de Gardanne est conçue sur une technologie dite à “lit fluidisé”, qui a été pensée pour maximiser le rendement des centrales à charbon. Cette technologie impose une quantité minimum de charbon », précise l’analyse de l’empreinte carbone de la centrale versée au complément d’étude d’impact. Cela représente « moins de 10 % » du volume total entrant dans la chaudière, répond Camille Jaffrelo.

« Les mines de charbon de Gardanne ayant été fermées en 2003 et les importations de charbon russe étant interdites, il faut trouver d’autres solutions d’approvisionnement », ajoute-t-elle pour justifier la provenance de ce charbon.

D’autres énergies fossiles sont également requises pour le fonctionnement de la centrale, pour un total maximal autorisé de 15 % de l’ensemble des combustibles. On trouve ainsi 4 % de « produits cendreux de récupération », issus des restes de l’exploitation des mines de charbon des Cévennes et du Dauphiné, intitulés d’abord « charbon cendreux » dans l’étude d’impact initiale de 2012. Et jusqu’à 1 % de gaz naturel, utilisé lors des redémarrages de l’installation.

« En quelques minutes, elle brûle des arbres qui ont mis des dizaines d’années à pousser »

En plus de son utilisation non négligeable de charbon, la centrale de Gardanne est vertement critiquée par des militants écologistes pour sa consommation de bois et ses incidences sur une exploitation industrialisée des forêts, ainsi que ses rejets de gaz à effet de serre.

« En quelques minutes, elle brûle des arbres qui ont mis des dizaines d’années à pousser », s’alarme une contributrice à l’enquête publique, habitante des Cévennes. Et parce qu’elle a recours à une part de combustibles fossiles à la place de renouvelables — le bois est considéré comme tel — « il faudrait au minimum parler d’énergie grise », affirme Luc Le Mouel, de l’Association de lutte contre les nuisances et la pollution.

150 000 tonnes de bois importées du Brésil, d’Espagne et d’Italie

Dans le cadre d’un nouveau contrat de rachat de l’électricité signé fin 2024 avec l’État — pour 800 millions d’euros par an sur huit ans — le volume de bois appelé à être consommé a été divisé par deux. Cela représente toujours 450 000 tonnes annuelles, dont 240 000 de ressources forestières françaises prises principalement dans un rayon de 250 kilomètres, 60 000 tonnes de bois déchet « de seconde vie » et 150 000 tonnes importées du Brésil, d’Espagne et d’Italie.

Lire aussi : Dévoreuse de forêts, la centrale de Gardanne reçoit encore une aide de l’État

Ces schémas d’approvisionnement sont connus grâce à une enquête publique ordonnée par la justice dans 324 communes de seize départements du sud-est de la France après des années de bataille d’associations comme France Nature Environnement Paca et Les Amis de la Terre, qui craignent pour la survie des forêts méditerranéennes.

Du côté de l’industriel, on affirme dans un communiqué que l’impact sur les forêts est maîtrisé par une exploitation de « la part du stock forestier qui peut être prélevée sans compromettre l’avenir des forêts » et leurs « fonctions écologiques ». En revanche, il n’est pas question d’arrêter d’en faire venir de l’étranger, le gouvernement et l’industriel partageant désormais l’objectif de « soutenir l’emploi » sur le port de Fos-sur-Mer via les importations.

Ce champ est nécessaire.

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*