
Des policiers chinois patrouillent dans le parc Victoria, où se sont tenues pendant des années des commémorations de la répression de Tiananmen, à Hong Kong, le 3 juin 2025 ( AFP / Peter PARKS )
Pékin a qualifié mercredi d' »attaque » délibérée les propos du secrétaire d’Etat américain, Marco Rubio, selon qui le monde « n’oubliera jamais » la répression sanglante des manifestants sur la place Tiananmen en 1989.
Le 4 juin 1989, des soldats et des chars chinois ont réprimé les protestataires de l’immense place de Pékin attenante à la Cité interdite, après plusieurs semaines de manifestations organisées pour réclamer davantage de libertés politiques.
Le bilan exact de la répression reste inconnu mais des centaines de personnes sont mortes, voire plus de mille, selon plusieurs estimations.
« Le monde n’oubliera jamais » ce qui s’est passé en 1989 même si Pékin « tente activement de censurer les faits », a déclaré mercredi le secrétaire d’Etat Marco Rubio dans un communiqué.
– « Bravoure » –
« Nous commémorons aujourd’hui la bravoure des Chinois qui ont été tués alors qu’ils essayaient d’exercer leurs libertés fondamentales et de ceux qui continuent de souffrir de persécutions » en cherchant à ce que justice soit rendue pour « les événements du 4 juin 1989 », a-t-il poursuivi.
Pékin a vivement réagi, estimant que ces « propos erronés (…) déforment de manière malveillante les faits historiques, attaquent délibérément le système politique et la voie de développement de la Chine et constituent une ingérence grave dans les affaires intérieures de la Chine ».
« La Chine exprime sa vive insatisfaction et s’oppose fermement (à ces propos). Nous avons adressé une protestation solennelle à la partie américaine », a ajouté un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Lin Jian, au cours d’un point presse régulier.
Le président taïwanais Lai Ching-te a fait écho aux propos de M. Rubio, promettant mercredi d’entretenir la mémoire des victimes de la place Tiananmen.
« Nous nous souvenons du sacrifice de nos prédécesseurs, nous connaissons la valeur de la liberté et nous ne pouvons ignorer l’érosion de la démocratie » dans le monde, a dit M. Lai.
« Les sociétés démocratiques choisissent de préserver la vérité et refusent d’oublier ceux qui ont contribué à l’idéal des droits humains », a écrit le président taïwanais sur Facebook en amont d’une veillée à Taipei, place de la Liberté.
– Présence policière –
Les autorités communistes cherchent à supprimer toute évocation publique de l’événement, censurant la couverture des médias étrangers et les références en ligne à la répression.
Mercredi à Pékin, des policiers ont été aperçus par des journalistes de l’AFP autour du cimetière Wan’an, où les personnes tuées pendant la répression ont été enterrées.
Des agents étaient également postés à plusieurs intersections menant à la place Tiananmen sur l’avenue Chang’an, une large artère placée sous haute sécurité tout au long de l’année.

Vue aérienne d’une foire dans le parc de Victoria, où se sont tenues pendant des années des commémorations de la répression de Tiananmen, à Hong Kong, le 3 juin 2025 ( AFP / Peter PARKS )
Dans la soirée, une file de bus a partiellement bloqué les écrans des ambassades d’Allemagne et du Canada diffusant des images de bougies, un symbole couramment utilisé pour rendre hommage aux victimes de Tiananmen.
Des commémorations publiques sont en outre organisées chaque année à Taïwan, que le Parti communiste chinois considère comme une partie du territoire chinois mais n’a jamais gouverné.
Au cours d’une veillée mercredi sur la place de la Liberté à Taipei, Lara Waldron, une étudiante américaine de 20 ans, a déclaré à l’AFP : « J’ai l’impression que ce 4 juin est très proche de moi en ce moment.
« En tant qu’étudiante, j’ai l’âge de nombreux organisateurs et participants, des personnes qui ont perdu la vie à Tiananmen ».
– Grève de la faim –
A Hong Kong, Chow Hang-tung, une militante emprisonnée, a entamé mercredi une grève de la faim de 36 heures. Une tentative de commémorer individuellement l’événement dans une cité qui pendant des années a été le seul endroit en Chine où les commémorations étaient tolérées.
Cette ancienne avocate aidait autrefois à organiser une veillée annuelle qui rassemblait des dizaines de milliers de personnes dans le parc Victoria, dans le centre-ville.
Depuis que Pékin a imposé une loi de sécurité nationale dans ce hub financier en 2020, l’événement a été interdit et Mme Chow a été emprisonnée. Elle risque la prison à vie pour subversion.
Mercredi, des journalistes de l’AFP ont vu au moins sept personnes emmenées par la police aux abords du parc Victoria, dont deux écolières avec à la main des fleurs blanches – souvent synonymes de deuil dans la culture chinoise – et un homme qui se tenait debout en silence.
« C’est dommage qu’il n’y ait plus » de veillées, « en fait, personne ne les oubliera jamais », a dit à l’AFP Yuen, 49 ans, qui a souhaité garder l’anonymat.
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