Blast: La newsletter signée Sébastien Fontenelle.

Blast - Le souffle de l’info
Le souffle de l’info

Y A QU’À SE BAISSER

La newsletter signée Sébastien Fontenelle.
Un principe simple : une compilation des derniers dérapages observés dans les médias dominants. Parce qu’à force d’extrême droitisation, on finit par ne presque plus les voir.

4 juillet
La presse espagnole rapporte, avec retard, le vif échange durant lequel Gustavo Pedro, chef (de gauche) de l’État colombien, a, le 30 juin dernier, lors d’une conférence des Nations-Unies à Séville (Espagne), lancé à Emmanuel Macron, chef de l’État français : « Il y a trois ans, la crise climatique était le thème central des réunions internationales, et aujourd’hui, c’est l’immigration. On recueille des votes grâce à un discours anti-immigrés. Il est plus facile de gagner des voix avec des mensonges et des fétiches, en affirmant que la vie sera meilleure si l’on expulse ceux qui n’ont pas la même couleur de peau ou la même religion. »
Macron, scandalisé par tant d’impudence, lui a aussitôt rétorqué : « J’exige du respect. Nous avons des hommes politiques en Europe qui ne sont pas obsédés par l’immigration et qui luttent avec acharnement contre l’extrême droite. Ne simplifions pas la réalité de notre vie politique, je vous en prie. »
Le chef de l’État français s’est donc présenté sans rire comme l’un de ces courageux politiciens européens qui « luttent avec acharnement contre l’extrême droite ».
Dans le monde réel, comme chacun sait, Macron ne combat aucunement cette droite xénophobe : il installe au contraire Bruno Retailleau au ministère de l’Intérieur.

5 juillet (1)
Au dîner annuel du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), le président de cette organisation très politique lance devant une assistance triée de nouvelles accusations d’antisémitisme infiniment dégueulasses contre La France insoumise.
Dans la salle, Gérald Darmanin, ministre macroniste de la Justice, écoute religieusement.
En 2021, le même Darmanin glosait, dans un médiocre essai, sur « les difficultés touchant à la présence en France de dizaines de milliers de Juifs » à l’époque napoléonienne.
Mais jamais le président du CRIF, dont les indignations sont donc elles aussi très triées, ne s’est offusqué d’une telle prose.

5 juillet (2)
Pendant qu’en France le CRIF instrumentalise le combat contre l’antisémitisme pour insulter un parti de gauche qui dénonce pour ce qu’elles sont ces abominables tueries quotidiennes : l’armée israélienne massacre 32 Palestiniens à Gaza.

7 juillet
L’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), qui n’est pas exactement un repaire de bolcheviks énervés, publie ses données portant sur l’année 2023.
Il en ressort que, six ans après l’élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République, le taux de pauvreté atteint en France son plus haut niveau depuis 1996 – et que l’écart entre les 20 % les plus riches et les 20 % les plus pauvres de la population est de nouveau d’une amplitude qui ne s’était plus vue, elle non plus, depuis les années 1970.
Ce constat fera, pour le macronisme, une parfaite épitaphe.

9 juillet
Après avoir été modifiée selon les instructions de son propriétaire, qui la trouvait trop « woke » : Grok, l’intelligence artificielle du milliardaire Elon Musk (qui avait, au mois de janvier dernier, fêté l’investiture de Donald J. Trump en effectuant un double salut nazi), appelle à voter pour Marine Le Pen et salue « l’efficacité » d’Adolf Hitler.
Comme cela suscite un – tout – petit peu d’émoi, Grok est, de nouveau, reprogrammée.
Puis tout le monde passe à autre chose, comme si de rien n’était : les droites françaises et leur éditocratie d’accompagnement, notamment, peuvent ainsi continuer à lancer sur le réseau social de Musk d’infâmes procès en « antisémitisme » contre la gauche hexagonale.

10 juillet (1)
L’institut de l’économie pour le climat constate que, pour la première fois depuis dix ans, les financements en faveur du climat ont diminué en France en 2024.
Sept ans plus tôt, en 2017, Macron, quelques mois après son élection à la présidence de la République, fanfaronnait : il allait, promettait-il, « rendre sa grandeur à notre planète ». (Version originale : « Make our planet great again. »)
Pour le mot hâbleur, le dictionnaire propose la définition suivante : « Celui qui a coutume de parler beaucoup, en exagérant ses mérites et en déformant la réalité. »

10 juillet (2)
Le vice-président du Mouvement des entreprises de France (Medef) – le syndicat du patronat – propose de ne pas indemniser à 100 % les travailleurs grippés qui auraient refusé de se faire vacciner contre la grippe.

10 juillet (3)
Le vice-président du Mouvement des entreprises de France (Medef) – le syndicat du patronat – ne propose pas du tout que l’État cesse de subventionner le patronat qui est gavé chaque année de 210 milliards d’euros d’aides publiques dont l’utilité n’a jamais été démontrée.

10 juillet (4)
À Vichy, le Premier ministre François Bayrou salue « l’honneur » des 80 parlementaires qui avaient refusé de donner le pouvoir à Pétain en 1940.
Il omet cependant de préciser que lui-même doit son poste à un homme – du nom de Macron – qui tient ledit Pétain pour un « grand soldat », et que c’est grâce au soutien actif d’un parti cofondé par un ancien Waffen SS qu’il n’a pas (encore) été viré.

10 juillet (5)
Philippe Baptiste, ministre de l’Enseignement supérieur, déclare que, contrairement à ce que braillent depuis d’interminables années les droites françaises (« socialistes » à guillemets compris) et leurs « journalistes » de compagnie, « l’islamo-gauchisme » n’existe pas dans les universités françaises.

13 juillet (1)
L’ « humoriste » Sophia Aram dérange tellement le pouvoir macroniste qu’il lui a donné la Légion d’honneur.

13 juillet (2)
L’ « humoriste » Sophia Aram n’est pas seule à se voir décerner cette décoration honorifique récompensant officiellement des « services éminents » : ce même colifichet est également remis à Alexis Kohler, ex-secrétaire général de la présidence de la République, mis en examen pour prise illégale d’intérêts depuis 2022.
Pour le mot putréfaction, le dictionnaire propose la définition suivante, d’une concision admirable : « Corruption morale. »

15 juillet (1)
Élisabeth Borne, ministre macroniste de l’Éducation nationale, réprimande vertement son adjoint, Philippe Baptiste, ministre de l’Enseignement supérieur, qui avait eu l’outrecuidance de constater, cinq jours plus tôt, que l’« islamo-gauchisme » n’existait pas dans les facs françaises.
Borne, très remontée, fait cette réponse à son effronté subordonné : « L’islamo-gauchisme est un courant qui existe dans la société, donc nécessairement à l’université. »
Cette puissante démonstration induit notamment que le néonazisme, également présent dans la société, existe lui aussi à l’université.
Mais, curieusement : Élisabeth Borne ne s’en inquiète pas.
Ça ne la dérange pas ?

 juillet (2)
Le Premier ministre François Bayrou présente son plan budgétaire visant à économiser 44 milliards d’euros en 2026.
Il proclame que « tout le monde devra participer aux efforts ».
Puis, tout de suite après, il précise que les entreprises, qui reçoivent tous les ans 210 milliards d’euros d’aides publiques dont l’usage n’est pas contrôlé, « devront être épargnées ».
C’est l’un de ces moments où l’on regrette qu’il n’existe pas (encore) de prix Nobel du foutage de gueule.

15 juillet (3)
Bayrou explique notamment qu’il envisage, pour faire quelques économies, de supprimer deux jours fériés – dont le 8 mai, qui commémore la capitulation de l’Allemagne nazie.
Symbole, quand tu nous tiens…

15 juillet (4)
Éric Lombard, ministre de l’Économie et des Finances, revient sur une autre proposition du Premier ministre : « La fiscalité des retraités qui gagnent plus de 20 000 euros par an sera légèrement augmentée, c’est une mesure de justice sociale. »
La « justice sociale », pour le gouvernement, consiste donc à surtaxer les retraités qui perçoivent 1 800 euros par mois après une vie de travail, plutôt que les entreprises qui sont gavées de 210 milliards d’euros par an d’aides dont l’usage n’est jamais contrôlé.

16 juillet (1)
Patrimoine d’Éric Lombard : 21 millions d’euros.
Voilà qui doit l’aider à décider du sort des retraités percevant 1 800 euros de pension.

16 juillet (2)
Dans un vibrant éditorial, le directeur de l’hebdomadaire Le Point (groupe Pinault) juge sans trop de sévérité les annonces budgétaires du Premier ministre : « François Bayrou a raison de mettre les pieds dans le plat. »
La presse, ce contre-pouvoir.

17 juillet (1)
L’armée israélienne bombarde l’église de la paroisse catholique de Gaza.
Trois morts.
Silence de mort, à l’extrême droite, des prétendus soutiens des chrétiens d’Orient – qui, lorsqu’elle ne leur permet pas d’incriminer l’islam, se désintéressent totalement de leur cause.

17 juillet (2)
Après avoir bombardé cette église, l’armée israélienne qui a pulvérisé les mosquées de Gaza soutient très sérieusement qu’elle ne « vise jamais les sites religieux ».

19 juillet
Les pouvoirs publics autorisent l’ouverture d’un internat catholique non mixte parrainé par le milliardaire réactionnaire Pierre-Édouard Stérin.
Prenons quelques secondes pour imaginer les réactions si les pouvoirs publics autorisaient l’ouverture d’un internat musulman non mixte.

20 juillet
Pour qui aurait la chance de s’être ménagé cet été un peu de temps pour bouquiner : voici deux livres hautement recommandables.
James Lee Burke, né au Texas en 1936, est – avis subjectif totalement assumé – le plus grand auteur vivant de romans policiers, et l’un des plus prodigieux écrivains de l’histoire la littérature états-unienne. Nous parlons ici d’un styliste éblouissant, et sans pareil lorsqu’il s’agit de restituer les atmosphères de son pays d’adoption, où la beauté fulgurante des paysages se mélange toujours d’une étrangeté surnaturelle : « Le Sud de la Louisiane n’a ni passé, ni présent, ni futur. Ici, les séquences n’existent pas. Le temps, la lumière, les marais et le golfe changent continuellement, comme à l’intérieur d’un rêve. À Morgan City, on traverse un pont qui donne une sensation de vertige, comme si on était avalé par une caméra. Soudain, on voit l’Atchafalaya River couler à travers des kilomètres de terres humides et de petits cottages le long des rives avec des bateaux de pêcheurs de crevettes parqués au milieu de la ville et, loin vers le sud, la magnificence du golfe du Mexique où, chaque nuit, l’été, les éclairs rampent, silencieux, à travers les nuages. Ce n’est pas un lieu : c’est de la magie. »
Dans Clete, son dernier roman (1), ses deux héros lousianais de prédilection, Dave Robicheaux et Clete Purcel, anciens policiers de La Nouvelle-Orléans, sont notamment confrontés à des néo-nazis – et Purcel, dont le tempérament est notoirement nerveux (et quelque peu viriliste), éprouve quelque difficulté à contenir l’aversion que lui inspirent ces pourritures : « Je cassai le nez du type au corps couvert de tatouages. Je défonçai le ventre de celui dont le pantalon cargo crasseux lui pendait sous le nombril et j’arrachai le tee-shirt de l’antisémite, le lui fourrai dans la bouche et j’essayai de lui donner un coup de pied au visage, mais je le ratai. »
Les épatants romans de Keith McCafferthy se situent, eux, plus au nord : dans les immensités du Montana, où chaque habitant « possède deux vestes Carhartt ».
Le dernier paru, La Rivière au cœur froid (2), narre, comme les précédents, une aventure de la coriace shérif Martha Ettinger et de son « amant-complice-adjoint » Sean Stranahan, lancés cette fois sur la piste d’un manuscrit perdu, et par définition inestimable, d’Ernest Hemingway. On l’aura compris : l’intrigue policière se double ici d’un exercice d’admiration littéraire – et d’une ode pétrie d’humanité à l’Ouest américain, où « les grands espaces, les sourires spontanés et les petits chemins de campagne sont les meilleurs raccourcis pour lier amitié, d’autant plus quand ceux-ci convergent vers une rivière ».

21 juillet (1)

À Gaza, le génocide continue : 93 Palestiniens affamés qui tentaient de récupérer de l’aide humanitaire sont massacrés par l’armée israélienne.21 juillet (2)
Une pétition contre l’infâme – mais si bien nommée – loi Duplomb, qui constitue une attaque en règle contre le climat et l’environnement, recueille plus d’un million et demi de signatures sur le site de l’Assemblée nationale.
L’hebdomadaire Le Point (groupe Pinault) explique à son lectorat que cet immense élan populaire « menace la démocratie ».
Même Orwell, qui s’y connaissait un peu en matière de subversion de la réalité à des fins autoritaires, n’y aurait pas pensé.

21 juillet (3)
Le Figaro (groupe Dassault) annonce, ravi, que : « Pour Les Républicains, l’échéance électorale de mars 2026 doit imposer un front républicain pour faire barrage à la gauche mélenchonisée. »
Voici donc venu le temps où cette droite dite « républicaine » lance ouvertement des appels à construire avec l’extrême droite antisémite et xénophobe un barrage contre la gauche antiraciste…

21 juillet (4)
Agnès Pannier-Runacher, ministre macroniste de la Transition écologique d’un gouvernement qui se dédie massivement à l’aggravation du dérèglement climatique et de la dévastation de l’environnement, proclame que l’écologie est « un sujet trop sérieux pour être laissé aux écologistes ».
Il est difficile de ne pas se laisser terrasser par l’exceptionnelle stupidité de cette déclaration.

23 juillet
Le journal Le Monde consacre un bon article à « l’expulsion silencieuse des Bédouins de Cisjordanie, attaqués chaque jour par des colons extrémistes israéliens ».
Il s’agit, répétons-le, d’un bon papier.
Mais pourquoi présenter comme une « expulsion » un nettoyage ethnique en bonne et due forme ?

24 juillet
Emmanuel Macron annonce que la France reconnaîtra l’État palestinien au mois de septembre 2025.
Parce que le chef de l’État français entretient avec la vérité une relation extraordinairement élastique : nul ne sait encore s’il tiendra cet engagement. (Ou s’il s’agit encore de l’une des innombrables promesses reniées qui auront, de son début à sa fin, ponctué son règne.)
Mais pour le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), dont la réaction est complaisamment colportée par la presse réactionnaire, c’est de toute façon « une faute morale, une erreur diplomatique et un danger politique ».
Prendre quelques secondes pour imaginer les réactions de cette même presse chauvine si une organisation prétendant représenter les musulmans de France se permettait un tel sermon.

(1) Clete, par James Lee Burke, traduit de l’américain par Christophe Mercier, Rivages, 368 pages, 22 euros.

(2) La Rivière au cœur froid, par Keith McRafferthy, traduit de l’américain par Marc Boulet, Gallmeister, 479 pages, 24 euros.

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