
Numéro coordonné par Evelyne Pieiller
Aux larmes, citoyens ! ///// Evelyne Pieiller
1. Quand la haine est un plaisir

Haïr en groupe, c’est fortifiant. Un peu de paranoïa mégalo vous renforce l’ego. Et gratifie d’un doux sentiment d’appartenance. Épatant. Le haineux est sûr d’avoir raison. Et ne voit rien des enjeux sociaux, politiques, intimes qui orientent et activent sa répulsion. C’est pourquoi les racistes et apparentés ne comprendront jamais les dernières paroles de Valentin Feldman, résistant, exécuté en 1942, adressées aux soldats allemands qui vont le fusiller, au plus loin de la haine et au plus près du politique : « Imbéciles ! C’est pour vous que je meurs ! »
Et le policier mâchait son chewing-gum ///// James Baldwin
La bonne conscience du colon ///// Christopher Hill
Le malheur est toujours mérité ///// Yuta Yagishita
Un carburant d’enfer ///// Lionel Richard
Entre nous, franchement, les prolos… ///// Owen Jones
Comment le fascisme se rend désirable ///// Philippe Videlier
2. Les bons sentiments font les bons citoyens

Les sentiments, ça ne se commande pas… Mais si. On les croit spontanés,ils sont souvent manipulés. Et le plus choquant, c’est qu’on ne s’en rend pas toujours compte. Les médias organisent l’émotion, les plates-formes organisent le désir et les experts les justifications, la raison se met en berne, la docilité se met en place. À notre insu, nous accueillons des affects que nous pensons authentiquement nôtres et qui modèlent un certain type d’asservissement, dont l’autre nom est résignation.
L’art de faire pleurer dans les chaumières ///// Nick Davies
Tous abonnés à la servitude volontaire ///// Bernard Stiegler
Le diable au fond est sympa – l’expert explique ///// Alain Accardo
À la gloire du danger de penser ///// Gilles Châtelet
Quand pleure le puissant, bondit la sympathie ///// Thomas Frank
Bienveillance obligatoire sous peine d’amende ///// E. P.
3. Et plus, si affinités

« Les histoires d’amour finissent mal… en général. » À vrai dire, elles ont surtout intérêt à ne pas sortir du parcours imposé par les règles du monde auquel on appartient. Le classement, parfois implicite, des désirs considérés comme légitimes, et… des autres, est une puissante construction où les valeurs nécessaires au maintien de l’ordre dominant se masquent en vérité de la nature ou en sagesse ancestrale. Et donnent forme aux lois, aux pratiques et, ce qui n’est pas le moins important, à l’imaginaire.
Étreintes modernes et bague au doigt ///// Marie Bergström
Bollywood, politique du désir ///// Clea Chakraverty
Le gardien de l’ordre défait par ses émois ///// Marcel Brion
Sorcier, présage, peluche ///// Catherine Dufour
Mais enfin, c’est quoi, l’amour ? ///// Philippe Lafosse
4. Bonheur : en travaux

« Game over ». Affaire classée, l’idée de révolution sociale est périmée. En revanche, l’attention la plus vive est portée à la satisfaction de chacun. À son ressenti de bien-être. Place à l’harmonie, la gentillesse, la prise en compte de l’autre. Priorité à une nouvelle échelle de valeurs, à une nouvelle hiérarchie des affects, pour le bien commun. La sentimentalité fait rage, encore un effort, les lendemains seront solidaires. C’est oublier que l’émeute se nommait autrefois émotion populaire.
La comptabilité de la félicité ///// Frédéric Lebaron
Et on sera tous des petits Mickey ///// Yves Eudes
Compassion, à consommer avec modération ///// E. P.
En joie dans l’émeute ///// Georges Didi-Huberman
La peur à la poubelle ///// John Berger
Voix de faits
Infographie, cartographie, chiffres-clés, citations…
Encadrés
Un massacre entre voisins très réussi
Quand Dieu a un point de vue sur la sexualité
Vivre est une pathologie
Tous des imbéciles, sauf moi
La mort pour les « dégénérés »
Souvenons-nous de nos victoires
Les clartés de l’élite et les pulsions du peuple
Pour encourager les combats
Attendre que le bonheur se pose
Iconographie
Ce numéro est accompagné des oeuvres de :
Romain Bernini
Myriam Boulos (Magnum Photos), @myriamboulos
Mark Rothko
David Wojnarowicz
Lire la présentation des artistes.
Bande dessinée
Coordonné par Guillaume Barou
Jusque dans nos rêves ///// Lisa Lugrin et Clément Xavier
Documentation
Édition : Angélique Mounier-Kuhn
Conception graphique : Nina Hlacer
Maquette : Jérôme Grillière
Photogravure : Patrick Puech-Wilhem
Cartographie : Cécile Marin
Correction : Xavier Monthéard
Manière de voir n°202, août – septembre 2025,
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