
SERBIE : LA PEUR CHANGE DE CAMP
LA RÉVOLUTION MARQUE DES POINTS ET S’ORGANISE
Ni le président Vučić ni son parti, le Parti progressiste serbe ne gouvernent plus. Ils ont juste peur, de plus en plus peur. La peur de ce qui va se passer. Ils sont comme un animal lorsqu’il est acculé et ne voit plus d’issue, il griffe, grogne, montre les dent. Il est peut-être encore plus dangereux et violent mais parce qu’il se sent perdu, parce qu’il a perdu.
C’est le sentiment qui sort aujourd’hui de ce qui se passe en Serbie. Ce que beaucoup sentent. Le pouvoir cogne fort, réprime, arrête… mais ne fait plus peur et ça se voit au visage souriant des gens. Ils savent qu’ils vont gagner. Les sourires sur les visages, les expressions souvent imaginatives et humoristiques de la rébellion, comme les blocages de carrefours, mais aussi les manifestations à l’intérieur du pays, montrent partout cette absence de peur dans une bonne partie de la population, la disparition de la peur qui est toujours annonciatrice des grands changements.
Le processus révolutionnaire actuel en Serbie, à savoir les blocus massifs et la désobéissance civile, semblent inarrêtables tandis que les actions répressives de l’État ne font qu’accélérer ce processus.
Cela fait 8 mois que :le soulèvement a commencé mais le 28 juin a marqué un tournant. La participation a été massive à la grande surprise du pouvoir qui a cru à sa propre propagande, que le mouvement déclinait. Et croyant à ce déclin, il a voulu porter l’estocade en déchainant la violence policière et les arrestations en nombre.
Mais le lendemain, dimanche déjà, malgré la répression ou à cause d’elle, les citoyens sont à nouveau descendus dans la rue, cette fois avec plus de détermination et, surtout, plus d’esprit.
Les blocages routiers ont commencé à Zemun dans un quartier de Belgrade puis se sont étendus dans tout le pays de Kikinda à Niš. Selon les données du CRTE (qui recense les manifestations), 96 blocages et manifestations ont eu lieu dans toute la Serbie dimanche. Lundi, 201 cas de désobéissance civile (blocages) ont été recensés, et mardi, on n’a pas encore de chiffres précis mais de toute façon plus de 200 (le ministère de l’Intérieur en annonce 204, donc beaucoup plus certainement) et cela malgré la répression, malgré les arrestations, les intimidations, avec 70 Blocages/barricades contre 40 dimanche pour la seule ville de Belgrade. L’équivalent de 700 barricades/blocage à Paris en proportion de la population.
Depuis lors, Vuci a continué sa politique, la répression n’a pas faibli. Les arrestations se sont poursuivies, et les scènes sur le terrain et sur les réseaux sociaux témoignent de détentions aveugles et souvent brutales de citoyens. Le nombre total est presque impossible à estimer. Belgrade, comme d’autres grandes villes, est grouillante de membres des forces de police, principalement de la gendarmerie, et de véhicules blindés au cours des trois derniers jours.
Les affrontements avec des manifestants sont monnaie courante. Ainsi, hier, sur le pont de la Liberté à Novi Sad, trois personnes ont été violemment blessées, et des scènes similaires ont été observées à Belgrade et ailleurs.
Signe de cette ‘ambiance générale tendue, le chauffeur Milomir Jaćimović, connu du public pour avoir souvent conduit des étudiants à des manifestations, a tenté de s’immoler devant les locaux du Parti progressiste serbe avec une bouteille d’essence et un briquet à la main, les problèmes personnels se mêlant à la situation. Il a été sauvé et en quelques heures une collecte lui a donné 50 000 euros pour faire face à ses problèmes personnels et de logements.
La solidarité qui fait que personne n’est seul et donne des forces à tous prédomine.
Malgré la recrudescence des violences policières et la propagande des médias pro-régime, le mouvement actuel ne perd pas de son intensité, au contraire il monte en volume et intensité.
Le processus de maturation des consciences en cours a été accéléré par les blocus du 30 juin. Les blocages ont donné à ce pas en avant des consciences une expression visible. Et une organisation. Une structure d’organisation horizontale avec les zbor (assemblées citoyennes de démocratie directe qui couvrent tout le pays) s’est créée associant étudiants et citoyens guidés par la même liberté, les mêmes valeurs, et leur solidarité est extrêmement forte. Cette structure existe pour le moment de fait. Il suffit de peu pour qu’elle devienne consciente à elle-même et acquière ainsi une expression publique et, de là, permette au peuple de prendre consciemment le pouvoir.
Poster un Commentaire