François Bayrou peut-il légitimement avoir une tribune à la Bourse du travail de Paris ?

Par aplutsoc2 le 22 août 2025

La CFDT a invité le premier ministre à venir faire un discours, d’une demi-heure, dans le cadre de son assemblée de rentrée mardi 26 août. L’ensemble de cette réunion, où intervient aussi, un peu plus tard, la ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet, se tient sous les doubles auspices de la CFDT bien sûr, et de la fondation People at Work dont la devise est : « Top Management et Responsabilité Sociétale » : rentabilité, intégration des personnels et des organisations syndicales à la gestion des entreprises en vue de la rentabilité, et « développement personnel » sont les trois axes de cette fondation, forme moderne du corporatisme.

Nous avons ce matin diffusé la lettre d’un camarade et lecteur et de premières informations sur la réaction de l’UD CGT de Paris devant l’intrusion de policiers en civil non annoncés dans la bourse du travail venus pour préparer la venue de Bayrou, et de l’UD FO, ainsi que le mot d’ordre qui a commencé à circuler dans les groupes et réseaux préparant le 10 septembre.

Les sections départementales de Paris de la CGT, de la CGT-FO, de la FSU et de Solidaires viennent d’adopter un appel unitaire à manifester à la Bourse du travail, à se rassembler mardi 26 à 14h juste avant l’arrivée du premier ministre. Cet appel, que nous reproduisons ci-dessous, se termine par les mots : « Nous aurions tant à dire au Premier ministre ! »

Cette unité syndicale ne se réalise pas exactement, on le voit, sur ce que proposait notre camarade dans notre billet précédent, et que nous partageons : « Bayrou ne doit pas être reçu dans la maison du mouvement ouvrier. »

Les Bourses du travail sont historiquement le résultat d’un double mouvement : les municipalités républicaines et laïques qui, à l’image de celle de Paris en 1887, voulaient encadrer le syndicalisme naissant dans des lieux d’organisation du marché du travail, d’accueil des travailleurs itinérants et d’évaluation des qualifications, et les Fédérations syndicales de métiers, d’une part, la Fédération des Bourses précisément dénommée ainsi, c’est-à-dire ce que l’on appelle aujourd’hui les Unions Locales, qui, avec Fernand Pelloutier et le courant dit « anarcho-syndicaliste », en fait purement syndicaliste, ont voulu établir des « palais du travail » et de la lutte pour l’émancipation des travailleurs, en tout indépendance. C’est cette seconde tendance qui a eu le dessus et qui s’est inscrite dans la forme confédérale du syndicalisme français lors du congrès de 1902 de la CGT : union des « bourses » et des fédérations. L’indépendance de ce lieu, avec ses locaux syndicaux et ses salles de meetings, a donc un sens symbolique et politique structurant. Les collaborationnistes parisiens en relation avec le régime pétainiste l’avaient annexé dès 1940 ; il fut repris les armes à la main le 20 août 1944. La Coordination 75 des Collectifs de Sans-Papiers en avait fait son bastion de mai 2008 à juin 2009 et cette occupation avait reposé toutes les questions du rôle d’un tel lieu et de son indépendance, non envers les travailleurs avec ou sans emploi, avec ou sans papiers, mais envers le patronat et l’Etat.

Pourquoi Bayrou ne doit-il pas être reçu dans la maison du mouvement ouvrier ?

Le texte CGT/FO/Solidaires/FSU de Paris le dit fort bien : en raison de son offensive anti ouvrière frontale, « gel des prestations sociales, coupes budgétaires dans la Fonction publique, suppression de deux jours fériés, déremboursement de conventions médicales et de médicaments, désindexation des pensions … », etc., et il conviendrait de ne pas oublier le maintien de la contre-réforme Macron visant les retraites.

Mais aussi parce qu’il est le premier ministre minoritaire, choisi par un président qui a tenté de faire des élections qui aurait fait de Bardella, RN, le premier ministre, qui n’y est pas arrivé et qui s’est acharné et s’acharne depuis à interdire un gouvernement du Nouveau Front Populaire, auquel l’électorat a pourtant donné une majorité relative à l’Assemblée nationale.

CGT, FO, FSU et Solidaires de Paris ont raison d’écrire que nous avons beaucoup à dire au premier ministre, à commencer par ceci : que sa politique est antisociale, antidémocratique et illégitime, qu’elle doit dont être liquidée dans délai. Et ceci, c’est à Matignon, en manifestation centrale, que le monde du travail, salariés, privés d’emplois, retraités et jeunes en formation, peut et doit aller le lui dire. Pas dans le cadre d’un « dialogue social », fût-il un tantinet « musclé », à l’entrée de la Bourse pour aller ensuite pérorer devant les responsables CFDT et de l’officine People at Work.

La présence même de ce premier ministre là dans la Bourse du travail est un acte politique dirigé contre l’unité et l’indépendance du syndicalisme, et contre la préparation non du dialogue social, mais de l’affrontement social nécessaire pour imposer la démocratie !

S’il y a du monde, et il y en aura, à l’appel des quatre sections départementales parisiennes CGT, FO, FSU et Solidaires, ce sera pour dire cela : Bayrou ne doit pas être reçu dans la maison du mouvement ouvrier !

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