Les mythes du BDSM au service de la stratégie des agresseurs
Osez le Féminisme a présenté un mémoire en tierce intervention à la CEDH en soutien de la requérante pour défendre une conception juridiquement objectivée de la dignité humaine et des violences sexistes et sexuelles et déconstruire les mythes sexistes à la racine du BDSM qui postule une liberté à subir de la violence et, indissociablement, un droit à en commettre. En s’appuyant sur les connaissances scientifiques (santé sexuelle, études de genre et données criminologiques accessibles), il est possible de déconstruire les mythes du BDSM et surtout démontrer en quoi ces mythes préjudicient toutes les femmes notamment dans le cadre de la reconnaissance devant les tribunaux des violences patriarcales.
Se posant comme transgressif, le BDSM repose pourtant sur tout ce qu’il y a de plus normatif en patriarcat et vient en renfort des rapports de pouvoir établis. Le BDSM est de plus on ne peut plus mainstream, notamment sous l’influence de la pornographie ou de livres ou films grand public comme 50 nuances de Grey. L’idée du consentement à la violence et à l’humiliation qui viendrait absoudre les auteurs desdites violences de toute responsabilité pénale est entretenue par les communautés BDSM notamment par l’établissement de contrats entre dominant et dominé.
Cette idéologie portée par le BDSM est tellement puissante qu’elle a pénétré le droit et a malheureusement été consacrée par la CEDH elle même dans un arrêt qui a fait coulé beaucoup d’encre, l’affaire dite KA et AD vs Belgique de 2005, une affaire, là aussi, de violences sadiques dignes de torture de guerre. Cet arrêt a longtemps été une aubaine pour les agresseurs. Avec cette décision de la CEDH, cette jurisprudence est enfin neutralisée.
Les croyances entretenues par le BDSM sont pourtant contredites par les sciences objectives. Une étude néerlandaise démontre ainsi que 65% des personnes interrogées ont été victimes de la violation de leur consentement dans le BDSM. Une autre étude de 2018, portant sur 400 affaires judiciaires dans un contexte BDSM, démontre une forte prévalence de viols sadiques, de tortures, de meurtres violents et également des liens étroits entre milieux BDSM et exploitation sexuelle. Dans nombre de ces cas, les auteurs de violences conjugales imposaient des tortures sadiques comme partager leurs conjointes dans des clubs échangistes, exiger des “pratiques BDSM” ou encore les prostituer. Une autre étude au Royaume-Uni démontre que 38% des femmes de moins de 40 ans avaient fait l’expérience de la strangulation, et parmi elles, 42% ont déclaré qu’elles y avaient été poussées, contraintes, forcées par leur partenaire. Cet acte est rarement perçu pour ce qu’il est, une violence potentiellement mortelle ou pouvant laisser des lésions neurologiques graves. Toujours au Royaume-Uni, la stratégie de défense consistant à arguer de pratiques BDSM ayant accidentellement conduit à la mort de la victime, principalement dans les cas de féminicide par strangulation, était devenue tellement courante que le législateur britannique a dû intervenir.
Enfin, cette ligne de défense du “consentement à la violence” est fallacieuse quand sont examinés avec attention les mécanismes psychotraumatiques qui peuvent conduire les victimes de violences sexistes et sexuelles, notamment pédocriminelles, à être placées dans des schémas d’autodestruction et de reproduction de violences subies. “Paradoxalement, les victimes de violences peuvent se sentir mieux (en fait plus dissociées et anesthésiées, voire hypnotisées) avec leur conjoint violent” analyse Muriel Salmona. La recherche de cet état dissociatif, anesthésiant, va conduire ces victimes à des conduites addictives (drogues, alcool), mais aussi des pratiques sexuelles violentes comme le BDSM. Une étude du FBI de 2023 montrent ainsi que dans des affaires de crimes conjugaux sadiques, 25% des femmes avaient subi dans l’enfance des violences physiques, 50% des violences sexuelles.
Ces données scientifiques, en criminologie, victimologie, psychotraumologie balaient la mythologie patriarcale, propagée par la pornographie et le BDSM, d’un “masochisme féminin” dans lequel, par essence, les femmes associeraient jouissance et souffrance, et d’un “sadisme masculin” qui vient légitimer la domination et les violences masculines.
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