
Gaza : l’accord entre Israël et le Hamas est une avancée importante, mais plusieurs zones d’ombre subsistent
Donald Trump s’est félicité de voir la première phase de son plan pour Gaza approuvée par les deux parties, mais plusieurs points sensibles restent à élucider.
INTERNATIONAL – La route vers la paix est encore longue et semée d’embûches. Israël et le Hamas sont parvenus à un accord dans la nuit de mercredi à ce jeudi 9 octobre concernant la première phase du plan de Donald Trump pour la paix à Gaza. Cette entente est un progrès indéniable : elle doit permettre un cessez-le-feu et un échange d’otages israéliens contre des prisonniers palestiniens.
Pour autant, un certain nombre de points sensibles doivent encore être élucidés, tant sur le déroulement de cette première phase que sur la poursuite des négociations pour assurer une paix durable dans la région. Gouvernance de Gaza, retrait de l’armée israélienne, démilitarisation du Hamas, les points de friction entre les parties ne manquent pas et pourraient fragiliser les espoirs d’apaisement.
• Tous les otages seront-ils vraiment libérés ?
La première phase du plan prévoit la libération de tous les otages israéliens encore détenus à Gaza dans les 72 heures après la signature, ce qui conduit Donald Trump à affirmer qu’« ils seront de retour probablement lundi ». Un responsable du Hamas a indiqué à l’AFP que les 20 otages encore vivants seront libérés en une fois.
Mais la question des corps des 28 personnes mortes en captivité pourrait s’avérer plus complexe selon des sources israéliennes. « Le gouvernement israélien est conscient que le Hamas pourrait ne pas connaître l’emplacement des restes de certains des 28 otages décédés, ou être incapable de les récupérer », affirme CNN. « Entre sept et neuf » otages seraient concernés par ce problème selon une première source, « tandis qu’une autre estime leur nombre entre 10 et 15 ».
Quant aux prisonniers palestiniens qu’Israël a promis de libérer en échange des otages, là encore tout n’est pas clair. Ils seront près de 2000 selon le responsable du Hamas cité par l’AFP, Mais « un accord final sur [leurs] noms » reste à trouver, a indiqué une source proche du dossier au quotidien israélien Haaretz. Un diplomate arabe a estimé dans le Times of Israel que l’accord sur le sujet pourrait se faire en « dernière minute avant la signature d’un accord pour éviter des négociations interminables ».
• Le Hamas va-t-il être désarmé ?
Le plan de Donald Trump tel qu’approuvé par Benjamin Netanyahu le 29 septembre dernier était très clair : « toutes les infrastructures militaires, terroristes et offensives, y compris les tunnels et les installations de production d’armes » à Gaza « seront détruites et ne seront pas reconstruites ». Ces dispositions du point n°13 sont évidemment soutenues par Benjamin Netanyahu.
Dans sa réponse à Washington, le Hamas ne mentionne pourtant pas ces questions cruciales, entretenant un flou sur le point de savoir s’il acceptera d’être désarmé et de voir l’enclave palestinienne « démilitarisée ». Comme le souligne la BBC, l’organisation islamiste a « par le passé refusé de rendre les armes, arguant qu’elle ne le ferait qu’une fois qu’un État palestinien serait établi » – ce qui est encore très loin d’être le cas.
Sans clarification sur le désarmement, le Hamas « alimente des spéculations sur le fait qu’il n’a pas changé sa position », tranche le média britannique.
• Comment va se dérouler le retrait des troupes israéliennes ?
Une des annonces fortes, en plus du cessez-le-feu très attendu, est le retrait échelonné des troupes israéliennes des territoires occupés. Dans son message, Donald Trump fait état d’un retrait « jusqu’à la ligne convenue au sein de l’enclave ». Ladite ligne n’a pas encore été officiellement annoncée, même si une première carte que vous pouvez voir ci-dessous avait été diffusée le 4 octobre par le président américain, rappelle la chaîne australienne ABC.
La ligne jaune sur cette carte désigne « la ligne de retrait initiale » acceptée par Israël après ses négociations avec Washington, écrivait alors Donald Trump sur sa plateforme Truth Social. Reste à voir si le plan demeure une semaine plus tard et si Israël tiendra ses engagements. Dans un communiqué cité par ABC, Tsahal assure que « le déploiement des forces sera effectué conformément aux directives de l’échelon politique et aux étapes de l’accord ».
Mais l’armée israélienne indique dans le même temps qu’elle « continuera d’agir » pour « atteindre les objectifs de la guerre », sans préciser lesquels. Il y a moins de deux semaines à l’ONU, Benjamin Netanyahu parlait encore de « finir le travail » et d’anéantir le Hamas qui « pourrait perpétrer un nouveau 7-Octobre ». L’organisation islamiste palestinienne a déjà demandé à Donald Trump de « veiller à ce [qu’Israël] respecte pleinement les termes de l’accord », observe le Guardian. « La crainte » est que l’offensive de Tsahal reprenne « une fois les otages libérés », poursuit le quotidien britannique.
• Quelle gouvernance pour Gaza ?
Le plan américain approuvé par Netanyahu en septembre prévoit dans son point n°9 la mise une « autorité transitoire temporaire » à Gaza sous sa supervision. Exclu de la gouvernance, le Hamas y serait remplacé par un « comité palestinien technocratique et apolitique ». Mais les islamistes palestiniens vont-ils l’accepter ? Ils se sont toujours « fermement » opposés à de pareilles perspectives, relève le New York Times, tandis que le Guardian juge « peu probable » que « ses militants à Gaza acceptent une amnistie » et l’arrêt de la lutte « ou un départ en exil ».
Les choses ne sont pas gagnées non plus côté israélien. Le projet de Donald Trump prévoit que l’autorité transitoire à Gaza administrera la zone « jusqu’à ce que l’Autorité palestinienne ait terminé son programme de réformes » et puisse reprendre la main. On voit mal comment le projet sera accepté par Benjamin Netanyahu, qui la disait « corrompue jusqu’à la moelle » dans son discours à l’ONU.
Ces questions de gouvernance sont les plus complexes et seront le cœur de la deuxième phase des accords, a expliqué au Washington Post un ex-major général égyptien, pour qui « la clé de tout » reste « le succès de la première phase », avec les échanges d’otages et de prisonniers, le retrait partiel de Tsahal et l’entrée de l’aide humanitaire. « Cela aidera à commencer les efforts de négociation lors de la seconde phase », a-t-il estimé.
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