Le RN majoritairement plébiscitéle selon les sondages

sabel Sig

Nous sommes tous à regarder vers les États Unis, sidérés par les agissements de Trump mais ne nous y trompons pas, Le RN qui semble selon les sondages majoritairement plébiscité est tout aussi dangereux pour notre démocratie.
Pierre-Yves Bocquet nous met en garde: «Le projet de révolution nationale du RN est prêt, si ce n’est pas Marine Le Pen qui le porte, ce sera Jordan Bardella».
Pour le haut fonctionnaire cette focalisation sur l’incarnation du RN ne doit pas occulter le fond du projet du parti d’extrême droite. Dans les coulisses du pouvoir, Pierre-Yves Bocquet a longtemps conseillé François Hollande à l’Elysée. Aujourd’hui, le directeur adjoint de la Fondation pour la mémoire de l’esclavage endosse le rôle d’un lanceur d’alerte constitutionnel. Dans la «Révolution nationale» en 100 jours et comment l’éviter, publié chez Gallimard dans la collection «Tracts», ce fin connaisseur des institutions décrypte méthodiquement le projet du RN, révélant une ambition destructrice dissimulée derrière un discours de «normalisation». Par-delà les polémiques quotidiennes, il met en lumière l’intention fondamentale du parti d’extrême droite : utiliser les mécanismes de la démocratie pour en briser les fondements. Il dévoile comment le RN pourrait opérer un bouleversement constitutionnel visant à faire tomber la France dans l’illibéralisme et à instaurer ce qu’il nomme une «xénophobie d’Etat», sans que les contre-pouvoirs puissent empêcher ce coup de force.
Par une révision constitutionnelle dont le texte est déjà élaboré, MLP a déposé en 2024 à l’Assemblée nationale une proposition de loi constitutionnelle, donc consultable par tous. Ce texte révèle une double rupture. Il s’attaque au triptyque républicain Liberté, Egalité, Fraternité qui nous définit depuis 1789. Si le RN emporte la présidentielle de 2027, il peut le faire adopter par référendum dans la foulée de son arrivée à l’Elysée : c’est le fameux «référendum sur l’immigration», présenté comme clé de voûte du programme. Il vise précisément à démanteler les fondements de notre République, quasiment sans possibilité de retour en arrière : c’est un véritable pistolet braqué sur notre Constitution. C’est un travail de démolition-reconstruction massif. Le texte du RN modifie 18 articles sur les 108 que compte la Constitution et en ajoute 7 de plus. Environ 20 % de la Constitution serait modifiée, ce qui n’est jamais arrivé depuis 1958. Le dispositif est très bien pensé, on voit qu’il y a derrière un travail de juriste sérieux.
 » La première étape consiste à altérer les principes généraux, notamment le principe d’égalité qui interdit aujourd’hui les discriminations arbitraires. Ensuite, on verrouille l’accès des étrangers aux recours juridictionnels internationaux en inversant la hiérarchie des normes pour placer la Constitution française au-dessus des traités internationaux, notamment la Convention européenne des droits de l’homme.
Puis, une dizaine d’articles ciblent spécifiquement les étrangers, leur retirant de nombreux droits. D’abord, les prestations sociales. Mais la loi pourrait aussi leur interdire d’occuper des responsabilités dans les associations et les syndicats, ces contre-pouvoirs essentiels qui défendent les citoyens face à l’arbitraire de l’Etat. La stratégie est claire : en excluant les étrangers de ces organisations, on les prive de protection collective et on les isole de la vie citoyenne. la «priorité nationale» est la même chose que la «préférence nationale», qui n’est rien d’autre qu’une xénophobie d’Etat.
Enfin, pour éviter que des administrations ou collectivités n’appliquent pas ces principes de «discrimination légale», le texte prévoit des voies de recours pour les Français. Si un Français estime qu’une administration ne met pas en œuvre ce programme xénophobe, il pourra saisir les tribunaux jusqu’au Conseil constitutionnel. Et, l’ensemble est verrouillé, puisque le texte stipule que toutes ces dispositions adoptées par référendum ne pourront être modifiées que par référendum.
Voilà le piège : une fois l’édifice général fragilisé, d’autres populations pourraient ensuite être visées – homosexuels, femmes, personnes transgenres – car elles ne seraient plus protégées ni par les textes internationaux ni par notre Constitution. »
Le RN veut modifier notre constitution pour pouvoir discriminer les étrangers uniquement parce qu’ils sont étrangers. Il veut ainsi s’affranchir de ces exigences pour consacrer son principe de «préférence nationale», cette vieille doctrine de l’extrême droite française qui dit : «la France aux Français». Passant outre nos garde-fous institutionnels, avec un simple référendum, L’article 11 de la Constitution permet au président de la République de déclencher un référendum sans consulter le Parlement. Le RN prévoit, après une victoire à l’élection présidentielle, de présenter ce texte déjà rédigé au peuple français sous la forme d’une question à laquelle il ne sera possible de répondre que par oui ou non. […]
Une fois élue, Marine Le Pen n’aurait qu’à nommer un gouvernement de son bord, lui faire présenter ce projet, prendre un décret pour convoquer un référendum, et un mois plus tard, le vote aurait lieu. Si la réponse est oui, le texte entre immédiatement dans la Constitution. Le conseil constitutionnel pourrait s’opposer à une telle manœuvre mais l’incertitude demeure … C’est dans ce flou que le RN veut s’engouffrer. Et d’un point de vue politique, un président élu sur un programme comportant explicitement ce référendum aurait une légitimité que le Conseil constitutionnel, non élu, aurait du mal à contester. Cette incertitude même renforce le réalisme du scénario, si le RN gagne la présidentielle. {…]
L’exemple américain est éloquent : Trump a tenté un coup d’Etat en 2021 et prépare maintenant un affrontement avec les juges. Le RN ira-t-il jusque-là ? Personne ne peut l’affirmer, mais Marine Le Pen a clairement indiqué qu’elle utiliserait l’article 11 et que si le Conseil constitutionnel s’y opposait, elle assumerait le rapport de force.
On assiste à un affaissement du débat public en France, renforcé par l’atmosphère toxique des médias bollorisés. Il est temps de se reconnecter aux préoccupations véritables des citoyens : services publics, déserts médicaux, pouvoir d’achat… Face à cette vague d’extrême droite, le risque est l’abattement. Je suis convaincu qu’une démocratie s’effondre moins sous les coups de ses adversaires que par la fatigue de ses défenseurs. »
Les électeurs du RN sont beaucoup plus mobilisés que ceux de la gauche qui perd son temps dans des querelles intestines et subit, il faut bien le dire, la dispersion de LFI, si nous ne nous reconcentrons pas, le RN aidé par la droite qui est en train de faire alliance avec eux prendra le pouvoir et ce sera la catastrophe.
[Sources Libération. Entretien Pierre-Yves Bocquet du 29/03/2025]
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