Un continuum de violences fondé sur la domination masculine
Les violences sexistes et sexuelles traversent toutes les sphères de la société et tous les âges de la vie. Elles forment un continuum qui inclut notamment le harcèlement, les agressions, les viols, les violences au sein du couple, la prostitution et l’exploitation sexuelle, l’inceste, la pédocriminalité et l’ensemble des cyberviolences sexistes et sexuelles.
« Ce que l’on appelle violences sexistes et sexuelles n’est pas une série d’incidents isolés, mais l’expression systémique de la domination masculine », rappelle Aliénor Laurent, porte-parole d’Osez le Féminisme.
Certaines femmes sont encore plus exposées en raison de discriminations multiples, notamment lorsqu’elles sont racisées, en situation de handicap, migrantes ou étrangères, jeunes ou âgées, lesbiennes ou bisexuelles, ou lorsqu’elles élèvent seules leurs enfants. La précarité accentue les risques de violences et limite les possibilités de se protéger. Les attaques répétées contre les droits sociaux impactent d’abord les femmes, qu’il s’agisse du logement, des minimas sociaux ou des services publics.
L’inceste et la pédocriminalité restent massivement sous-déclarés et sous-poursuivis. Ces violences s’ancrent dans les mêmes mécanismes que les violences faites aux femmes : domination masculine, rapports d’emprise, silence imposé aux victimes, impunité institutionnelle. Elles touchent majoritairement des filles et conditionnent durablement leur vulnérabilité future face aux violences sexistes et sexuelles. Les violences subies dans l’enfance s’articulent ainsi directement avec celles subies à l’âge adulte, révélant la nécessité d’une action cohérente et coordonnée.
Impunité persistante : un système qui ne protège pas
L’impunité reste massive. Selon l’Institut des politiques publiques, 94 pour cent des plaintes pour viol ont été classées sans suite en 2021. Les faits enregistrés augmentent fortement, mais les moyens ne suivent pas. Selon le HCE, entre 2017 et 2023, les plaintes pour viols ont triplé, alors que les condamnations restent globalement stables à un niveau très faible. La justice, déjà saturée, manque de moyens et de spécialisation. L’extension des cours criminelles départementales pour juger les viols remet en cause la reconnaissance de la gravité de ces crimes.
« Tant que les plaintes n’aboutissent pas, l’impunité demeure la règle. Il faut réformer la chaîne judiciaire pour réduire les classements sans suite et garantir aux victimes accès au soin, à la sécurité et à la dignité », souligne Maïna Cerniawsky, porte-parole d’Osez le Féminisme.
Lutte contre l’exploitation sexuelle : un enjeu majeur pour l’égalité femmes hommes
La pornographie en ligne alimente la culture du viol en diffusant des contenus sexistes et violents qui banalisent les violences sexuelles. Elle façonne un imaginaire où la domination masculine apparaît comme désirable. Ce phénomène s’intensifie avec les plateformes comme OnlyFans, véritables dispositifs de « prostitution 2.0 » ciblant les plus jeunes, y compris les mineur·es.
Reconnaître la prostitution comme une violence exercée contre les filles et les femmes est indispensable. Elle repose sur la domination masculine et la marchandisation des êtres humains. Les parcours des femmes victimes de prostitution montrent en très vaste majorité des violences antérieures, des contraintes économiques et l’emprise de proxénètes, y compris via des outils numériques.
Les nouvelles technologies numériques : au cœur du continuum des violences
Les cyberviolences sexistes et sexuelles occupent désormais une place majeure : chantage, diffusion d’images intimes sans consentement, harcèlement, raids, deepfakes pornographiques, pédocriminalité en ligne. Les agresseurs utilisent les outils numériques pour étendre leur emprise, traquer, ou faire chanter leurs victimes, imposer le silence et garantir leur impunité. Ces violences touchent surtout les filles et les femmes, parfois dès l’adolescence, et leurs effets sont dévastateurs. Elles révèlent les failles des plateformes en matière de modération et de retrait des contenus, et servent de caisse de résonance aux discours masculinistes.
« La violence masculine a changé d’échelle avec le numérique. Les moyens publics, eux, n’ont pas suivi », déclare Céline Piques, porte-parole d’Osez le Féminisme.
Un sous-financement chronique : des vies en danger
Alors que les besoins explosent, les financements stagnent ou reculent. Selon la Fondation des femmes, les associations manquent de 30 à 50 pour cent des ressources nécessaires pour répondre aux demandes. Les associations ne peuvent plus être les amortisseurs d’un État qui se désengage. Un financement insuffisant, ce sont des vies en danger.
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