La cour d’appel de Paris doit examiner, lundi 10 novembre, à 9 h 30, les arguments de la défense de l’ancien président détenu à la prison de la Santé depuis le 21 octobre. Elle a précédemment maintenu l’intermédiaire Alexandre Djouhri en détention et remis en liberté le banquier Wahib Nacer.
Vers 9 heures, lundi 10 novembre, Nicolas Sarkozy devrait être extrait de sa cellule pour rejoindre une salle de visioconférence à la prison de la Santé et répondre à distance aux questions d’Olivier Géron, président de chambre à la cour d’appel de Paris, qui doit statuer sur sa demande de mise en liberté.
Si tout se passe comme prévu, le visage de l’ancien président détenu doit donc s’afficher sur l’écran géant de la salle Dario de la cour d’appel, vers 9 h 30, devant les magistrats, le public et les journalistes. Incarcéré mardi 21 octobre, après sa condamnation, le 25 septembre, à cinq ans de prison ferme avec mandat de dépôt différé pour association de malfaiteurs dans l’affaire des financements libyens, Nicolas Sarkozy avait déposé le même jour une demande de mise en liberté.
Nicolas Sarkozy a été incarcéré au regard de la « gravité exceptionnelle » des faits pour lesquels il a été condamné. Mais à partir du moment où il a fait appel du jugement, il redevient présumé innocent et son incarcération correspond à une détention provisoire, dont les critères de maintien sont d’ordre divers. Selon le Code de procédure pénale, ce maintien en détention n’est en effet possible que si l’incarcération est l’unique moyen de conserver les preuves, d’empêcher des pressions sur des témoins, des concertations entre suspects, de prévenir une fuite ou une récidive…
L’équipe de l’ancien président s’est dite « submergée par les lettres de soutien envoyées par des milliers de Français », et a mis en ligne, mercredi, des images de lettres et de cartes postales, et d’un sac de courrier vidé sur le sol du bureau de Nicolas Sarkozy, rue de Miromesnil. Des soutiens politiques ou médiatiques ne devraient pas manquer de s’exprimer aussi. Comme il l’avait annoncé, le garde des Sceaux Gérald Darmanin a rendu visite au détenu le 29 octobre à la prison de la Santé.
« J’y suis allé pour regarder les conditions de détention d’un ancien président de la République et particulièrement protégé par la République », a-t-il commenté, en précisant que le « service public pénitentiaire » était de son ressort.
« J’ai beaucoup de tristesse pour le président Sarkozy, avait-il assumé auparavant sur France Inter. L’homme que je suis, j’ai été son collaborateur, ne peut pas être insensible à la détresse d’un homme ». Le soutien non dissimulé du ministre de la justice à l’ancien président détenu, et l’annonce de sa visite, ont provoqué de vives réactions dans la magistrature, ainsi qu’une plainte pour « prise illégale d’intérêt » d’un collectif d’avocats auprès de la Cour de justice de la république (CJR).
Le procureur général Rémy Heitz a jugé que cette visite était « un risque d’obstacle à la sérénité et d’atteinte à l’indépendance des magistrats ». Son prédécesseur François Molins a averti qu’on pourrait y voir « comme une forme de pression sur les magistrats ».
Les raisons du maintien en détention d’Alexandre Djouhri
La Cour d’appel a déjà statué à deux reprises depuis le délibéré de première instance. Le président Olivier Géron a remis en liberté Wahib Nacer, du fait de son âge, 81 ans, et de ses garanties de représentation, mais il a maintenu en détention l’intermédiaire Alexandre Djourhi. Condamnés respectivement à quatre ans et six ans de prison ferme, les deux hommes avaient été interpellés à l’audience le 25 septembre.
Pour Wahib Nacer, la cour a écarté « un risque de dissimulation de preuve, de pressions, de concertation ou de réitération, s’agissant d’une personne n’ayant jamais été condamnée ». En revanche, elle a considéré que « le risque de concertation ou de pression continue d’exister » s’agissant d’Alexandre Djouhri, « dans un dossier où au moins un prévenu, Bachir Saleh, n’a jamais pu être entendu sur procès-verbal par les juges d’instruction et semble avoir été particulièrement protégé, et ce avec un rôle actif d’Alexandre Djouhri ».
« Il ressort des écoutes téléphoniques qu’Alexandre Djouhri n’a pas hésité à se rapprocher de personnes, pour certaines renvoyées par la suite devant le tribunal correctionnel, soit pour s’entendre avec elles sur une réponse à apporter à un article de journal le mettant en cause (interception du 5 octobre 2013) soit pour créer une preuve (interceptions des 20 et 26 mars 2014) expliquant au tribunal correctionnel qu’il voulait transmettre ce justificatif aux juges chargés de l’enquête », a rappelé la cour.
« Dans la mesure où les déclarations des protagonistes d’une affaire ne sont jamais figées tant qu’une décision définitive n’a pas été rendue (…), des risques de concertation plus généraux ne peuvent être exclus au regard de la personnalité du prévenu et de son positionnement aux faits », a-t-elle encore indiqué, tout en soulignant « le risque de non-représentation en justice », autrement dit la fuite.
« Concrètement, il a fallu la délivrance d’un mandat d’arrêt » pour qu’Alexandre Djouhri se présente devant un juge d’instruction.
L’intermédiaire « se voit reprocher outre deux associations de malfaiteurs, notamment des faits de corruption et de blanchiment qui, d’une part, porteraient sur des sommes conséquentes et d’autre part, révéleraient des mécanismes de transfert de fonds internationaux complexes et impliquant de nombreuses personnes », a encore souligné la Cour. « Il est donc impliqué dans une série de faits qui présentent la particularité de tous se situer à la frontière entre le monde des affaires et la gouvernance des États et qui sont de nature, à les supposer avérés, à vicier le fonctionnement normal et sain de l’un et de l’autre ».
Quid de l’affaire de la « fausse rétractation » ?
Vu l’analyse du président Olivier Géron sur les « risques de pression et de concertation » à redouter d’une mise en liberté d’Alexandre Djouhri, on peut s’attendre à ce que soit évoqué, lundi, l’affaire de la fausse rétractation de Ziad Takieddine, dans laquelle Nicolas Sarkozy est mis en examen pour recel de subornation de témoin et association de malfaiteurs en vue de commettre une escroquerie au jugement en bande organisée.
Dans cette affaire, Ziad Takieddine, décédé en septembre dernier, s’était vu proposer par un groupe d’intermédiaires, une somme de 3 millions de dollars pour rétracter ses accusations contre Nicolas Sarkozy, ce qu’il avait fait auprès de BFM TV et Paris Match, depuis le Liban, le 11 novembre 2020. L’enquête a montré que l’ancien président, sans avoir été partie prenante des négociations, avait été informé d’une partie des coulisses de cette rétractation par la communicante Michèle Marchand, notamment par le biais de son épouse Carla Bruni, également mise en examen.
L’ancien président a même reçu en décembre 2020 à son domicile l’un des opérateurs de la fausse rétractation Ziad Takieddine, un certain Noël Dubus, auquel il a dédicacé son livre Le Temps des tempêtes avec ces mots peu équivoques : « Merci pour tout. Votre ami ».
Dans quelle mesure cette mise en examen pour recel de subornation de témoin et association de malfaiteurs dans une affaire directement liée à celle pour laquelle il a été incarcéré va colorer les débats ? Il est impossible de le savoir à ce stade.
Le procès de première instance avait également permis de mettre en lumière les pressions à peine voilées durant l’enquête judiciaire de Nicolas Sarkozy sur l’ancien directeur du renseignement intérieur, Patrick Calvar, au sujet du témoignage potentiellement embarrassant d’un hiérarque libyen.
Par ailleurs, le CV judiciaire de Nicolas Sarkozy sera peut-être également évoqué. L’ancien président a déjà été définitivement condamné pour corruption (dossier Bismuth) et condamné en première instance et en appel pour financement illicite de campagne (dossier Bygmalion), soit deux délits pour lesquels il a été relaxé en première instance mais pour lesquels il sera rejugé en appel, le Parquet national financier ayant contesté ces relaxes.
De manière plus inattendue, le régime alimentaire de Nicolas Sarkozy a fait son apparition ces derniers jours dans la sphère médiatique en lien avec l’audience de ce lundi. Le Point, très en défense de l’ex-chef d’État (au risque de la manipulation), a publié un premier article le 6 novembre en affirmant que Nicolas Sarkozy ne se nourrirait que de yaourts, refusant de manger les plats servis par l’administration pénitentiaire de peur que certains codétenus « crache(nt) dans sa pitance, si ce n’est pire… », selon l’hebdomadaire.
Nicolas Sarkozy, poursuit Le Point, refuserait par ailleurs de se faire à manger lui-même dans sa cellule, comme il en a la possibilité. « Il ne sait pas se faire cuire un œuf ! », a confié un proche. « Et puis, par principe, il s’y refuse », a ajouté cette mystérieuse source anonyme citée par le journal. Ce dernier a poursuivi son investigation alimentaire le lendemain avec le concours cette fois du professeur Boris Hansel, endocrinologue et nutritionniste à l’hôpital Bichat, « qui a accepté d’analyser les risques d’un tel régime ». La défense de Nicolas Sarkozy fera-t-elle entrer ces questions dans la salle d’audience ?
La décision de la cour d’appel pourrait être connue dans la journée même de lundi.
La cour d’appel de Paris doit examiner, lundi 10 novembre, à 9 h 30, les arguments de la défense de l’ancien président détenu à la prison de la Santé depuis le 21 octobre. Elle a précédemment maintenu l’intermédiaire Alexandre Djouhri en détention et remis en liberté le banquier Wahib Nacer.
Vers 9 heures, lundi 10 novembre, Nicolas Sarkozy devrait être extrait de sa cellule pour rejoindre une salle de visioconférence à la prison de la Santé et répondre à distance aux questions d’Olivier Géron, président de chambre à la cour d’appel de Paris, qui doit statuer sur sa demande de mise en liberté.
Si tout se passe comme prévu, le visage de l’ancien président détenu doit donc s’afficher sur l’écran géant de la salle Dario de la cour d’appel, vers 9 h 30, devant les magistrats, le public et les journalistes. Incarcéré mardi 21 octobre, après sa condamnation, le 25 septembre, à cinq ans de prison ferme avec mandat de dépôt différé pour association de malfaiteurs dans l’affaire des financements libyens, Nicolas Sarkozy avait déposé le même jour une demande de mise en liberté.
Nicolas Sarkozy a été incarcéré au regard de la « gravité exceptionnelle » des faits pour lesquels il a été condamné. Mais à partir du moment où il a fait appel du jugement, il redevient présumé innocent et son incarcération correspond à une détention provisoire, dont les critères de maintien sont d’ordre divers. Selon le Code de procédure pénale, ce maintien en détention n’est en effet possible que si l’incarcération est l’unique moyen de conserver les preuves, d’empêcher des pressions sur des témoins, des concertations entre suspects, de prévenir une fuite ou une récidive…
L’équipe de l’ancien président s’est dite « submergée par les lettres de soutien envoyées par des milliers de Français », et a mis en ligne, mercredi, des images de lettres et de cartes postales, et d’un sac de courrier vidé sur le sol du bureau de Nicolas Sarkozy, rue de Miromesnil. Des soutiens politiques ou médiatiques ne devraient pas manquer de s’exprimer aussi. Comme il l’avait annoncé, le garde des Sceaux Gérald Darmanin a rendu visite au détenu le 29 octobre à la prison de la Santé.
« J’y suis allé pour regarder les conditions de détention d’un ancien président de la République et particulièrement protégé par la République », a-t-il commenté, en précisant que le « service public pénitentiaire » était de son ressort.
« J’ai beaucoup de tristesse pour le président Sarkozy, avait-il assumé auparavant sur France Inter. L’homme que je suis, j’ai été son collaborateur, ne peut pas être insensible à la détresse d’un homme ». Le soutien non dissimulé du ministre de la justice à l’ancien président détenu, et l’annonce de sa visite, ont provoqué de vives réactions dans la magistrature, ainsi qu’une plainte pour « prise illégale d’intérêt » d’un collectif d’avocats auprès de la Cour de justice de la république (CJR).
Le procureur général Rémy Heitz a jugé que cette visite était « un risque d’obstacle à la sérénité et d’atteinte à l’indépendance des magistrats ». Son prédécesseur François Molins a averti qu’on pourrait y voir « comme une forme de pression sur les magistrats ».
Les raisons du maintien en détention d’Alexandre Djouhri
La Cour d’appel a déjà statué à deux reprises depuis le délibéré de première instance. Le président Olivier Géron a remis en liberté Wahib Nacer, du fait de son âge, 81 ans, et de ses garanties de représentation, mais il a maintenu en détention l’intermédiaire Alexandre Djourhi. Condamnés respectivement à quatre ans et six ans de prison ferme, les deux hommes avaient été interpellés à l’audience le 25 septembre.
Pour Wahib Nacer, la cour a écarté « un risque de dissimulation de preuve, de pressions, de concertation ou de réitération, s’agissant d’une personne n’ayant jamais été condamnée ». En revanche, elle a considéré que « le risque de concertation ou de pression continue d’exister » s’agissant d’Alexandre Djouhri, « dans un dossier où au moins un prévenu, Bachir Saleh, n’a jamais pu être entendu sur procès-verbal par les juges d’instruction et semble avoir été particulièrement protégé, et ce avec un rôle actif d’Alexandre Djouhri ».
« Il ressort des écoutes téléphoniques qu’Alexandre Djouhri n’a pas hésité à se rapprocher de personnes, pour certaines renvoyées par la suite devant le tribunal correctionnel, soit pour s’entendre avec elles sur une réponse à apporter à un article de journal le mettant en cause (interception du 5 octobre 2013) soit pour créer une preuve (interceptions des 20 et 26 mars 2014) expliquant au tribunal correctionnel qu’il voulait transmettre ce justificatif aux juges chargés de l’enquête », a rappelé la cour.
« Dans la mesure où les déclarations des protagonistes d’une affaire ne sont jamais figées tant qu’une décision définitive n’a pas été rendue (…), des risques de concertation plus généraux ne peuvent être exclus au regard de la personnalité du prévenu et de son positionnement aux faits », a-t-elle encore indiqué, tout en soulignant « le risque de non-représentation en justice », autrement dit la fuite.
« Concrètement, il a fallu la délivrance d’un mandat d’arrêt » pour qu’Alexandre Djouhri se présente devant un juge d’instruction.
L’intermédiaire « se voit reprocher outre deux associations de malfaiteurs, notamment des faits de corruption et de blanchiment qui, d’une part, porteraient sur des sommes conséquentes et d’autre part, révéleraient des mécanismes de transfert de fonds internationaux complexes et impliquant de nombreuses personnes », a encore souligné la Cour. « Il est donc impliqué dans une série de faits qui présentent la particularité de tous se situer à la frontière entre le monde des affaires et la gouvernance des États et qui sont de nature, à les supposer avérés, à vicier le fonctionnement normal et sain de l’un et de l’autre ».
Quid de l’affaire de la « fausse rétractation » ?
Vu l’analyse du président Olivier Géron sur les « risques de pression et de concertation » à redouter d’une mise en liberté d’Alexandre Djouhri, on peut s’attendre à ce que soit évoqué, lundi, l’affaire de la fausse rétractation de Ziad Takieddine, dans laquelle Nicolas Sarkozy est mis en examen pour recel de subornation de témoin et association de malfaiteurs en vue de commettre une escroquerie au jugement en bande organisée.
Dans cette affaire, Ziad Takieddine, décédé en septembre dernier, s’était vu proposer par un groupe d’intermédiaires, une somme de 3 millions de dollars pour rétracter ses accusations contre Nicolas Sarkozy, ce qu’il avait fait auprès de BFM TV et Paris Match, depuis le Liban, le 11 novembre 2020. L’enquête a montré que l’ancien président, sans avoir été partie prenante des négociations, avait été informé d’une partie des coulisses de cette rétractation par la communicante Michèle Marchand, notamment par le biais de son épouse Carla Bruni, également mise en examen.
L’ancien président a même reçu en décembre 2020 à son domicile l’un des opérateurs de la fausse rétractation Ziad Takieddine, un certain Noël Dubus, auquel il a dédicacé son livre Le Temps des tempêtes avec ces mots peu équivoques : « Merci pour tout. Votre ami ».
Dans quelle mesure cette mise en examen pour recel de subornation de témoin et association de malfaiteurs dans une affaire directement liée à celle pour laquelle il a été incarcéré va colorer les débats ? Il est impossible de le savoir à ce stade.
Le procès de première instance avait également permis de mettre en lumière les pressions à peine voilées durant l’enquête judiciaire de Nicolas Sarkozy sur l’ancien directeur du renseignement intérieur, Patrick Calvar, au sujet du témoignage potentiellement embarrassant d’un hiérarque libyen.
Par ailleurs, le CV judiciaire de Nicolas Sarkozy sera peut-être également évoqué. L’ancien président a déjà été définitivement condamné pour corruption (dossier Bismuth) et condamné en première instance et en appel pour financement illicite de campagne (dossier Bygmalion), soit deux délits pour lesquels il a été relaxé en première instance mais pour lesquels il sera rejugé en appel, le Parquet national financier ayant contesté ces relaxes.
De manière plus inattendue, le régime alimentaire de Nicolas Sarkozy a fait son apparition ces derniers jours dans la sphère médiatique en lien avec l’audience de ce lundi. Le Point, très en défense de l’ex-chef d’État (au risque de la manipulation), a publié un premier article le 6 novembre en affirmant que Nicolas Sarkozy ne se nourrirait que de yaourts, refusant de manger les plats servis par l’administration pénitentiaire de peur que certains codétenus « crache(nt) dans sa pitance, si ce n’est pire… », selon l’hebdomadaire.
Nicolas Sarkozy, poursuit Le Point, refuserait par ailleurs de se faire à manger lui-même dans sa cellule, comme il en a la possibilité. « Il ne sait pas se faire cuire un œuf ! », a confié un proche. « Et puis, par principe, il s’y refuse », a ajouté cette mystérieuse source anonyme citée par le journal. Ce dernier a poursuivi son investigation alimentaire le lendemain avec le concours cette fois du professeur Boris Hansel, endocrinologue et nutritionniste à l’hôpital Bichat, « qui a accepté d’analyser les risques d’un tel régime ». La défense de Nicolas Sarkozy fera-t-elle entrer ces questions dans la salle d’audience ?
La décision de la cour d’appel pourrait être connue dans la journée même de lundi.
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