| Arguments pour la lutte sociale | Lire sur le blog ou le lecteur |
Le 8 décembre dernier, j’insistais : « Matériellement, les conditions d’existence réelle des plus larges masses reculent et les menaces budgétaires portent sur les services publics et la Sécurité sociale. Mais ces demi-victoires politiques, sur la réforme des retraites, l’Assurance chômage et le « choc des savoirs », ont une portée considérable. Elles signifient que le rapport des forces réel est beaucoup plus favorable aux salariés, actifs, chômeurs, jeunes, retraités, que ne le font croire les médias et que ne le croient, généralement, les militants, conditionnés par l’inaction intersyndicale et par la division des partis issus du NFP. Elles signifient qu’il n’y a pas à avoir peur de l’affrontement social, de son développement en affrontement politique central contre Macron et la V° République, car, de toutes les combinaisons possibles, c’est celle-là qui sera réellement efficace contre le RN et l’union des droites ! » Cette peur correspond, chez beaucoup de militants et de responsables politiques, à la peur de la dissolution de l’Assemblée nationale, censée conduire automatiquement à l’arrivée au pouvoir du RN flanqué des partis « néo-gaullistes » (UDR, LR, Horizons) eux-mêmes engagés dans une course aux extrêmes. C’est justement la défection d’Horizons du « bloc central » post-macronien, et la crise de LR – dont la cause en dernière analyse est le rapport de force social réel, Retailleau dirigeant du parti s’étant brillamment auto-discrédité lors du bref épisode du gouvernement Lecornu 1 ! – qui ont conduit le groupe parlementaire PS à voter pour le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), beaucoup plus que les quelques reculs gouvernementaux enregistrés dans ce projet, à commencer par le décalage-suspension de la réforme des retraites. Le PS a fait explicitement le choix d’aider le gouvernement Lecornu à tenir, de crainte d’une dissolution. Danielle Simonnet, pour L’APRÈS, a raison de souligner les reculs gouvernementaux, dont il faut préciser que la cause n’est pas parlementaire, mais tient au rapport de force social, sur les retraites, mais aussi l’année blanche contre les pensions et minimas sociaux qui a été abandonnée, ainsi que le doublement des franchises médicales et les autres « horreurs » sur les apprentis, les chèques vacances et les tickets restaurants, tout en expliquant que l’essentiel de la ligne politique de destruction du droit à la santé et de la Sécurité sociale a été maintenu, avec les attaques sur les arrêts de travail, l’hôpital public et les mutuelles. Du point de vue revendicatif, il était donc parfaitement possible et logique de voter contre le PLFSS tout en ayant voté pour les reculs qu’il intègre – rappelons que le groupe LFI suivi par les députés PCF ont voté contre le décalage-suspension de la réforme des retraites ! -, car c’est là le B-a-ba de l’action revendicative : quand le rapport de force devient favorable, on ne s’arrête pas, on enfonce le clou ! Et on enfonce le clou sans avoir peur de faire sauter le taulier, en l’occurrence de renverser le gouvernement Lecornu, si, et seulement si, l’on comprend que la victoire politique contre Macron, la droite et le RN est et sera fonction de l’affrontement social, comme septembre 2025 en a apporté la démonstration ! Ajoutons une chose qu’il convient de ne jamais oublier, car la mémoire de ce qu’est la Sécu, le salaire socialisé, est constitutive de la lutte sociale en France, alors que, du PS à LFI, ceci n’a pas été rappelé : le PLFSS, du point de vue de la classe des travailleurs salariés qui produit son propre salaire, direct et socialisé, par son travail (« cotisations patronales » inclues !), n’a aucune légitimité. Les fonds sociaux appartiennent à la classe salariale et devraient être gérés par ses représentants élus et mandatés. C’est le plan Juppé de 1995 qui a opéré ce vol. Une République démocratique et sociale aura à rendre la gestion de la Sécu et du salaire socialisé à celles et ceux qui le produisent et se le partagent ! Les chefs de LFI et l’aile Hollande du PS voudraient sans doute que ce vote « pour » le PLFSS de la part du PS, décisif dans son adoption puisque le « bloc central » bat de l’aile plus que jamais (mais qui ne suffit pas à l’expliquer : des dizaines de députés, y compris LFI, ont été prudemment absents ce mardi 8 décembre !), signe l’entrée du PS dans le dit « bloc central » soi-disant macronien, ce qui serait la « trahison » qu’un Bompart, loin à vrai dire de la dénoncer, ne cesse de souhaiter et d’appeler de ses vœux ! Possible, s’il n’y avait le rapport de force social, dont fait d’ailleurs partie le vote NFP de 2024, faisant des députés de tous les groupes issus du NFP la majorité relative de cette assemblée : ce rapport de force social exige l’indépendance, donc pas de vote pour le PLFSS et le projet de loi budgétaire de Macron/Lecornu, et l’unité, donc pas d’opposition aux gains revendicatifs tels que le décalage-suspension de la réforme des retraites, et pas d’anathèmes se voulant définitifs ! Cette remise des pendules à l’heure ne peut être réalisée, et elle le sera, que par la mobilisation sociale. Et les municipales seront totalement politiques, totalement nationales et totalement surdéterminées par ces éléments : nous allons y revenir régulièrement à partir de cette semaine. |
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