Douze organisations syndicales ou collectifs hospitaliers appel à une journée de mobilisation pour l’hôpital le 16 juin.

Douze organisations syndicales ou collectifs hospitaliers appel à une journée de mobilisation pour l’hôpital le 16 juin.
le 26/05/2020

Douze organisations syndicales ou collectifs hospitaliers appel à une journée de mobilisation pour l’hôpital le 16 juin.

Ce lundi, lors d’une conférence de presse à distance, douze organisations représentant les soignants hospitaliers ont appelé à une journée de mobilisation pour l’hôpital le 16 juin, sans attendre l’ouverture du « Ségur de la Santé » . Les Echos

Amuf (urgentistes), APH (médecins hospitaliers), CGTSUDUnsa, trois collectifs nés en 2019 (Inter-BlocsInter-HôpitauxInter-Urgences), Printemps de la psychiatrieCoordination nationale des comités de défense des hôpitaux et des maternités de proximité… Les organisations qui se sont exprimées ont été très actives lors des grèves qui ont émaillé la vie de l’hôpital de 2019 jusqu’à l’irruption du coronavirus en février.

Les annonces du ministre semblent n’avoir en rien entamé la détermination et l’exigence des protestataires. Le Ségur de la Santé, tel qu’il se profile, « ne répond pas à notre socle revendicatif », a déclaré Mireille Stivala, de la CGT. Certes, des revalorisations pour le personnel médical vont être accordés. Mais qu’en sera-t-il pour les femmes de ménage, le personnel de cantine, les administratifs ?

« Il n’est toujours pas question de revalorisation pour l’ensemble des salariés, et il n’y a pas de négociations sur la création d’emploi, pas d’annonce d’arrêt des fermetures de lits », a poursuivi la syndicaliste. « On ne veut pas d’assouplissement des 35 heures », a renchéri Jean-Marc Duvauchelle, chez Sud, réclamant du salaire et des emplois : « Nos collègues ont des milliers, des millions d’heures à récupérer », a-t-il rappelé.

La concertation, « on sait comment ça se passe », a critiqué Hugo Huon, infirmier désabusé, au sein du collectif inter-urgences : « Trente acteurs autour d’une table, ça se termine sans calendrier ni plan d’action, et à la fin le gouvernement fait ce qu’il avait prévu ». Les discussions à venir, malgré les milliards promis, ne seront pas de tout repos pour l’exécutif.

Hugo Huon, infirmier et membre du collectif Inter-Urgences, reste néanmoins dubitatif face aux multiples « éléments de langage du gouvernement ». Pour Marianne, il explique pourquoi les personnels soignants restent méfiants et prévoient de nouvelles manifestations.

Marianne : Dans quel état d’esprit se trouvent les personnels soignants à l’hôpital ces derniers jours ?

Hugo Huon : Avant les annonces d’Emmanuel Macron vendredi, puis celles d’Olivier Véran dimanche, il y avait de la colère liée à la mauvaise gestion de la crise. Il y avait aussi une réelle attente de reconnaissance de la part du gouvernement, autre qu’un défilé pour le 14 juillet et des chèques vacances. Nous étions dans l’expectative de mesures fortes pour que l’hôpital public se redresse. Les propositions faites par le gouvernement sont plutôt positives, mais nous restons vigilants parce qu’avant ça, rappelons qu’Agnès Buzyn nous a déjà proposé deux plans obsolètes. Aujourd’hui dans le corps médical, il y a une défiance certaine à l’encontre des dirigeants.

Globalement, êtes-vous satisfaits des annonces faites par Olivier Véran ?

Ils se sont engagés sur les revalorisations salariales, c’est un point à noter, car depuis un an, cela n’a jamais été à l’ordre du jour. Il y a donc du positif mais encore beaucoup de questions en suspend et rien de vraiment très concret. D’autant que dans la communication du ministre comme du Président il y a aussi pas mal d’éléments de langage qui ne sont pas forcément convaincants de notre point de vue. D’abord, monsieur Véran ne cesse de communiquer sur le fait que les dépenses publiques pour l’hôpital ont augmenté en un an, c’est faux. Il n’y a qu’à regarder les chiffres du dernier projet de loi de finances de la sécurité sociale… Ensuite, on assure, dans la communication gouvernementale, que les T2A (tarifications à l’acte) c’est presque de l’histoire ancienne. Ce n’est pas vrai non plus, c’est encore très courant.

Quel est l’aspect fondamental des choses selon vous, la première mesure à mettre en place ?

A court terme, il y a trois points essentiels sur lesquels il est nécessaire d’avancer. Olivier Véran nous parle de revalorisation des salaires des infirmiers, très bien, c’était parmi nos revendications. Mais attention de ne pas oublier de revaloriser les autres paramédicaux, comme les aides-soignants, ainsi que les fonctions supports telles les agents de ménage, les logisticiens ou encore les secrétaires médicales. Ensuite, il faut couper court aux plans de restructuration déjà entamés jusqu’à ce que la carte sanitaire de la France soit redéfinie. Enfin, il faut aller plus loin sur les tarifications à l’acte et réellement les arrêter pour trouver un mode de financement viable et sain.

A long terme, c’est l’organisation du système de santé qui doit être retravaillée en pensant les choses de façon locale, c’est-à-dire en incluant les territoires. L’objectif est de rompre avec la gouvernance technocrate et d’avoir une logique ascendante, ou ”bottom up” comme dirait ”la start up nation”, qui permettrait une prise en considération des équipes de soignants qui sont au plus près des malades. Au final l’important n’est pas de savoir qui va diriger, car on ne se fait pas d’illusions on sait bien que ce sera toujours les mêmes, c’est plutôt de mettre en œuvre processus pérenne d’évaluation de la qualité des soins.

Le ministre préconise par ailleurs plus de ”souplesse” quant au cadre des 35 heures pour ceux qui voudraient ”augmenter leur rémunération” et ceux qui ”souhaitent organiser différemment leur temps de travail”. Qu’en pensez-vous ?

Je n’ai pas tellement d’avis là-dessus parce qu’en réalité à l’hôpital, faute de personnels suffisants, on ne fait pas 35 heures, on ne peut tout simplement pas se le permettre. Les syndicats sont totalement contre car cela serait considéré comme un retour en arrière sur l’un des derniers grands acquis sociaux. Moi je dis simplement attention : payer les heures supplémentaires ne fera pas office de revalorisation.

Par ailleurs l’idée d’organiser différemment le temps de travail n’est pas mauvaise, mais il faut que ce soit à la liberté du soignant et que cela corresponde à l’activité de l’hôpital. Encore une fois, il faut être prudent, car à partir du moment où l’on dit que ce sera à la liberté du soignant, cela peut vite se transformer en habitude de service et à terme en obligation.

Quand Olivier Véran dit au Journal du Dimanche que : “Tous les patients atteints par le virus qui avaient besoin d‘être pris en charge l’ont été”. Êtes-vous d’accord ?

Tout dépend de ce que l’on appelle une ”prise en charge”. Pour ma part je pense que oui tout le monde a été pris en charge mais pas avec la même qualité de soins. Il y a quand même eu des dysfonctionnements effarants, notamment dans les Ehpad…

Croyez-vous au ”mea culpa” d’Emmanuel Macron vendredi, devant les personnels soignants de l’hôpital de la Pitié Salpêtrière, à Paris ?

Pas vraiment. Ce que dit Emmanuel Macron est vrai, il reprend même nos éléments de langage, mais je ne crois pas que ce soit un acte de contrition pour autant. Si le Président a tenu ce discours-là, c’est parce qu’il est en position de faiblesse devant un hôpital en grève depuis un an et qui relance les contestations après la crise du Covid-19. D’autant plus que la population expérimente ce que c’est que d’être en manque de lits et soutient les soignants. Pour moi ce n’est rien d’autre qu’un calcul politique. Je ne pense pas que l’on soit avec des gens qui visent foncièrement le bien général quand on voit qu’ils réduisent les dépenses publiques au détriment de la santé de la population.

Vendredi 15 mai, les différentes organisations avaient annoncées qu’une grève se profilait mi-juin. Est-ce toujours d’actualité ?

Oui, le rendez-vous est donné pour le 16 juin. L’idée est de se donner un cap et de voir si au bout d’un mois le gouvernement agit ou non. Nous n’avons pas oublié le passif du ministère de la Santé sous la gouvernance d’Agnès Buzyn où les organisations syndicales et autres n’ont pas eu d’occasions d’entrer en négociations.

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