Cette décision intervient alors que des milliers de personnes manifestent samedi en France contre le racisme et les violences policières.
Le Conseil d’Etat a jugé, dans une décision publiée samedi 13 juin, que « l’interdiction de manifester n’est pas justifiée par la situation sanitaire actuelle ». Une interdiction ne peut être justifiée « que lorsque les mesures barrières ne peuvent être respectées ou que l’événement risque de réunir plus de 5 000 personnes », relève-t-il.
Le Conseil d’Etat avait été saisi notamment par cinq organisations (CGT, Solidaires, Fédération syndicale unitaire, Syndicat de la magistrature et Syndicat des avocats de France). Selon leur avocat, cette interdiction portait « une atteinte manifestement illégale à plusieurs libertés fondamentales : la liberté de manifester et le droit d’expression collective des idées et des opinions, la liberté de réunion et la liberté syndicale ».
Cette décision intervient alors que des milliers de personnes manifestent samedi en France contre le racisme et les violences policières. A Paris, la marche, non autorisée par la préfecture, a été bloquée à son point de départ et des tensions ont éclaté ; la police, huée par la foule, a fait usage de gaz lacrymogène après avoir reçu quelques projectiles.
Outre la nécessité des gestes barrières, le Conseil d’Etat reconnaît la validité de la jauge de 5 000 personnes imposée pour les rassemblements par le gouvernement jusqu’au 31 août 2020. En appui de sa décision, le juge des référés du Conseil d’Etat cite notamment des recommandations du 24 avril 2020 du Haut Conseil de la santé publique, qui ne préconisent « aucune restriction à la circulation dans l’espace public tant que les mesures barrières sont respectées (distanciation d’un mètre ou port du masque notamment), et qu’une reprise de l’épidémie n’est pas constatée ».
« Très grande victoire » pour les requérants
« C’est une très grande victoire. Le Conseil d’Etat garantit la liberté de manifester », a réagi auprès de l’AFP Patrice Spinosi, avocat de la Ligue des droits de l’Homme (LDH), également requérant. « Il n’y avait aucune raison pour que la liberté de manifester soit moins bien traitée que la liberté de cultes. On peut juste regretter que cela intervienne aussi tard », a-t-il ajouté, précisant que la LDH avait saisi le Conseil d’Etat en urgence « il y a quinze jours ».
Mardi, en dépit de l’interdiction alors en vigueur, quelques milliers de personnes se sont rassemblées à Paris en mémoire de Georges Floyd, cet Afro-Américain tué par un policier blanc à Minneapolis. Mais quelques heures avant, le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, avait expliqué que bien qu’interdite, cette manifestation serait tolérée et ne donnerait pas lieu à des sanctions. « C’est une situation absurde », avait dénoncé Me Spinosi.
Le juge administratif a tenu à préciser que « conformément à la loi », toute manifestation sur la voie publique devait « faire l’objet d’une déclaration préalable » et pouvait être interdite par les autorités de police ou le préfet, « s’ils estiment qu’elle est de nature à troubler l’ordre public, y compris pour des motifs sanitaires, ou lorsque les circonstances locales l’exigent ».
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