Des émeutes inédites ont secoué plusieurs villes du pays, dans la nuit de dimanche à lundi, en raison de l’annonce d’un couvre-feu pour lutter contre le Covid-19.
Lundi matin des passants ramassent des éclats de verre brisés aux alentours de la gare d’Eindhoven. Des petits morceaux continuent de tomber du premier étage de la station, forçant la police à boucler une partie du périmètre pour protéger les voyageurs. La ville, qui reprend doucement vie après une soirée mouvementée, a connu des scènes de violences sans précédent provoquées par une annonce très controversée d’un couvre-feu – le premier depuis la Seconde Guerre mondiale – de 21 heures à 4h30 du matin.
Malgré la baisse des infections (4 891 cas au 24 janvier, soit 12% de moins que la semaine précédente), la décision a été votée vendredi pour lutter contre l’arrivée du variant britannique du Covid-19, et a provoqué des esclandres aux Pays-Bas. Le couvre-feu a commencé samedi soir, dans le calme, mais de nombreuses villes se sont soulevées dimanche soir, pour protester contre cette mesure exceptionnelle dans un pays si libéral. Réputés pour leur discipline exemplaire, les Néerlandais ne sont pourtant pas adeptes de manifestations violentes. Cependant, dans la nuit de dimanche à lundi, la police anti-émeute a dû être déployée à Amsterdam, La Haye, Eindhoven, Tilbourg, Venlo, Breda, Helmond, ou encore Apeldoorn.
«Nous combattons le virus pour retrouver la liberté»
Tout a débuté dans le centre-ville de la capitale, dimanche après-midi, où environ 1 500 personnes, selon les sources policières, se sont réunies pour manifester sans autorisation. Attaquant la police et même leur cavalerie, les manifestants ont semé le trouble dans la ville, créant confusion et panique parmi les riverains. De nombreuses personnes sont restées bloquées chez elles ou contraintes de faire un détour à vélo de leur trajet. Après le couvre-feu, les violences se sont étendues dans tout le pays. Un centre de dépistage du coronavirus a été incendié à Urk et un hôpital attaqué sans succès à Enschede. Le maire d’Eindhoven a parlé de «guerre civile» dans son communiqué.
Le Premier ministre, Mark Rutte, a condamné ces violences lundi matin, en précisant que 99% des Néerlandais adhéraient aux mesures prises par le gouvernement – chiffre probablement surestimé. «Nous combattons le virus pour retrouver la liberté. Nous ne prenons pas ces mesures pour le plaisir», s’est-il senti obligé de préciser.
Mesures contradictoires
Au Pays-Bas, la gestion du coronavirus oscille, depuis le départ, entre laxisme et soudaine inflexibilité. Aucun confinement et thèse de l’immunité collective privilégiée. «Il est clair que l’immunité collective était leur stratégie mais après de nombreux reproches, ils ont écarté cette possibilité pendant l’été», confirme Gowri Gopalakrishna, épidémiologiste et membre de la «Red Team» (équipe de scientifiques invitée par le gouvernement à présenter leurs recherches sur les épidémies). Depuis, c’est une cacophonie de mesures contradictoires. Le port du masque en intérieur, jugé d’abord inutile, a été rendu obligatoire au premier décembre 2020 dans les lieux publics, suivi d’une fermeture des magasins inattendue à la veille de Noël, alors que lors du Black Friday, un mois plus tôt, les foules s’agglutinaient dans les boutiques.
«Les événements d’hier soir ont vraiment dépassé toutes les limites», a commenté lundi matin Hubert Bruls, le président du Conseil de sécurité des Pays-Bas, qui doit se réunir lundi après-midi pour prendre de nouvelles mesures face aux manifestations. Le syndicat de la police néerlandaise (NPB) s’attend à actions anti-couvre-feu pendant des «jours voire des semaines» et craint un retour des violences dès lundi soir.
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