Birmanie : la répression s’intensifie, au moins 18 morts lors des manifestations contre le coup d’Etat

Le pays est agité par des rassemblements prodémocratie depuis que l’armée a renversé le gouvernement, le 1er février.

Le Monde avec AFP

Publié le 28/02/2021

La Birmanie a définitivement basculé dans une répression sanglante, dimanche 28 février, quand de nouveaux rassemblements prodémocratie, protestant contre le coup d’Etat du 1er février, ont été violemment dispersés par les forces de sécurité. Au moins 18 manifestants ont été tués dans plusieurs villes du pays, a rapporté le Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations unies dans un communiqué.

Les autorités ont graduellement intensifié l’usage de la force pour les disperser, avec des gaz lacrymogènes, canons à eau, balles en caoutchouc et parfois des tirs à balles réelles.

« Nette escalade du recours à la force létale »

Pyae Zaw Hein, volontaire auprès des secouristes à Dawei, a expliqué que plusieurs morts avaient été « touchés par des tirs à balles réelles », alors que les blessés avaient été atteints par des tirs de balles en caoutchouc.

Des manifestants ont été tués à Dawei, dans le sud du pays. 

A Rangoun, les forces de sécurité ont aussi très vite dispersé une manifestation. « La police a commencé à tirer dès que nous sommes arrivés, a déclaré Amy Kyaw, une institutrice de 29 ans. Il n’y a pas eu un mot d’avertissement. Certains ont été blessés et certains sont toujours en train de se cacher dans les maisons du quartier. » Des retransmissions en direct sur les réseaux sociaux montraient les forces de sécurité utilisant des gaz lacrymogènes contre la foule à Rangoun. Mais on ignore si des tirs à balles réelles ont été effectués. A Mandalay, un manifestant, grièvement blessé par un projectile qui a transpercé son casque et s’est logé dans son cerveau, est dans un état critique.

Avant la journée de dimanche, on dénombrait cinq morts dans les rangs des manifestants depuis le 1er février. L’armée a affirmé pour sa part qu’un policier avait péri en tentant de disperser un rassemblement. « La nette escalade du recours à la force létale (…) est scandaleuse et inacceptable et doit être immédiatement stoppée », a réagi Phil Robertson, directeur adjoint de la division Asie de Human Rights Watch.

« Nous condamnons fermement la répression violente des manifestations en Birmanie, et appelons les militaires à cesser immédiatement d’utiliser la force contre des manifestants pacifiques »a pour sa part déclaré Ravina Shamdasani, porte-parole du Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU, dimanche.

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Plus de 850 personnes arrêtées

La répression envers les journalistes se poursuit. L’un d’entre eux a été battu par les forces de l’ordre et arrêté à Myitkyina, dans le nord de la Birmanie, d’après un média local. Un autre a été visé par des tirs de balles en caoutchouc dans le centre du pays, selon son employeur. Samedi, au moins trois journalistes ont été interpellés, dont un photographe de l’agence américaine Associated Press ainsi qu’un vidéaste et un photographe de deux agences birmanes, respectivement Myanmar Now et Myanmar Pressphoto.

Plus de 850 personnes ont été arrêtées, inculpées ou condamnées depuis le coup d’Etat, selon une ONG d’aide aux prisonniers politiques. Mais ce chiffre devrait exploser au sortir du week-end, des médias officiels faisant état de 479 arrestations pour la seule journée de samedi. La junte a démis samedi de ses fonctions son ambassadeur aux Nations unies, au lendemain de sa rupture spectaculaire avec le pouvoir militaire.

La Birmanie est secouée par une vague de manifestations prodémocratie et une campagne de désobéissance civile depuis le putsch qui a renversé la dirigeante civile, Aung San Suu Kyi, le 1er février. De nombreuses voix continuent à demander sa libération alors que la justice birmane se penche lundi sur son cas. Assignée à résidence dans la capitale Naypyidaw depuis son arrestation, l’ex-dirigeante de 75 ans est poursuivie pour avoir importé illégalement des talkies-walkies et violé des restrictions liées au coronavirus.

L’audience doit durer toute la journée et se pencher principalement sur le calendrier du procès, a fait savoir à l’Agence France-Presse son avocat Khin Maung Zaw qui n’a toujours pas été autorisé à rencontrer sa cliente et n’a pu préciser si cette dernière pourrait y assister par vidéoconférence.

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Le Monde avec AFP

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