Manifestation pour les droits des femmes, le 8 mars 2021 à Paris ( AFP / Bertrand GUAY )
« Quand les femmes s’arrêtent, tout s’arrête! »: des dizaines de milliers de manifestants ont défilé lundi à Paris et dans plusieurs grandes villes de France, pour dénoncer la persistance des inégalités subies par les femmes, que la crise sanitaire et les confinements ont encore renforcées.
Écarts de salaires, discriminations, violences sexuelles et sexistes: les « premières de corvées » étaient appelées à se mettre en « grève féministe », comme le proclamait la banderole de tête du cortège parisien, qui a rassemblé dans une ambiance festive quelque 30.000 personnes, selon les organisateurs.
« C’est dommage qu’on soit toujours en train de manifester en 2021 pour réclamer l’égalité des droits », a dit à l’AFP Lucie, 22 ans, étudiante à la Sorbonne, pour qui « la pandémie a beaucoup fait reculer » les droits des femmes.
Dans plusieurs cortèges, les banderoles usaient de l’humour pour exprimer la colère: « Rage against the machism » à Paris, « La femme ne sera pas l’avenir de l’homme: qu’il se démerde » à Toulouse (où la préfecture a compté environ 3.800 manifestants), « Laissez-nous jouir de nos droits », ou « chatte en colère » à Rennes, où les quelque 1.700 participants ont notamment rendu hommage aux dizaines de victimes de féminicides de l’année écoulée.
– « Les hommes ont un rôle à jouer » –
A Strasbourg, environ 350 personnes, dont une centaine de sages-femmes habillées en « servantes écarlates », selon le personnage créé par la romancière Margaret Atwood, ont défilé derrière une banderole proclamant « Egalité professionnelle femme-homme : le compte n’y est pas ».
« Ce n’est pas que le combat des femmes. Les hommes ont leur rôle à jouer dans la prise de conscience des inégalités », commentait Samuel Maurer, un pompier de 30 ans croisé dans le cortège strasbourgeois.
Manifesation à Paris pour les droits des femmes, le 8 mars 2021 ( AFP / Bertrand GUAY )
A Marseille, dans une manifestation clairsemée de moins de 200 personnes, six féministes africaines étaient venues dire « Stop aux violences faites aux femmes ». « Tout le monde sait que quand ça ne va pas dans le monde, c’est la situation des filles qui en pâtit », a observé la comédienne ivoirienne Naky Sy Savané. Pendant la crise du Covid, « les écoles ont été fermées et les excisions et les mariages forcés ont augmenté », a-t-elle ajouté.
A Besançon, de 130 à 200 personnes ont observé une minute de silence pour dénoncer « les exactions faites aux femmes, que ce soit au travail ou dans la vie ».
Ce 8 mars était également l’occasion de dénoncer la persistance des inégalités dans le monde du travail: symboliquement, les femmes étaient appelées à s’arrêter à 15h40, heure théorique où elles cessent d’être rémunérées compte tenu de l’écart moyen de salaire avec les hommes, tous contrats confondus (environ 25%).
Dans un rare communiqué commun, sept des huit grandes organisations syndicales ont réclamé l’ouverture de négociations pour « revaloriser les salaires des métiers à prédominance féminine ».
– « Inexplicable » –
Manifestation pour les droits des femmes, à Rennes le 8 mars 2021 ( AFP / Damien MEYER )
« Il est absolument anormal, je n’ose dire scandaleux, qu’à travail égal, même si des progrès ont été accomplis, le salaire ne soit pas encore égal. C’est inexplicable », a estimé le Premier ministre Jean Castex, à la remise des prix « 1.000 possibles » lundi.
En vertu de cette opération lancée par le gouvernement et qui veut « donner confiance à toutes les femmes », toutes les petites filles nées ce 8 mars devraient recevoir la lettre d’une personnalité féminine « inspirante » (dont la créatrice Agnès B, les chanteuses Pomme et Nolwenn Leroy, la militante Latifa Ibn Ziaten).
Jean Castex a assuré avoir deux priorités sur ce sujet, « la lutte contre les violences faites aux femmes » et « la mise en œuvre de la réforme du versement des pensions alimentaires ».
Une femme passe à côté d’un slogan féministe, le 8 mars 2021 à Rennes ( AFP / DAMIEN MEYER )
Côté monde économique, la ministre déléguée à l’Égalité femmes-hommes Elisabeth Moreno s’est dite favorable à des « quotas » de femmes dans les comités de direction des entreprises.
Le sujet devrait être évoqué lors de l’examen de la proposition de loi visant à « accélérer l’égalité économique et professionnelle », déposée lundi par les députés LREM.
Les résultats de l’index de l’égalité femmes/hommes dans les entreprises, publiés lundi, indiquent que cette année, 70% des entreprises de plus de 50 salariés ont publié leur note contre 59% l’année dernière.
Mais si, en dépit de la crise, « les entreprises ont été au rendez-vous », cela « progresse insuffisamment », a commenté la ministre du Travail lundi sur RTL. Seulement 2% d’entre elles obtiennent la note de 100. « 98% ont des marges de progrès », a souligné Élisabeth Borne, citant « parmi les bons élèves » les enseignes Brioche Dorée, Nicolas et la Française des Jeux, tandis que Monsieur Bricolage, Havas Voyages et Foncia Groupe sont parmi les plus mal notés.
Le ministère de l’Economie et des Finances s’est engagé de son côté lundi « à ne plus participer à des manifestations publiques ou événements médiatiques, en présentiel ou à distance, qui ne compteraient aucune femme parmi les intervenants ».
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