Réforme de l’assurance chômage : le gouvernement ignore l’avis du Conseil d’État

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PAR NOLWENN WEILER

Le gouvernement a décidé de passer en force sur la réforme de l’assurance chômage, en publiant le décret la veille de son application. L’avis du Conseil d’État, qui devait se prononcer sur le fond de la réforme, est carrément ignoré.

Le décret durcissant les calculs de l’allocation chômage a été publié au Journal officiel du jeudi 30 septembre, pour une application dès… le lendemain, à partir de ce vendredi 1er octobre. Annoncée en 2019, puis repoussée à cause de l’épidémie de coronavirus, la réforme de l’assurance chômage devait entrer en vigueur le 1er juillet 2021. Elle avait été suspendue le 22 juin par le Conseil d’État, saisi par les syndicats. Mettant en avant « les incertitudes sur la situation économique », la juridiction administrative avait estimé que le moment de mise en place de la réforme était mal choisi. La haute juridiction avait par ailleurs annoncé qu’elle se prononcerait sur le fond de la réforme d’ici quelques mois.

Le gouvernement a décidé de passer outre cet avis, et de publier le décret la veille de son application, ce qui laisse très peu de temps aux syndicats pour le contester avant sa prise d’effet. Il arrive qu’un texte déjà appliqué soit finalement annulé, mais qu’en sera-t-il pour les demandeurs d’emplois qui auront perdu des allocations à cause de l’application de la réforme ? Pourront-ils récupérer leurs droits perdus ? Auront-ils les ressources nécessaires pour le faire ? Il est permis d’en douter, tant les conditions de vie de certains d’entre eux risquent de se dégrader.

Plus d’un million de demandeurs et demandeuses d’emploi pourraient voir leur revenu chuter, tant les conditions se durcissent. Pour pouvoir s’inscrire comme demandeur d’emploi, il faudra avoir travaillé six mois au lieu de quatre (soit 910 heures, ou 130 jours). La période de référence, celle sur laquelle l’Unédic se base pour comptabiliser les heures passées à travailler, baisse de 28 à 24 mois. Et le mode de calcul du salaire journalier de référence (ou SJR), sur lequel on s’appuie pour déterminer le montant des indemnisations est complètement revu.

Pour réaliser ce calcul, basé sur les revenus perçus par la personne indemnisée, seront désormais ajoutées aux périodes travaillées les périodes chômées (au cours desquelles les revenus perçus sont moindres voire nuls). Le résultat est mathématique : les indemnisations dévissent. Certains chômeurs, qui ont alterné des CDD et des périodes sans emploi, verront leurs indemnités baisser d’un tiers, voire de moitié !

- Lire à ce sujet notre décryptage : Effondrement des indemnités, reprise d’emploi découragée : les aberrations de la réforme de l’assurance chômage

C’est précisément l’objectif du gouvernement dont les ministres répètent à longueur d’interviews qu’il n’est pas question de gagner plus au chômage qu’en travaillant, même si c’est faux [voir notre article Vacances aux Bahamas, chômage mieux rémunéré que le travail : des agents Pôle emploi répondent aux clichés.].

Dessin : Rodho

Nos précédents articles sur le sujet :

« Le recours au Conseil d’Etat est devenu l’une des voies principales pour discuter des choix gouvernementaux »

« Pôle emploi m’a radié et on m’a supprimé le RSA » : la pression s’intensifie contre les chômeurs

Réforme de l’assurance chômage : une catastrophe sociale en vue ?

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