En Colombie, Gustavo Petro prête serment et devient le premier président de gauche du pays

Supporters of Colombia's new President Gustavo Petro cheer during the inauguration ceremony, at the Bolivar square in Bogota, on August 7, 2022. (Photo by Raul ARBOLEDA / AFP)

Cet ancien guérillero de 62 ans a lancé un appel aux groupes armés pour signer la paix et mettre fin à la « guerre antidrogue ». Il a aussi proposé la création d’un fonds international pour protéger l’Amazonie, en proie à la déforestation.

Le Monde avec AFP et Reuters

Publié aujourd’hui
Investiture du président colombien Gustavo Petro sur la place Bolivar, à Bogota, le 6 août 2022.

Une foule immense de plusieurs centaines de milliers de personnes s’est rassemblée sur la place Bolivar de Bogota pour assister, dimanche 7 août, à l’investiture du premier président de gauche de l’histoire de la Colombie.

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En prêtant serment devant une importante délégation d’invités internationaux, Gustavo Petro a succédé au très impopulaire Ivan Duque (2018-2022) pour un mandat de quatre ans, qu’il commence avec le soutien d’une majorité de gauche au Congrès. La Colombie, longtemps dirigée par une élite conservatrice, se place ainsi sur une trajectoire commune à d’autres pays d’Amérique latine qui connaissent un virage à gauche.

Bien que l’accord de paix avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC, marxistes) en 2016 a permis de réduire la violence, la Colombie n’a pas encore éteint le dernier conflit armé interne du continent. Outre l’Armée de libération nationale (ELN), de puissants gangs de trafiquants de drogue tels que le clan du Golfe, dirigé par le baron « Otoniel » extradé cette année aux Etats-Unis, imposent leur loi dans plusieurs régions du pays. Les dissidents des FARC défient également l’Etat grâce aux ressources provenant de l’exploitation minière illégale et, surtout, du trafic de drogue, de cocaïne notamment.

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Apporter « la tranquillité et la paix » à la Colombie

Sur ce point, M. Petro propose de repenser l’échec de la politique d’éradication des cultures, en collaboration avec les Etats-Unis, principal consommateur de ce dérivé de la feuille de coca. Il a estimé qu’il était « temps d’avoir une nouvelle convention internationale qui accepte que la guerre contre les drogues a échoué », pour lui préférer une « politique forte de prévention de la consommation » dans les pays développés.

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« Le premier gouvernement qui, nous l’espérons, sera un gouvernement de paix est sur le point de commencer. Nous espérons qu’il pourra apporter à la Colombie ce qu’elle n’a pas eu depuis des siècles, à savoir la tranquillité et la paix », avait-il déjà déclaré, samedi, dans la capitale lors d’une première cérémonie d’intronisation auprès des peuples indigènes, afro-colombiens et paysans. « Je ne veux pas de deux pays, de même que je ne veux pas de deux sociétés. Je veux une Colombie forte, juste et unie », a-t-il dit, ému, lors de son discours d’intronisation, dimanche.

Un gouvernement pluriel avec des femmes à la tête de plusieurs ministères

Cette photo publiée par le bureau de presse présidentiel montre le nouveau chef d’Etat colombien Gustavo Petro assermentant la vice-présidente Francia Marquez lors de leur cérémonie d’investiture sur la place Bolivar à Bogota, le 7 août 2022. 

L’ancien chef de l’opposition depuis deux décennies prend ses fonctions avec une batterie de réformes en tête qui suscitent de fortes attentes chez ses partisans depuis sa victoire le 19 juin. A ses côtés, l’écologiste Francia Marquez, 40 ans, est la première vice-présidente afro-colombienne d’une nation qui a historiquement été gouvernée par des élites masculines blanches. Gustavo Petro a formé un gouvernement pluriel, avec des femmes à la tête de plusieurs ministères, avec pour mission de faire avancer les réformes, qui commenceront leur parcours législatif dès lundi.

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M. Petro entend malgré tout remplir sa promesse de réduire le fossé entre les plus riches et les plus pauvres en développant l’accès au crédit, en multipliant les aides et en mettant l’accent sur l’éducation. Si l’économie colombienne a récupéré de la pandémie et retrouvé la croissance, les 10,2 % d’inflation en glissement annuel en juillet, le chômage (11,7 %) et les 39 % de pauvreté rendent les défis encore plus grands.

Réduire la dette extérieure pour la « transformer en actions concrètes » pour le climat

Gustavo Petro a également proposé dans son discours d’investiture de créer un fonds international pour protéger l’Amazonie, en proie à la déforestation. « Nous pouvons transformer toute la population de l’Amazonie colombienne en une population protectrice de la forêt, mais nous avons besoin de financements du monde entier pour ce faire », a-t-il affirmé.

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Il a notamment fait campagne en promettant d’accélérer la transition vers des sources d’énergies propres et de freiner la déforestation de l’Amazonie, dont l’écosystème est crucial pour absorber les gaz à effet de serre. Selon des organisations de protection de l’environnement, la Colombie a perdu pendant le mandat de son prédécesseur une superficie forestière d’au moins 7 018 kilomètres carrés. D’immenses incendies constituent la principale cause de déforestation amazonienne, provoqués notamment par l’élevage intensif, l’exploitation agricole et la culture de la drogue.

Sur le plan international, M. Petro va également chercher du soutien pour reprendre les pourparlers de paix avec l’ELN, la dernière guérilla reconnue dans le pays, et il va réactiver les relations diplomatiques et commerciales rompues depuis 2019 avec le Venezuela voisin de Nicolas Maduro. Le président vénézuélien l’a d’ailleurs félicité dans une vidéo : « Je tends la main au peuple de Colombie, au président Gustavo Petro, pour rebâtir une fraternité sur la base du respect et de l’amour entre les peuples. »

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Le Monde avec AFP et Reuters

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