https://www.lejdd.fr/ le 27 mai 2019
- Alexis Boisselier
Le score de La France insoumise aux élections européennes (6,3%) est une grosse déconvenue pour Jean-Luc Mélenchon, même s’il n’était pas tête de liste. Elle pose le doute sur sa stratégie.
Comme un air de déjà-vu. Dimanche soir, le score de La France insoumise aux élections européennes (6,3%) a dû rappeler quelques souvenirs à Jean-Luc Mélenchon. Il y a cinq ans, la liste Front de gauche, soutenue par l’ancien socialiste avait effectué un score comparable (6,6%). Mais depuis, tout avait changé. Le Front de gauche n’avait pas résisté aux querelles avec les communistes, Jean-Luc Mélenchon avait lancé son « mouvement gazeux » avec La France insoumise, frôlé le second tour de la présidentielle, « à 600.000 voix près », et s’était imposé comme le premier opposant à Emmanuel Macron.
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L’échec du scrutin européen apparaît ainsi comme un véritable coup d’arrêt pour La France insoumise et pour Jean-Luc Mélenchon lui-même. Fort de son score de 19,6% à la présidentielle, Jean-Luc Mélenchon avait déclaré à l’été 2017 souhaiter « remplacer le PS » pour devenir la force centrale à gauche. Il se retrouve talonné par la liste PS-Place Publique de Raphaël Glucksmann (6,2%) et largement devancé par Europe Ecologie – Les Verts (13,5%).
Absence d’autocritique
Un résultat qualifié par Jean-Luc Mélenchon lui-même de « très décevant, pas à la hauteur de nos espérances […] et encore moins de nos efforts ». Un constat mais pas d’autocritique. Selon Le Monde, la consigne avait été donnée aux cadres de La France insoumise de ne pas en faire. Au contraire, Jean-Luc Mélenchon a appelé à « continuer de tracer le chemin que nous avions inauguré si vaillamment ».
S’il n’était qu’en avant-dernière position sur la liste emmenée par Manon Aubry, c’est pourtant bien Jean-Luc Mélenchon qui se retrouve en première ligne aujourd’hui. Régulièrement critiqué pour son omniprésence au sein du parti, le tribun est le responsable naturel du score de LFI.
Une popularité entamée par les perquisitions du siège de LFI
Le baromètre Odoxa pour France Inter, L’Express et la presse régionale, révélait ainsi en avril que Jean-Luc Mélenchon était, après Marine Le Pen, la personnalité politique qui suscitait le plus de rejet (50% des personnes interrogées le rejettent). Si la personnalité du leader de La France insoumise a toujours été clivante, cela semble s’être encore renforcé depuis quelques mois.
L’épisode le plus marquant est celui des perquisitions de son domicile et du siège du parti qui ont dégénérées mi-octobre. Accompagné de plusieurs élus et sous les caméras, Jean-Luc Mélenchon avait tenté de s’opposer aux forces de l’ordre. Un moment houleux qui avait eu des conséquences immédiates dans les sondages.
Fin octobre, l’Ifop révélait notamment que « 59% des Français déclarent que Jean-Luc Mélenchon les inquiète, soit 21 points de plus qu’en avril 2017, au cœur de la campagne de l’élection présidentielle. » Seuls 32% des Français considéraient également comme « honnête » le chef de file de La France Insoumise, soit une chute de 45 points depuis le printemps 2017. « Une véritable rupture d’opinion », avait alors analysé l’institut de sondage.
Thomas Guénolé qualifie Jean-Luc Mélenchon d' »autocrate »
Une baisse de popularité qui s’est également ressentie dans les enquêtes sur les européennes. Encore à 14% dans les sondages l’été dernier, la liste de La France insoumise a connu une régulière décrue jusqu’au début de l’année 2019 tombant jusqu’à 7%.
Malgré les tentatives de Jean-Luc Mélenchon de faire du scrutin européen un référendum contre Emmanuel Macron ou du soutien du leader de LFI à la mobilisation des Gilets jaunes, le mouvement a peiné à redécoller. Il a même repris du plomb dans l’aile après le départ de Thomas Guénolé qui figurait à l’origine sur la liste LFI.
Le politologue, qui est accusé d’harcèlement sexuel, n’a pas mâché ses mots qualifiant Jean-Luc Mélenchon d' »autocrate » aux « méthodes staliniennes ». « L’appareil central fonctionne comme une toile d’araignée : des cercles de plus en plus étroits, jusqu’à ‘JLM’ au centre qui in fine décide de tout ce qui compte en symbiose avec Sophia Chikirou », poursuivait Thomas Guénolé.
Jean-Luc Mélenchon est quand même le moteur de ce que nous faisons
Interrogé sur France info à propos de la responsabilité de Jean-Luc Mélenchon dans cet échec, Alexis Corbière a défendu son leader. « Jean-Luc Mélenchon est quand même le moteur de ce que nous faisons. C’est lui qui a fait émerger ce mouvement nouveau à hauteur de près de 20% [lors de l’élection présidentielle de 2017], c’est lui qui rassemble énormément de gens dans nos meetings » a rappelé le député.
Peu présent aux côtés de Manon Aubry au début de la campagne, Jean-Luc Mélenchon était revenu sur le devant de la scène lors des dernières semaines. A la veille des européennes, la liste LFI était remontée dans les sondages entre 8% et 9% entretenant les espoirs d’un score à deux chiffres. En vain.
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