Maxime Poul
Alors que la plupart des pays ont subi une forte augmentation des prix de l’électricité depuis le début de la guerre en Ukraine, l’Espagne et le Portugal ont réussi à contenir cette hausse. Explications.
Les prix de l’électricité s’envolent. Les prix de gros de l’électricité pour 2023 en France ont battu des records en atteignant plus de 1 000 euros le mégawattheure (MWh), contre 85 euros il y a un an. Un phénomène observé dans la grand majorité des pays d’Europe depuis le début de la guerre en Ukraine, en raison de la diminution des flux de gaz russe vers l’Europe, de nombreuses centrales thermiques utilisant du gaz pour générer de l’électricité. Belgique, Allemagne, Royaume-Uni, Italie… En quelques mois, tous les consommateurs de ces pays ont également observé une importante augmentation de leur facture d’électricité, au contraire des Espagnols et des Portugais.
Alors que le tarif atteignait 659,94 euros/ MWh en France ou en Allemagne ce samedi 27 août, il se situait « seulement » à 239,18 euros /MWh en Espagne et au Portugal, selon le site du Réseau de transport d’électricité. Un prix près de 3 fois moins élevé qui s’explique pour une raison : « la dérogation ibérique », dont bénéficient les deux pays.
Les compagnies énergétiques taxées plutôt que les consommateurs
Au mois d’avril dernier, les deux pays ont eu l’autorisation de mettre en route un système tarifaire qui plafonne les prix du gaz, qui entre dans la production électrique, afin d’alléger la note d’électricité des ménages et des entreprises. « Pour une fois, ce ne sera pas les mêmes qui paieront », avait déclaré la ministre de la Transition écologique espagnole, Teresa Ribera, en expliquant que les compagnies énergétiques allaient faire les frais de cette baisse.
Ce système longuement et durement négocié avec Bruxelles a permis aux deux pays de décrocher du système tarifaire européen et permet « de dissocier la formation du prix de l’électricité » de celui « du gaz ». Pendant 12 mois, la dérogation ibérique permet à l’Espagne et au Portugal de plafonner à 40 euros le MWh dans un premier temps, avant de monter progressivement pour atteindre une moyenne de 50 euros le MWh sur l’année. Comme le gaz représente entre 20% et 30% de la production électrique, cela permettra une réduction du prix de l’électron de 30%.
Le prix du gaz sera plafonné à 40 euros le MWh durant les six premiers mois, avant de monter progressivement pour atteindre une moyenne de 50 euros le MWh sur l’année, soit la moitié de ce qu’il avait coûté ces trois derniers mois. Le gouvernement espagnol calcule que le système va se traduire par une réduction directe de 30% de la note d’électricité, avec un mégawattheure à 130 euros en moyenne, au lieu de 210 euros ces derniers mois.
Le système européen inadapté à ces deux pays
Un statut particulier pour ces deux pays qui font figure d’exception, car la péninsule ibérique a un niveau d’exposition plus élevé à l’évolution du marché de gros. En effet, la majorité de l’électricité produite dans ces pays l’est à partir de sources renouvelables et ils comptent très peu d’interconnexions avec le marché européen. Un isolement qui empêche la péninsule ibérique d’échanger et d’avoir accès aux énergies renouvelables du nord de l’Europe, ce qui l’oblige à fonctionner comme une île.
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Peu avant la mise en place de ce système, l’Espagne et le Portugal avaient connu une forte hausse des coûts de l’énergie en raison des règles du marché européen de l’électricité, qui obligent les producteurs à vendre leur énergie au prix de la technologie la plus chère, c’est-à-dire celle des centrales à gaz. Un système jugé inadapté à la réalité énergétique de la péninsule ibérique et qui rend le système européen qui prévalait défavorable aux deux pays.
Depuis plusieurs mois et la flambée des prix de l’énergie, la France et d’autres pays d’Europe pointent du doigt le fonctionnement du marché européen de l’électricité. Plusieurs pays le jugent responsable de cette envolée spectaculaire notamment parce qu’il indexe le prix de l’électron sur celui du gaz.
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