Nigeria : des voix s’élèvent contre une intervention militaire au Niger

Chairperson of Economic Community of West African States (ECOWAS) and President of Nigeria, Bola Ahmed Tinubu, reacts while addressing the ECOWAS head of states and government, following Niger's military junta, in Abuja Nigeria on July 30, 2023 West African leaders were to meet on Sunday for a crisis summit on the coup in Niger, where protesters tried to storm the French embassy after the junta warned of an "imminent military intervention". In the third coup to fell a leader in Africa's restive Sahel region in as many years, Niger's elected president, Mohamed Bazoum, has been held by the military since Wednesday. (Photo by Kola SULAIMON / AFP)

Le 30 juillet, peu après le coup d’Etat qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum, le bloc ouest-africain avait donné sept jours à la junte, soit jusqu’à ce dimanche soir, pour le rétablir dans ses fonctions. La Cedeao réunie depuis trois jours à Abuja a annoncé avoir « défini les contours » d’une « éventuelle intervention militaire ».

Le Monde avec AFP

Publié hier à 00h04,

Des voix s’élèvent au Nigeria, jusqu’au Sénat, pour demander au président, Bola Tinubu, à la tête du bloc ouest-africain, de reconsidérer son éventuelle intervention militaire de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) au Niger contre les putschistes, samedi 5 août.

Des parlementaires et des responsables politiques du pays le plus peuplé d’Afrique ont fait valoir leurs inquiétudes alors que la fin de l’ultimatum lancé par la Cedeao aux putschistes se rapproche.

La pression s’est encore accentuée vendredi lorsque les chefs d’état-major de la Cedeao réunis depuis trois jours à Abuja ont annoncé avoir « défini les contours » de cette « éventuelle intervention militaire ».

Rien n’a filtré sur ce plan d’action, mais il y a fort à parier que le Nigeria voisin, première économie du continent et fort de ses avec 215 millions d’habitants, en serait le premier contributeur en termes financiers, humains et logistiques. C’est d’ailleurs son président, Bola Tinubu, qui, en sa qualité de président de la Cedeao, est porteur de cet ultimatum.

Désaccords entre la présidence et le Sénat

Samedi après-midi, le Sénat nigérian s’est réuni à huis clos pour discuter de la situation au Niger, puis a appelé le président Tinubu à « encourager les autres dirigeants de la Cedeao à renforcer l’option politique et diplomatique », d’après une déclaration du président du Sénat, Godswill Akpabio, à la presse.

Vendredi soir, les sénateurs des régions du nord du Nigeria avaient mis en garde Abuja et la Cedeao contre « un recours à la force militaire sans avoir épuisé toutes les voies diplomatiques », qui aurait, selon eux, « de graves implications » pour le pays.

« Les victimes seront des citoyens innocents qui vaquent à leurs occupations quotidiennes », avait déclaré le Forum des sénateurs du nord dans un communiqué signé par son porte-parole, Suleiman Kawu Sumaila.

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En cas d’intervention, même le Nigeria, dont sept Etats au Nord partagent une frontière de 1 500 kilomètres avec le Niger (Sokoto, Kebbi, Katsina, Zamfara, Jigawa, Yobe et Borno), serait « affecté négativement », ont-ils prévenu.

« Une guerre inutile »

Ces sept Etats ont des liens commerciaux et sociaux historiques avec le sud du Niger, avec lequel ils partagent des affinités culturelles, religieuses et linguistiques. Les sénateurs disaient également s’inquiéter de voir une intervention au Niger déstabiliser davantage ces régions, extrêmement pauvres et déjà sous le joug de groupes armés, et ouvrir un nouveau couloir d’insécurité avec les pays voisins du Niger, à savoir le Mali, le Burkina Faso et la Libye.

« La situation sécuritaire dans notre propre pays reste déjà un sérieux défi pour nos militaires », rappelle la coalition, pour qui un nouveau front aurait aussi pour conséquence de « plonger l’économie fragile du Nigeria dans une crise encore plus profonde ».

Les forces de sécurité nigérianes sont déjà déployées en nombre dans ce pays en proie à une insécurité quasi généralisée (bandes criminelles dans le centre et le nord-ouest, groupes djihadistes dans le Nord-Est, agitation séparatiste dans le Sud-Est).

Sur les réseaux sociaux nigérians, la possibilité d’une intervention est aussi largement discutée : certains se soucient par exemple du sort des 200 000 réfugiés nigérians (qui ont fui les violences jihadistes au Nigeria) installés au Niger, d’autres s’inquiètent d’un afflux de réfugiés nigériens vers le nord du Nigeria, déjà plongé dans une très grave crise humanitaire.

En Algerie, le président Tebboune s’oppose à la guerre

L’intervention militaire au Niger « est une menace directe pour l’Algérie. Nous refusons catégoriquement toute intervention militaire », a déclaré le président algérien Abdelmadjid Tebboune lors d’une interview télévisée avec la presse algérienne diffusée samedi 5 août au soir.

Plusieurs armées ouest-africaines comme le Sénégal se sont dites prêtes à envoyer des soldats, tout comme la Côte d’Ivoire, selon une source proche de la délégation ivoirienne à Abuja, qui n’a pas précisé le nombre éventuel d’hommes mobilisés.

« Deux pays [le Mali et le Burkina Faso] sont prêts à entrer dans la bataille [auprès du Niger] », a rappelé le président algérien en prévenant que, dans le cas d’une intervention militaire, « tout le Sahel s’embrasera ».

Le Monde avec AFP

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